Les 1.001 vies du milliardaire Mohed Altrad, du désert syrien aux municipales à Montpellier

Les 1.001 vies du milliardaire Mohed Altrad, du désert syrien aux municipales à Montpellier

"Enfant du désert" syrien, le milliardaire français Mohed Altrad s'est forgé un destin hors du commun. Patron d'un groupe international,...
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Par Isabelle LIGNER

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"Enfant du désert" syrien, le milliardaire français Mohed Altrad s'est forgé un destin hors du commun. Patron d'un groupe international, romancier, homme clef du rugby français, il veut désormais conquérir la mairie de Montpellier, la ville qui l'a "accueilli".

"Je suis resté un enfant du désert qui a bravé de nombreuses difficultés", raconte Mohed Altrad d'une voix feutrée.

Premier Français sacré Entrepreneur mondial de l'année en 2015, 31e fortune de France en 2019, selon Challenges, avec un patrimoine estimé à 3,4 milliards d'euros, M. Altrad a raconté dans un de ses romans les circonstances de sa naissance, à une date non déterminée entre 1948 et 1951.

Fruit du viol par un chef de tribu d'une adolescente bédouine qui mourra de chagrin, l'orphelin mise sur l'instruction. Bon élève, il finit par décrocher une bourse du gouvernement syrien pour étudier à Montpellier, ville de sa "seconde naissance", où il arrive en 1970, sans parler le français et sans le sou.

"Imbibé de culture orientale", Mohed Altrad dit se sentir depuis des décennies "pleinement français". Depuis 1972, il n'est jamais retourné dans son pays d'origine, où il ne pourrait "plus trouver aucune trace" de ce qu'il a connu, dit-il à propos du conflit qui déchire la Syrie.

"J'ai tout fait ici à Montpellier: l'apprentissage de la langue, les études (de sciences, suivi d'un doctorat en informatique à Paris), mon groupe, le club de rugby...", résume-t-il.

- "Dureté" -

Le milliardaire français Mohed Altrad, candidat aux municipales à Montpellier, pose le 20 janvier 2020 à Montpellier
Le milliardaire français Mohed Altrad, candidat aux municipales à Montpellier, pose le 20 janvier 2020 à Montpellier
AFP/Archives

En 1985, Mohed Altrad reprend une modeste entreprise héraultaise d'échafaudage qu'il transforme en empire international, via de multiples acquisitions et une réorientation vers les services industriels. Employant 42.000 personnes dont environ 10.000 en France, le groupe Altrad, basé à Montpellier, reste peu connu en France, mais est très actif dans le domaine du pétrole et du gaz, et présent en Grande-Bretagne, au Moyen-Orient, en Afrique et en Asie.

Parallèlement, en 2011, ce joueur de tennis qui ne s'était jamais intéressé au ballon ovale reprend le Montpellier Hérault Rugby (MHR), au bord de la faillite. Il redresse le club mais se fait de nombreux ennemis, notamment parmi les présidents du Top 14, "un petit monde très conservateur", dont il fustige le modèle économique "pas viable".

Mohed Altrad, qui se présente comme un "humaniste", auteur de romans, d'essais et d'ouvrages de management, est décrit par ses soutiens comme un "homme de vision et de solutions". Mais ses adversaires soulignent son "ambition démesurée" et sa "dureté quand on s'oppose à sa volonté".

A propos de collaborateurs dont il s'est séparé parfois abruptement, comme l'entraîneur Fabien Galthié, aujourd'hui sélectionneur du XV de France, il tranche: "Quelqu'un qui ne fait pas son travail malgré tout ce qu'on lui prodigue comme conseils, on le +sort+ bien sûr, car c'est la réussite collective qui est en jeu".

En 2017, Altrad est le premier sponsor à inscrire son nom sur le maillot du XV de France. Mais ses liens controversés avec le président de la Fédération française de rugby (FFR) Bernard Laporte ont conduit le parquet national financier (PNF) à ouvrir une enquête, toujours en cours.

- Ambition sociale -

Marié et père de cinq enfants, le milliardaire reçoit au "Cottage", sa belle demeure montpelliéraine nichée dans un parc. "Je ne suis pas attiré par l'argent, ce sont les grandes réalisations qui m'intéressent", commente le septuagénaire à la barbe soignée et à la chevelure poivre et sel.

Ses détracteurs lui promettent une défaite cuisante depuis qu'il s'est lancé en septembre à la tête d'une équipe éclectique dans la bataille des municipales.

"Je ne suis ni de gauche parce que je suis né pauvre, ni de droite parce que je suis devenu riche", affirme ce candidat atypique qui n'a pas obtenu le soutien de La République en marche, un temps espéré.

Après avoir accepté "sans être dupe" sous François Hollande une mission "sans budget" en faveur de 1.500 quartiers défavorisés, le chef d'entreprise assure aujourd'hui vouloir mener à Montpellier "une politique sociale très ambitieuse" et parvenir au "plein emploi" en faisant jouer son carnet d'adresses international.

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