La porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a assuré ce mercredi à la sortie du Conseil des ministres qu’Emmanuel Macron a acté qu’il n’y avait pour le moment pas « de socle plus large que celui qui est en place aujourd’hui » pour gouverner. Mais, après les consultations des responsables de partis mardi, « le président continue à écouter et à tendre la main ».
Législatives : « Il n’est pas question de se mettre sous la coupe de Jean-Luc Mélenchon », prévient le sénateur PS David Assouline
Par Héléna Berkaoui
Publié le
Et cinq ans de plus. Au lendemain de la réélection d’Emmanuel Macron, la gauche est fixée. Elle sait à qui elle fera face durant les cinq prochaines années. Mais le troisième homme de la présidentielle n’a pas attendu ce résultat pour préparer l’après.
Fort de ces 21,95 % au premier tour, Jean-Luc Mélenchon a appelé les Français à le faire « élire » Premier ministre en se mobilisant massivement pour les législatives. Imposer une cohabitation politique à Emmanuel Macron nécessiterait une vague rouge aux législatives qui se tiendront les 12 et 19 juin prochains. Et pour ce faire, la France insoumise a besoin de nouer des alliances avec les autres partis de gauche. Des négociations sont déjà en cours avec le PCF, les Verts et les communistes.
Union de la gauche : une ambition toujours contrariée
Ce matin sur l’antenne de France inter, le directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon ouvrait les bras à un PS un temps honni. « Je n’ai pas dit non au Parti socialiste, à partir du moment où il clarifie ses intentions d’un point de vue programmatique. La balle est dans leur camp », assure Manuel Bompard. Selon les informations de BFMTV, une rencontre officielle est prévue mercredi. Une ouverture inimaginable il y a encore peu de temps.
Chez les socialistes, les sentiments divergent face à cette possible alliance. Au PS, une résolution a été votée pour ouvrir la voie à des discussions avec la France insoumise. 160 socialistes se sont prononcés pour, 75 contre et 10 se sont abstenus. Parmi les opposants, on retrouve Anne Hidalgo, Carole Delga et François Hollande.
Mais une voix forte du Parti socialiste s’est prononcée en faveur de cette alliance aujourd’hui : Lionel Jospin. Dans les colonnes du Parisien, l’ancien Premier ministre socialiste reconnaît la LFI comme « la force dominante à gauche » et appelle à « participer à un accord électoral de toute la gauche aux élections législatives, à condition qu’on ne cherche pas à l’écraser ».
« Le jupitérisme de Macron ou de Mélenchon, ce n’est pas une bonne chose »
Sénateur du Val-d’Oise, Rachid Temal n’affiche pas vraiment un enthousiasme béat. « Mélenchon dit que le PS doit montrer patte blanche, mais on n’a pas à faire pénitence », s’agace-t-il. La position de la LFI est claire, une alliance avec le PS ne sera possible que si le parti à la rose s’aligne sur les grandes lignes de son programme.
« Il y a des points qui sont des incontournables : la retraite à 60 ans, le blocage des prix, la VIe République, la planification écologique pour donner ces exemples-là et il y a d’autres points sur lesquels on peut discuter », comme le nucléaire, a précisé Manuel Bompard
Lire aussi. Après la défaite à la présidentielle, « l’union est un combat » à gauche pour les législatives
Le premier secrétaire du PS a déjà fait part de ses réserves sur la position des Insoumis sur la retraite à 60 ans, la jugeant trop coûteuse. D’autres fractures sont listées par Rachid Temal : « La conception de la démocratie, l’Europe… » Sur la méthode, le socialiste tance l’autoritarisme de l’Insoumis : « Le jupitérisme de Macron ou de Mélenchon, ce n’est pas une bonne chose ».
Jean-Luc Mélenchon a lancé son mouvement en claquant du porte PS, en 2008. Son mouvement s’est construit en miroir de cette gauche de gouvernement. Aujourd’hui, la France insoumise et le parti socialiste semblent représenter les deux bouts d’une gauche tiraillée entre un camp réformiste et un camp révolutionnaire. Deux gauches présumées irréconciliables.
« Il n’est pas question de se mettre sous la coupe de Jean-Luc Mélenchon »
Sénateur de Paris, David Assouline, proche d’Anne Hidalgo, reste méfiant. « Il faut l’unité à gauche, mais la discussion doit être ouverte. Il n’est pas question de se mettre sous la coupe de Jean-Luc Mélenchon », prévient-il.
S’il ne ferme pas la porte à des discussions, David Assouline prévient : « On fait de la politique, on ne vend pas des brosses à dents. On ne va pas se plier à toutes les conditions de la FI où se soumettre au leadership de Mélenchon ». Le sénateur de Paris veut croire qu’un espace est toujours présent pour la gauche entre Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon.
Le Parti socialiste et d’autres à gauche partagent encore un certain nombre de divergences avec les Insoumis. « Il y a une ligne de démarcation sur la guerre en Ukraine comme il y en avait une pour la Syrie », pointe notamment David Assouline. Un responsable socialiste évoque également la conception de la laïcité de Jean-Luc Mélenchon.
« Ne pas laisser les électeurs de gauche face à la droite et l’extrême-droite »
Rien qui ne puisse être dépassé pour le président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel. « Si nos concitoyens veulent une alternative au projet d’Emmanuel Macron, ils ne peuvent le faire qu’avec une union de la gauche, insiste le socialiste. Je ne veux pas laisser les électeurs de gauche face à la droite et à l’extrême-droite. »
Lui ne voit pas d’autres alternatives à cette alliance. « On ne peut pas tous rester arc-bouté sur nos positions. Il faut chercher le rassemblement, sans hégémonie, sans diatribe », appelle Stéphane Troussel. Pour lui, cette alliance doit se construire, « il y aura des discussions sur l’aspect programmatique ». Ces alliances se feront aussi en fonction des enjeux territoriaux : « Je suis lucide, pragmatique, les alliances ne se feront pas partout ».
L’union de la gauche a encore du chemin à faire avant les législatives. L’issue de ces négociations devraient être connues rapidement puisque le temps presse et que la campagne des législatives doit rapidement être lancée.