« Il y a un appel d’air, ce qui ne peut qu’être positif », se réjouit Céline Goeury, membre d’Élues locales, start-up de l’entreprenariat social dédiée à l’amélioration continue de la vie politique française. Le chemin vers la parité à l’Assemblée nationale est long. Autorisées à y siéger depuis une ordonnance du général de Gaulle datant du 21 avril 1944 - « les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes » - elles ne sont encore que 155 sur les 577 députés.
Pourtant, depuis une loi de 2000, les partis politiques sont pénalisés s’ils ne respectent pas la parité. « Ce ne sont même pas des amendes », regrette Céline Goeury. Il s’agit en effet d’une baisse de leurs subventions, à hauteur de la moitié de l’écart hommes-femmes parmi les candidats. Désormais, elle s’élève à 75% de cet écart, grâce à une loi du 31 janvier 2007.
« Le fait de ne pas débourser a un côté moins impactant »
Pas de quoi dissuader certains partis, pour qui la parité n’est visiblement pas une priorité. Pour les législatives de 2017, Les Républicains ont investi 39% de candidates féminines, contre 44,2% pour le Parti socialiste, 47,4% pour la France insoumise, 49% pour le Front national et 50% pour la République en marche. La droite a toujours fait figure de mauvais élève, et cela lui a parfois coûté cher. En 2002, l’addition s’élevait à 4 millions d’euros pour l’UMP. « Le fait de ne pas débourser un euro mais d’être ponctionné sur ses subventions a un côté moins impactant », remarque Céline Goeury. Du moins lorsque les partis politiques avaient encore les moyens de payer de telles pénalités...
Le durcissement des pénalités de 2007 a tout de même permis de féminiser l’Assemblée. Alors que les femmes ne représentaient que 18,5% des élus du Palais Bourbon en 2007, ce chiffre est porté à 26,9% en 2012 (155 députées). Une évolution notable, qui plus est si on remonte aux chiffres d’avant 2000 (33 députées en 1945, 42 en 1993).
« Si on arrive à 40% de femmes à l’Assemblée ce serait historique »
Dimanche prochain, ce pourcentage pourrait atteindre jusqu’à 65,5%. Un scénario qui ne devrait cependant pas se réaliser, puisque cela impliquerait que la totalité des femmes présentes au second tour remportent les élections. « Si on arrive à 40% de femmes à l’Assemblée ce serait historique », espère Louis Maurin, à la tête de l’Observatoire des inégalités. Dans l’hypothèse où les 248 députées arrivées en tête au premier tour des législatives remportent le second tour, l’Hémicycle sera composé à 42,5% de femmes. Quasiment le double d’en 2012.
Quoi qu’il en soit, le score du premier tour est « déjà historique ». Et inattendu : « Alors qu’on pensait atteindre l’égalité vers 2050, ce sera peut-être le cas en 2030 », estime le directeur de l’Observatoire des inégalités.
« Comme REM est un nouveau parti, l’intégration se fait plus naturellement »
Le parti d’Emmanuel Macron n’y est pas pour rien. Sur les 248 députées en tête au premier tour, 187 sont « en marche ». « Comme REM est un nouveau parti, l’intégration se fait plus naturellement », analyse Céline Goeury. Outre la promesse – tenue – de respecter strictement la parité lors des investitures pour les législatives, il semblerait que l’exécutif aimerait voir une femme au « perchoir ». Une information révélée par le Canard enchaîné.
Parmi les noms qui circulent : l’écologiste investie par REM Barbara Pompili, arrivée en tête dans la 2e circonscription de la Somme, la députée sortante Brigitte Bourguignon, ancienne socialiste désormais « en marche » et candidate à sa succession, ou encore la députée LR Laure de la Raudière, en ballottage défavorable dans la 3e circonscription de l’Eure-et-Loir. S’il admet que ce serait symboliquement positif, Louis Maurin rappelle que « l’important c’est que ce soit la personne jugée la plus compétente » qui soit élue à la tête de l’Assemblée nationale. Il sera toutefois intéressant de voir si des femmes seront nommées à la tête des groupes parlementaires « régaliens », car excepté aux Armées, ce ne fut pas le cas dans le gouvernement Philippe.