Le dernier sondage de l’institut Elabe pour BFMTV crédite le Parti socialiste de 7% des intentions de vote. Seulement deux points de plus selon celui réalisé par OpinionWay-Orpi pour les Echos et Radio classique. À deux jours du premier tour des élections législatives, la déroute du PS est annoncée, et même « certaine » selon Étienne Schweisguth, directeur de recherche CNRS au Centre d’études européennes de Sciences Po. « Il n’y a aucun mouvement à la hausse ou à la baisse qui se dessine ces derniers jours », remarque-t-il. Et d’ajouter : « Les bons sondages qui permettent de prédire les élections sont ceux qui sont faits juste avant. L’exemple anglais en est un bon exemple. »
Au Royaume-Uni, l’écart entre le Labor et les Tories n’était plus que de trois points à la veille du scrutin des législatives, alors qu’il était de vingt points à l’annonce de la tenue d’élections anticipées par Theresa May, début avril. À ce titre, la comparaison entre Jeremy Corbyn et le Parti socialiste est donc malvenue. Pourtant, comme le PS, le leader travailliste ne partait pas favori. Il y a à peine un an, accusé de ne pas s’être assez investi pour empêcher le Brexit, il essuyait une motion de défiance des députés travaillistes. Malgré tout, il sera réélu à la tête du parti.
« C’est la nouvelle gauche de Macron qui l’a emporté »
La réélection, le Parti socialiste ne l’a pas connu à l’élection présidentielle puisque Benoît Hamon, son candidat, n’a obtenu que 6,3% au premier tour. « Manifestement c’est la nouvelle gauche de Macron qui l’a emporté », commente Étienne Schweisguth. Selon le politologue, le PS devrait subir le même sort aux législatives. « Ces élections vont être une véritable catastrophe pour le parti », assure-t-il. Et s’il admet que le score du parti de Corbyn aux élections britanniques de jeudi était « une surprise » il certifie que « le PS est en train de mourir ».
« La vraie gauche d’opposition, c’est celle de Mélenchon », estime le directeur de recherche au CNRS. D’après les derniers sondages, la France insoumise est créditée de 11% des intentions de vote, soit seulement deux points de plus que le PS. Et son leader espère d’ailleurs une victoire à l’image de celle de Jeremy Corbyn : « Il a gagné vingt ou trente sièges après qu'on l'a traité de diplodocus, de tout, ce qu'on m'a fait à moi multiplié par deux. Et les électeurs anglais lui ont donné une force et une puissance que je m'espère ce dimanche », a-t-il déclaré ce matin sur BFMTV. Mais selon le politologue, la comparaison est limitée : « Jusqu’à présent, Jean-Luc Mélenchon n’a pas réussi à fonder un parti qui atteindrait les scores que Corbyn a atteints. »
« Pendant plus de trente ans le PS a fait ses succès sur l’ambiguïté : une tendance anti-système, anti-capitaliste, et une tendance gauche de gouvernement. Les dirigeants avaient réussi à faire cohabiter ensemble ces deux tendances radicalement différentes, mais pour réformer la France, il fallait que Hollande aille à l’encontre de son aile gauche et donc des frondeurs. » Dès lors, la scission du PS était actée. Son dernier passage au pouvoir a prouvé que la synthèse était impossible.
Après avoir quitté le gouvernement socialiste, Emmanuel Macron a fait « un pari gagnant », poursuit Étienne Schweisguth : « Contrairement à Manuel Valls, il a tout de suite décidé que le changement n’aurait pas lieu à l’intérieur du PS. » L’ancien ministre de l’Économie a lancé son mouvement à l’extérieur du Parti socialiste et, quelques mois plus tard, il était élu à la tête de l’État. Une victoire qui pourrait être double si on s’en tient aux sondages, qui prédisent un raz-de-marée pour La République en Marche aux législatives (29% des intentions de vote). « Les membres du PS vont devoir réfléchir à leur avenir », conclut le politologue.