Phase I : l’invasion
- 24 février, le début de « l’opération militaire spéciale »
Après avoir signé un décret reconnaissant l’indépendance des deux républiques séparatistes du Donbass le 21 février, Vladimir Poutine annonce le 24 février à 5 heures du matin le lancement d’une « opération militaire spéciale » en Ukraine. Le chef du Kremlin justifie cette opération en invoquant un « génocide » orchestré par Kiev dans l’Est du pays. L’ancien officier du KGB promet une « dénazification » et une « démilitarisation » de l’Ukraine. Il s’est également directement adressé aux militaires ukrainiens, leur demandant de déposer les armes.
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Les colonnes de blindés russes entrent en Ukraine au cours d’une offensive militaire générale. Au sud, les unités s’élancent depuis la péninsule de Crimée annexée en 2014. Au Nord, les soldats russes conduisent des opérations depuis la Biélorussie. Moscou mène un important assaut aéroporté près de Kiev. Des dizaines d’hélicoptères russes sont aperçus à la base militaire de Hostomel à deux kilomètres de la capitale. Au soir de ce premier jour de guerre, la Russie s’empare du site de la centrale nucléaire de Tchernobyl. Face à cette agression militaire, Volodymyr Zelensky décrète la mobilisation militaire générale.
- 25 février, l’Union européenne adopte son deuxième paquet de sanctions,
En réaction à la guerre en Ukraine, l’Union européenne adopte des sanctions économiques limitant ainsi les activités commerciales entre les pays de l’Union et la Fédération de Russie, le conseil étend également sa liste noire des personnes faisant l’objet de sanctions. Ces mesures s’ajoutent au premier paquet de sanctions entériné par le Conseil de l’UE le 23 février et comprennent un gel des avoirs et des ressources économiques d’oligarques et des restrictions financières pour limiter l’accès de Moscou aux marchés des capitaux. Le 28 février, l’UE interdit aux avions russes l’accès à l’espace aérien européen. Les Etats membres décrètent l’interdiction d’exporter certains biens à la Russie.
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- 3 mars, la sécurité de la centrale nucléaire de Zaporijia compromise
L’armée russe s’est emparée du site de Zaporijia, au cours des combats un incendie a été provoqué par une frappe russe. L’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA) assure qu’il y a eu « aucun relâchement d’éléments radioactifs. » A la suite de ce bombardement, Volodymyr Zelensky accuse Moscou de recourir à la « terreur nucléaire. » Il a également qualifié la Russie « d’Etat terroriste. »
- 4 mars, face à la crise migratoire l’UE déclenche le mécanisme de « protection temporaire »
Pour la première fois de son histoire, l’Union européenne adopte le mécanisme de « protection temporaire. » Ce dispositif d’urgence offre à tous les Ukrainiens fuyant la guerre, présents dans un Etat membre de l’Union un titre de séjour d’un an, renouvelable deux années supplémentaires, ainsi qu’une autorisation de travail et un accès au système éducatif et de santé. Fin avril, la barre des cinq millions de réfugiés a été franchie selon l’ONU.
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- 16 mars, bombardement du théâtre de Marioupol
Encerclée depuis le 2 mars près d’une semaine après le début de la guerre, les forces Russes assiègent Marioupol. Cette ville portuaire est d’une importance stratégique, un pôle clé pour les exportations de charbon et de denrées agricoles côté ukrainien. Sa conquête permettrait aux Russes un contrôle terrestre continu entre la ville de Kherson, la péninsule de Crimée et les républiques séparatistes du Donbass.
Le 16 mars, les militaires russes bombardent le théâtre de la ville dans lequel des centaines de personnes avaient trouvé refuge. Le mot « enfants » était inscrit à la peinture blanche en lettres cyrilliques sur le parvis et sur une place située à l’arrière du bâtiment. D’après une enquête menée par les journalistes d’Associated Press (AP) diffusée le 2 mai 2022, 600 personnes auraient perdu la vie à la suite de cette attaque.
- 23 mars, Zelensky s’adresse au Sénat et à l’Assemblée nationale
Trois semaines après le déclenchement de « l’opération militaire spéciale », le président Volodymyr Zelensky poursuit son tour virtuel des principaux parlements occidentaux. Après l’Italie, le Royaume-Uni et les Etats-Unis, le dirigeant ukrainien s’est adressé aux députés et sénateurs français. Dans son discours, le président a demandé aux parlementaires et à la France de faire plus pour soutenir l’Ukraine, en leur rappelant les heures sombres de la grande guerre : « Après des semaines d’invasion russe, Marioupol et d’autres villes ukrainiennes frappées par l’occupant rappellent les ruines de Verdun. »
- 26 mars, Moscou change de stratégie et retire ses troupes du nord de l’Ukraine
Suite aux pourparlers avec l’Ukraine à Istanbul en Turquie, Moscou annonce réduire « radicalement » son activité militaire près de Kiev et dans le nord du pays. Un mois après le début de la guerre, les unités russes se retirent progressivement des territoires occupés. Moscou souhaite concentrer ses efforts dans le Donbass.
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- 3 avril, le monde découvre les massacres de Boutcha
Les troupes ukrainiennes découvrent après le retrait des soldats russes, des cadavres de civils dans les rues dévastées de Boutcha, une municipalité située à 30 kilomètres au nord-ouest de Kiev. Une fosse commune est également identifiée par les autorités locales. Mi-avril, le procureur régional ukrainien a indiqué que plus de 250 corps ont été retrouvés.
