« Par continuité et cohérence, ayant porté la campagne présidentielle, je porterai donc aussi la campagne législative (…) Marseille est un choix politique. C'est un petit concentré de la France (…) Nous ne demandons de passeport à personne. À Marseille, nous sommes tous des parachutés. Ici, comme partout ailleurs, je suis dans mon pays ». À l’occasion d’une conférence de presse dans la cité phocéenne, Jean-Luc Mélenchon, candidat malheureux à l’élection présidentielle, a officialisé sa candidature à l’élection législative dans la 4e circonscription des Bouches-du-Rhône.
« Une bataille entre deux grandes gueules »
« Une chose est sûre. C’est que ça va être une bataille entre deux grandes gueules. Mais il faut prévenir Jean-Luc Mélenchon que dans les Bouches-du-Rhône, on n’aime pas trop les parachutages ». Sénateur RDSE du département, Michel Amiel, soutien d’Emmanuel Macron, résume assez bien ce qui attend le leader de la France Insoumise en se présentant dans la circonscription du député sortant socialiste, Patrick Mennucci.
Fort d’un excellent score au premier tour de l’élection présidentielle à Marseille, où il arrive en tête avec 24,82% des suffrages, Jean-Luc Mélenchon a donc décidé de contourner l’obstacle contre lequel il s’était heurté aux législatives de 2012 en échouant à Hénin-Beaumont, dans la circonscription de Marine Le Pen. Ni l’un ni l’autre n’avait d’ailleurs été élu. En choisissant la 4e circonscription, située dans le centre-ville, Jean-Luc Mélenchon a donc, a priori, opté pour la sécurité dans ce secteur où il réalise l’un de ses meilleurs scores avec 39% des voix.
« Je ne veux pas affaiblir le PS, je veux le remplacer »
Mais voilà, le « plébiscite » attendu pourrait se transformer en une bataille plus rude. Depuis l’annonce de ce « parachutage », Patrick Mennucci ne cesse de se répandre en invectives à l’encontre du chantre de la VIe République, qui selon lui, « agit comme une personnalité de la IVe ». Le député sortant considère que le chef de file de la France Insoumise a choisi « la seule circonscription de l’arc méditerranéen où le Front national n’a aucune chance d’être au second tour (14,3 au premier tour de la présidentielle), et où la droite ne peut l’emporter (10,8%) ». « Jean-Luc Mélenchon a choisi de venir affronter un député socialiste qui a fait son travail. (...) Il veut affronter la gauche, il veut affronter la gauche de gouvernement, la gauche responsable » ajoute M. Mennucci. Il promet à Jean-Luc Mélenchon un « affrontement complet ». Le député européen lui a répondu sur le ton de l’humour. « Je ne viens pas ici contrarier M.Mennucci que je connais bien et à qui j’offrirai une bouillabaisse s’il le veut bien ».Plus sérieusement, il s’est fait également très clair sur ses intensions en se présentant à Marseille. « Je ne veux pas affaiblir le PS, je veux le remplacer (…) » (…) « Je ne viens pas pour telle ou telle personnalité, je viens pour une raison de politique nationale » (...) Une cohabitation est en gestation en France, soit avec les Républicains, soit avec nous » a-t-il assuré.
« Une visite de courtoisie »
Le chef de file de la France Insoumise s’est rendu à Marseille, jeudi, pour ce qu’il nomme « une visite de courtoisie ». Dans le but, une nouvelle fois, de contrer les accusations de parachutage, il a rappelé que « la première fois qu’il a posé le pied sur la terre de France, c’était à Marseille. Donc retour aux sources » a laconiquement évoqué celui qui est né à Tanger. Au programme de sa visite, une rencontre le sénateur-maire LR Jean-Claude Gaudin. « J'arrive, donc je me présente, je suis allé voir le préfet et maintenant, je vais voir le maire », a justifié M. Mélenchon assurant « ne pas être là » pour chercher des encouragements du premier édile de la cité phocéenne. Sur Facebook, Patrick Mennucci raille « un acte d’allégeance ». « La réalité, c'est que Jean-Luc Mélenchon vient aujourd'hui se chercher des alliés, de la bienveillance pour sa campagne législative. Il concrétise les discussions d’arrière-salle qui ont précédé son parachutage ».
Comme le rapporte le journal Le Monde, la décision de Jean-Luc Mélenchon n’aurait pas fait que des heureux au sein de La France insoumise. À l’origine c’est Gérald Souchet, professeur de sciences économiques et un des animateurs de Nuit Debout Marseille qui devait être investi par le mouvement. « J’ai dit à Jean-Luc Mélenchon qu’une candidature dans cette circonscription serait une très mauvaise idée, expliquait-il mercredi. Il faut prendre en compte la réalité marseillaise. Le FN n’est pas fort ici et symboliquement ; [M. Mélenchon] n’a rien à gagner à battre un socialiste. Je pensais qu’il se présenterait dans la 3ecirconscription où il y a un vrai défi avec le FN. Mais son équipe est traumatisée par l’échec de 2012 à Hénin-Beaumont » expliquait-il, mercredi, au quotidien.
Contacté par publicsenat.fr ce jeudi, Gérald Souchet semble avoir changé de version. « Je trouve important que Jean-Luc Mélenchon conserve sa stature nationale en se présentant dans la deuxième ville de France. Je vais participer à son équipe de campagne. Il est important d’insister sur le fait que le mouvement garde son horizontalité avec l’investiture de candidats citoyens ». Et quant aux protestations de Patrick Mennucci, M. Souchet ironise en considérant que le député sortant « a beaucoup de chance que Jean-Luc Mélenchon vienne dans sa circonscription. Ça va lui permettre de retrouver une investiture nationale ». Lors de la conférence de presse, Gérald Souchet a poussé l’exercice de rassemblement en entourant de ses bras le leader de la France insoumise.
La gauche de la gauche se présente pourtant en ordre dispersé aux élections législatives en témoigne l'échec d’un accord avec le Parti communiste au niveau national, ce qu’a regretté « profondément », ce matin, Pierre Laurent son secrétaire national. Contacté par publicsenat.fr, un élu communiste de Marseille se refuse à tout commentaire sur « ce bazar actuel ».