Les collectivités face à la transition écologique : le Sénat lance une mission d’information sur les initiatives locales

Les collectivités face à la transition écologique : le Sénat lance une mission d’information sur les initiatives locales

La délégation sénatoriale aux collectivités territoriales entend passer en revue les politiques en faveur de la transition écologique déployées à l’échelon local, par les petites communes, les intercommunalités, les départements ou encore les régions. L’objectif : mettre en place « un recueil des bonnes pratiques » qui puisse inspirer l’ensemble des élus locaux
Romain David

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Les petits ruisseaux font les grands fleuves. Si les élus locaux sont en première ligne pour s’approprier les objectifs en matière d’écologie mis en place par l’Etat et les adapter aux spécificités de leur territoire, l’urgence climatique et la nécessité d’une transformation rapide de nos modes de production et de consommation leur intiment aussi de faire preuve d’innovation, parfois d’audace, pour déployer des politiques locales vertueuses, susceptibles de renforcer notre résilience face au changement climatique. Autant d’impératifs qui ont poussé la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation à lancer une mission d’information sur la transition environnementale dans les territoires.

« L’idée est vraiment de voir comment la nécessité écologique infuse et se diffuse à travers tous les champs d’activité des collectivités, et de montrer que les territoires n’ont pas attendu de recevoir des ordres venus d’en haut pour se mettre en route sur le chemin de la transition énergétique et écologique. Certains sont même déjà très à la pointe sur le sujet », explique à Public Sénat la sénatrice (Union centriste) d’Ille-et-Vilaine Françoise Gatel, qui préside la délégation. Il ne s’agit pas pour les sénateurs d’analyser la manière dont les collectivités se plient aux objectifs fixés par l’Etat, par exemple autour du « zéro artificialisation nette » ou sur les « zones à faibles émissions », mais plutôt de passer en revue certaines initiatives locales autour de la rénovation énergétique des bâtiments, de l’éclairage public, de la gestion des espaces verts, de l’alimentation dans les cantines, ou, par exemple, sur la mutualisation des achats.

« Je répète depuis vingt ans qu’il faut aller du local au global »

« Nous considérons que la transition écologique se fera en grande partie par les collectivités, de par les compétences qui sont les leurs mais aussi à travers le domaine foncier sur lequel elles ont la main », ajoute Françoise Gatel. « Je ne connais pas un seul élu qui ne se sent pas concerné par ce sujet. Comme le dit le président du Sénat Gérard Larcher, parce qu’ils sont à portée d’engueulade et parce qu’ils connaissent l’appétence grandissante de leurs concitoyens pour les thématiques écologiques, même les plus réticents ont dû s’y mettre », relève-t-elle. « L’un des objectifs est d’identifier des solutions pérennes à l’échelle locale », abonde le sénateur Guy Benarroche (EELV), l’un des corapporteurs de la mission aux côtés des sénateurs Laurent Burgoa (LR) et Pascal Martin (UC). « J’y suis d’autant plus sensible qu’en tant qu’élu écolo je répète depuis vingt ans qu’il faut aller du local au global. »

Méthodologie inédite : la mission sénatoriale va s’appuyer sur un partenariat avec l’Institut National des Etudes Territoriales (INET), dont les étudiants ont réalisé de nombreux déplacements ces derniers mois à travers différents territoires, à la rencontre des élus et à la découverte des dispositifs déjà mis en œuvre. Les résultats de leurs travaux ont été présentés au Palais du Luxembourg en décembre. Ils orienteront en partie les auditions qui seront conduites par les sénateurs. Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique, déjà auditionné le 9 février par la délégation aux collectivités, pourrait de nouveau avoir à répondre aux interrogations des élus sur cette thématique plus particulièrement. Mais aussi des représentants d’associations d’élus, des chercheurs en pointe sur les questions de transition et d’adaptation et, bien sûr, des maires dont les initiatives auront potentiellement tapé dans l’œil des rapporteurs. Plusieurs déplacements sont envisagés, « notamment à Loos-en-Gohelle, dans le Pas-de-Calais », glisse Guy Benarroche. Les efforts de cette commune de 6 500 habitants en matière d’écologie lui ont valu d’être reconnue comme « démonstrateur de la conduite du changement vers une ville durable » par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe).

« Je vois des municipalités qui ont du mal à se saisir des outils qui existent »

La mission d’information souhaite également aborder l’épineuse question de l’évaluation des politiques déployées. Sur la base de quels critères, à partir de quels outils mesurer l’efficacité des dispositifs mis en place ici ou là ? « On peut dépenser des milliards d’euros et avoir des résultats décevants », explique Françoise Gatel. « Si nous ne sommes pas capables d’évaluer efficacement nos politiques écologiques, comment savoir si nous devons les dupliquer ou non ? », interroge Guy Benarroche. Une réflexion qui fait directement écho aux travaux entamés depuis plusieurs semaines par la commission d’enquête parlementaire mise en place à la demande des Verts, sur l’efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique.

Par ailleurs, les élus entendent aussi se pencher sur les questions de gouvernance et d’organisation. En clair : qui pilote quoi, et de quelle manière ? Plusieurs évolutions législatives ces dernières années, venues renforcer les compétences des collectivités en matière de politiques énergétiques, comme la loi NOTRe et, plus récemment, la loi sur l’accélération de la production d’énergies renouvelables, peuvent être sources de confusion sur le rôle des uns et des autres. « Dans la majorité des cas, notamment lorsqu’il s’agit de petites communes, je vois des municipalités qui ont du mal à se saisir des outils qui existent, ou des communes qui avancent sur des chemins parallèles, en marge des dispositifs prévus par l’Etat », rapporte Guy Benarroche. « Il sera intéressant de voir comment certains élus se sont mis en réseau, parfois de façon informelle, pour investiguer ce champ de la transition écologique », ajoute Françoise Gatel.

Diffuser les bonnes idées

Cette mission d’information n’a pas nécessairement l’ambition d’aboutir à une proposition de loi ; sur un sujet aussi varié – et face aux spécificités de chaque territoire -, dégager une méthodologie applicable à tout un chacun semble relever de la gageure. Mais les sénateurs espèrent être en mesure de proposer d’ici le mois de juin une « boîte à outils », susceptible de faire des émules. Françoise Gatel évoque ainsi « un recueil des bonnes pratiques et des idées intéressantes qui pourraient être des fusées ». Elle ajoute : « Il n’y a pas de manuel du parfait transiteur écologique, et nous avons autant de solutions qu’il y a de maires. Mais sortir les élus de leur solitude et les inviter à s’inspirer des pratiques existantes est toujours un enrichissement et un gain de temps. »

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