Les cartes du second tour traduisent les fractures territoriales françaises
Quels enseignements tirer de la géographie électorale issue des urnes dimanche ?

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Quels enseignements tirer de la géographie électorale issue des urnes dimanche ?
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Malgré une nette victoire à l’échelle nationale (66,10%), le score d’Emmanuel Macron cache, comme au premier tour de très fortes disparités territoriales.

Emmanuel Macron remporte la totalité des départements, à l’exception de l’Aisne et du Pas-de-Calais. Il réalise ses meilleurs scores dans les régions de l’ouest – (particulièrement le long du littoral Atlantique) Bretagne, Nouvelle-Aquitaine – mais également en Occitanie, Auvergne-Rhône-Alpes, et surtout en Île-de-France.

Raz-de-marée Macron dans les grandes agglomérations

 

À l’image de l’agglomération parisienne (le vote Macron frôle les 90% à Paris), les grands centres urbains ont quasiment tous penché très largement en faveur d’Emmanuel Macron. Dans sept des 20 communes les plus peuplées de France, son score dépasse même les 80% des suffrages exprimés : Paris, Lyon, Toulouse, Nantes, Bordeaux, Strasbourg, Rennes et Angers. Ses scores réalisés à Marseille (64,42%), où Jean-Luc Mélenchon était arrivé en tête au premier tour (24,82%), et à Nice (60,14%), ville majoritairement à droite, sont inférieurs à sa moyenne nationale.

À l’inverse, son adversaire Marine Le Pen réalise ses meilleurs scores dans un arc allant de la Somme à la Haute-Saône. On observe dans les territoires ruraux des Hauts-de-France et de la région Grand-Est une surperformance du Front national par rapport à sa moyenne nationale. Ce sont dans ces territoires que se situent la majorité des communes qui l’ont placé en tête à plus de 60% des suffrages.

Les départements de l’arc méditerranéen et de la Corse lui offrent également certains de ses pourcentages les plus élevés.

La France d’Emmanuel Macron, un « négatif » de la carte historique du vote Front national

« On est sur une confirmation des tendances qui avaient déjà émergé au premier tour, à savoir une coupure, une fracture de la France avec un clivage Est-Ouest assez marqué et un second clivage, qui est celui entre les grandes métropoles et les villes moyennes, contre les zones périurbaines et les campagnes », note Jérôme Fourquet, qui dirige le département «Opinion & stratégies d'entreprise» de l'Ifop

Le vote Marine Le Pen a culminé dans les petites communes. La candidate arrive en tête dans près de 9.200 communes.

Pour cet observateur qui surveille avec attention les évolutions de la carte électorale, la carte qui est sortie des urnes dimanche soir est « la carte du vote Front national historique » et celle de son « négatif absolu, qui est le vote Macron ».

« On avait de très longue date un clivage gauche-droite en France, il s’est vu concurrencer depuis le début des années 90 par un nouveau clivage : celui des gagnants et des perdants de la mondialisation. Comme les candidats de la gauche et de la droite ont été éliminés au premier tour, c’est de nouveau clivage, qui est devenu dominant et qui a pesé de tout son poids sur les élections d’hier soir », selon Jérôme Fourquet.

Marine Le Pen en tête dans deux départements des Hauts-de-France

Au premier tour, Marine Le Pen était arrivée en tête dans 48 départements. Au second, elle n’emporte la majorité absolue que dans l’Aisne (52,91%) et le Pas-de-Calais (52,05%), avec une courte avance. Calais (76.000 habitants) est d’ailleurs la plus grande commune où elle dépasse Emmanuel Macron.

Elle a manqué d’emporter les Ardennes  (49,27%), la Haute-Marne (49,52%), la Corse-du-Sud (49,41%) ou encore le Var (49,15%). Toulon (44,04%) est l’une des grandes villes qui lui échappe de peu.

Pour Jérôme Fourquet, la région Paca échappe au schéma du clivage « gagnants » / « perdants » de la mondialisation. « La deuxième ligne de fractures autour duquel le vote FN s’est structuré depuis 30 ans, c’est la question de l’immigration, avec des territoires où la question de l’immigration est très sensible et où le vote FN s’en nourrit », explique-t-il.

De 2012 à 2017, les progressions des suffrages en faveur du Front national sont davantage marquées dans les territoires du nord de la France  plutôt que dans les régions méditerranéennes, comme le relève le cartographe Frédéric Salmon, spécialiste de géographie électorale.

Un bémol toutefois pour le Front national, Marine Le Pen s’est retrouvée en minorité dans six des onze municipalités détenues par son parti depuis 2014 : dans le 7e secteur de Marseille, à Hayange (Moselle), au Pontet (Vaucluse), à Mantes-la-Ville (Yvelines), à Villers-Cotterêts (Aisne), et surtout à Béziers (Hérault), ville dirigée par Robert Ménard.

Percée dans les Outre-mer

Autre enseignement de la présidentielle : la situation des Outre-mer. Traditionnellement ancrés à gauche, les départements et territoires ultramarins ont été marqués durant ce scrutin par une forte progression du vote Front national. Marine Le Pen a obtenu 35,1% des voix en Guyane et 43% à Mayotte. Des résultats historiques qui traduisent sa campagne sur de l’immigration clandestine ou de l’insécurité. En Nouvelle-Calédonie, les craintes liées à l’approche du référendum d’autodétermination de 2018 se sont également ajoutées à l’équation. À La Réunion, marqué par un fort taux de chômage, Marine Le Pen a réalisé près de 40% des suffrages.

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