Lors de son discours du 2 octobre contre les séparatismes, Emmanuel Macron a notamment annoncé que l'obligation de neutralité religieuse serait étendue aux agents des entreprises délégataires de services publics, principe qui s’applique actuellement aux fonctionnaires seulement. Un tel projet, touchant à des entreprises de droit privé, peut-il poser des problèmes de constitutionnalité, vis-à-vis des libertés individuelles ?
Invitée de l'émission Audition publique sur les chaînes parlementaires, en partenariat avec Le Figaro Live, ce 5 octobre 2020, la ministre déléguée chargée de la Citoyenneté Marlène Schiappa a affiché sa confiance sur le sujet. « On a travaillé avec Gérald Darmanin depuis quelques mois sur un texte qui, depuis 18 mois, était préparé par le précédent gouvernement, et nous avons fait la version la plus solide possible juridiquement. Le débat parlementaire nous dira comment il a été amendé et nous espérons qu’il passera. »
Le texte doit être présenté en Conseil des ministres le 9 décembre, et le gouvernement disposera d’un avis du Conseil d’État, remis « d’ici la fin de l’année ». Le Parlement débattra sur ce texte au cours du premier semestre 2021. L’ancienne secrétaire d'État, chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations, a notamment précisé que seraient pénalisés le port de tout signe religieux, le refus d’être avec des femmes ou encore l’organisation de salles de prières sur le lieu de travail. Les sanctions doivent encore être discutées.
La question des libertés publiques va également se poser avec le principe de scolarité obligatoire à partir de trois ans, tel que l’a défendu Emmanuel Macron, en opposition avec l’instruction à domicile. Marlène Schiappa a indiqué que les « consultations » se poursuivaient autour du ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer. La ministre déléguée à la Citoyenneté a assuré que la dimension des libertés individuelles avait été prise en compte avec le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. « On considère justement que c’est une loi de liberté parce qu’elle protège la liberté de conscience – le fait d’être en dehors de l’emprise et de toute forme de radicalité des religions, de toute dérive sectaire. La liberté de culte est préservée aussi […] et les libertés individuelles aussi car on protège les femmes contre les certificatifs de virginité. »
Des annonces « d’ici la semaine prochaine » sur la lutte contre les dérives sectaires.
Interrogée sur le calendrier de cette nouvelle « séquence », comme elle la définit elle-même, Marlène Schiappa a assuré que le gouvernement Castex ne partait pas de zéro sur le sujet. « Les premiers résultats ont déjà été obtenus », a-t-elle assuré, évoquant le chiffre de 240 lieux fermés, notamment pour cause de radicalisation. « Cette loi, c’est une nouvelle étape, c’est un réveil républicain auquel le président de la République a appelé », a-t-elle expliqué.
Quant aux éventuelles modifications à apporter à l’actuelle loi de 1905 sur la laïcité, la ministre a répété que le gouvernement ne prévoyait que de simples renforcements. « On ne touchera ni aux équilibres ni aux grands principes de la loi mais il y a des parties de la loi qui peuvent être renforcées », a-t-elle répondu, en ouvrant notamment la voie à des sanctions plus sévères.
Si l’objectif du projet de loi répond à la « menace principale » de « l’islam radical », selon les termes de Marlène Schiappa, le plan du gouvernement devrait également s’attaquer aux dérives sectaires. « Ce sont des menaces moindres mais qui existent », a rappelé la ministre. Elle a précisé qu’elle ferait « quelques annonces » avec son ministre de tutelle Gérald Darmanin « d’ici la semaine prochaine » sur ce dossier.