C’est un pas de plus vers un vers accord entre La France Insoumise et le Parti socialiste pour les législatives. Dans un document de quatre pages (voir ci-dessous), le PS liste les points de convergences avec les Insoumis. « Un premier socle de propositions », qu’attendait LFI après une rencontre positive, mercredi.
« Il n’y a pas d’accord », « on poursuit la discussion »
Contrairement à ce qui a pu être dit par la presse dans un premier temps, « il n’y a pas d’accord. Il y a eu une interprétation trop rapide », précise à publicsenat.fr Laurent Baumel, responsable des relations extérieures du parti et membre des négociateurs (à gauche, sur la photo). « C’est un texte d’intention où on fait figurer notre vision de ce que pourrait être le contenu d’un accord. C’est une démarche du PS, ce n’est pas un texte cosigné. Il ne faut pas aller plus vite que la musique », ajoute le député d’Indre-et-Loire, « on poursuit la discussion ».
« Notre devoir est aussi d’entendre le message que nous ont adressé les électrices et électeurs de la gauche et de l’écologie lors du premier tour de l’élection présidentielle », écrit la direction du PS dans ce texte, « il nous appartient désormais de faire naître une nouvelle espérance en construisant, à l’occasion des élections législatives, un large rassemblement de la gauche et de l’écologie, populaire et citoyen, autour d’un pacte pour la justice sociale et écologique », qui s’appuie sur « un programme partagé ».
Les principaux points du texte
« L’union Populaire a mis douze marqueurs en discussion », explique le communiqué. Le PS y répond en apportant aussi les propositions qu’il souhaite « inclure ». Parmi les nombreux points mis sur la table, on trouve « le SMIC à 1.400 euros », « le blocage des prix des produits de première nécessité et la création d’une garantie d’autonomie pour la jeunesse », l’idée d’« instaurer la retraite à 60 ans », volonté de LFI, mais « avec une première étape comprenant la prise en compte des carrières longues et des métiers pénibles », l’abrogation de la loi El Khomri votée sous Hollande et des ordonnances Macron, « encourager la vaccination », « renformer les moyens humains à l’hôpital public » et augmenter le nombre de lits, le renforcement des services publics « à travers le refus des privatisations et de l’ouverture à la concurrence ».
Figure également une « politique de justice écologique qui fait de l’écologie un levier de justice sociale », « l’agroécologie » comme « modèle de référence », le « basculement vers une VIème République » et le référendum d’initiative citoyenne, l’abrogation des lois sur le séparatisme et sécurité globale, 150.000 logements sociaux par an, le renforcement de la lutte pour l’égalité femmes-hommes, la fin de vie, la suppression de la réforme du bac et de parcours sup, un plan pour l’enseignement supérieur et la recherche, ou encore la défense de « la République laïque et universaliste, par la défense de la liberté de conscience et d’expression ». Bref, tout un programme. Et promis, il ne s’agit pas, pour l’essentiel, de s’aligner sur LFI. « Les points dans ce texte étaient déjà dans le projet socialiste en réalité, après ils n’étaient pas visibles », soutient Laurent Baumel.
La question sensible de l’Europe
Reste la question sensible de l’Europe. Les socialistes rappellent qu’ils « sont profondément attachés à la construction européenne ». Alors que LFI parle de « désobéissance » aux traités, le PS ne reprend pas le terme. Mais « la mise en œuvre du programme que nous construisons conduira nécessairement à des tensions, à constater des contradictions, et à ne pas respecter certaines règles. Nous ne serons ni les premiers ni les derniers à le faire, en France comme en Europe », soutient le communiqué.
« Nous refuserons de mettre en danger la construction européenne ou de laisser s’installer une fracture entre la France et l’UE. Mais nous avons désormais besoin d’une rupture dans le cours libéral de la construction européenne », précise encore le PS. « Nous nous opposerons par exemple au retour du pacte de stabilité, considérons que l’objectif de souveraineté de la France et de l’Union Européenne dans de nombreux domaines rend nécessaire de déroger aux règles actuelles de concurrence et que la conférence sur l’avenir de l’UE doit conduire à une révision des traités ».
« On va discuter de tout maintenant, du fond, de la stratégie, des circonscriptions »
Les deux parties se revoient aujourd’hui. « On va engager la conversation sur les points qui restent difficiles, l’Europe ce n’est pas un sujet à évacuer. Tout ça reste à discuter », explique Laurent Baumel, qui précise que « nous, on n’est pas d’accord pour utiliser le terme de désobéissance, qui ne paraît pas rendre compte du bon rapport à la construction européenne. Le concept de désobéissance peut générer des malentendus ». Reste que le texte dit que la France doit pouvoir ne « pas respecter certaines règles ». « Peut-être que la formulation est un peu nouvelle, mais en tout état de cause, la France, déjà, ne respecte pas toutes les règles, comme sur le Pacte de stabilité », rétorque le responsable des relations extérieures.
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L’accord n’est donc pas encore conclu et il reste de nombreux points à voir, à commencer par l’épineuse question des candidatures, qui sera abordée ce vendredi. « On va discuter de tout maintenant, du fond, de la stratégie, des circonscriptions, tout ça va être abordé peu à peu », explique Laurent Baumel.
La règle de calcul qu’a fixé Jean-Luc Mélenchon, à savoir une répartition selon le score de chacun à la présidentielle, ne laisserait que très peu de place au PS. Une trentaine de candidats sur 577 circonscriptions, alors qu’il faut faire 1 % des voix dans au moins 50 circonscriptions pour permettre un financement de l’Etat. Pour le PS, ce ne serait pas acceptable. « Ça ne peut pas être la base d’un accord possible. Si on veut un accord, ça ne peut pas être ça », prévient un dirigeant socialiste, qui serait néanmoins « étonné que ce soit la proposition ». Il faudra aussi voir la teneur et le périmètre des discussions : faut-il un accord global sur 577 circonscriptions ? Ou des candidatures communes dans le cadre d’un accord partiel ? Il reste peu de temps pour trouver la voie d’un accord. S’il peut être scellé, ce sera « dans les jours qui viennent ».