Dans un rapport diffusé le 21 avril, l’ONG Human Rights Watch dresse un bilan des exactions commises par les Russes : « ¨Presque chaque coin de Boutcha est maintenant une scène de crime, donnant l’impression que la mort rôdait partout », indique Richard Weir, chercheur pour l’organisation. En visite dans la ville le 4 avril, le président ukrainien accuse Moscou de mener « un génocide » contre son peuple.
- 14 avril, le croiseur Moskva sombre en mer Noire
C’est la première fois depuis la guerre des Malouines (1982) qu’un navire militaire est torpillé et coulé. Le « Moskva », le navire amiral de la flotte russe de la mer Noire est touché par des missiles ukrainiens « Neptune. » Le croiseur aurait coulé au cours de son remorquage vers un port russe. Moscou continue d’évoquer « un incendie suite à la détonation de munitions » pour expliquer l’avarie et se refuse à tout bilan sur les pertes humaines. Cette disparition du Moskva représente un coup dur sur le plan opérationnel et symbolique.
Phase II : embourbée, la Russie redéfinit ses objectifs et s’élance à la conquête de l’Est de l’Ukraine
- 19 avril, déclenchement de la bataille du Donbass
Après plusieurs semaines relativement calmes sur la ligne de front, Volodymyr Zelensky annonce qu’une nouvelle offensive russe débute à l’Est. « Nous pouvons affirmer que les troupes russes ont commencé la bataille pour le Donbass, pour laquelle elles se préparent depuis longtemps », souligne-t-il.
» Lire notre article. Offensive dans le Donbass : « les Russes vont se heurter à une armée ukrainienne très bien préparée », selon le général Trinquand
- 26 avril, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres se rend à Moscou
Sur le front diplomatique, l’ancien premier ministre portugais est à Moscou pour rencontrer le ministre des Affaires étrangères russe Sergueï Lavrov. Le secrétaire général a renouvelé ses appels à la paix et à la désescalade. « Ce qui nous intéresse beaucoup, c’est de trouver les moyens de créer les conditions pour un dialogue efficace, créer les conditions pour un cessez-le-feu dans les plus brefs délais », a-t-il martelé au cours d’une conférence de presse organisée à l’issue de cette rencontre bilatérale. Le secrétaire général s’est également entretenu avec Vladimir Poutine
Après sa visite moscovite, Antonio Guterres est à Kiev le 28 avril pour rencontrer Volodymyr Zelensky. Au cours de son séjour, la capitale ukrainienne a été la cible de frappes de missiles russes. Pour le président ukrainien, « cette attaque vise à humilier l’ONU. »
- 9 mai, Vladimir Poutine s’adresse aux Russes à l’occasion des commémorations du « Jour de la victoire »
Après des semaines de spéculations selon lesquelles, le président de la Fédération de Russie utiliserait les célébrations du 9 mai pour officialiser une déclaration de guerre contre Kiev ou proclamer une victoire russe à Marioupol, l’allocution de Vladimir Poutine s’est révélée « extrêmement classique et sans surprise majeure », selon Dominique Trinquand.
L’ancien officier du KGB a de nouveau justifié sa guerre d’agression auprès de son peuple. Face à cette « menace grandissante » (extension de l’Otan vers l’Europe de l’Est), l’invasion de l’Ukraine fin février par l’armée russe était « la seule et unique décision juste pour un pays souverain, fort et indépendant. La Russie était face à une menace inacceptable. »
- 17 mai, Marioupol, une victoire à la Pyrrhus
Au 86ème jour de guerre, les derniers soldats ukrainiens retranchés dans le complexe industriel d’Azovstal se sont rendus. Au total, plus de 1 700 militaires dont de nombreux combattants du régiment nationaliste Azov ont déposé les armes. Après trois mois de combats intenses, les Russes s’emparent d’une ville dévastée et en ruines.
- 19 mai, les Etats-Unis débloquent une aide militaire et humanitaire XXL pour Kiev de 40 milliards de dollars
Après la Chambre des représentants le 11 mai, le Sénat américain a adopté à une écrasante majorité le plan d’aide de 40 milliards de dollars (38 milliards d'euros), une aide considérable et historique. La loi votée par les parlementaires comprend une aide économique de 8,8 milliards dollars et une importante enveloppe destinée à former, armer et financer l’achat d’armes et d’équipements. Cette aide exceptionnelle renforce encore un peu plus le rôle et le soutien des Etats-Unis aux autorités ukrainiennes.
» Lire notre article. Livraisons d’armes : l’Ukraine réclame, l’Occident fournit
Secret de polichinelle dans les premières semaines de guerre entre Kiev et Moscou, les Occidentaux arment et financent les commandes d’armes de Kiev pour combler l’asymétrie des forces entre les deux belligérants. Au cours de la campagne présidentielle, Emmanuel Macron a dévoilé que la France avait livré à l’armée ukrainienne des canons CAESAR.
- 23 mai, Kiev juge son premier criminel de guerre russe
Inculpé pour crime de guerre, le sergent russe Vadim Chichimarine est suspecté d’avoir tué un civil-non armé de 62 ans, d’une rafale de Kalachnikov dans un village situé près de Soumy. Après trois mois de guerre, plus de huit mille enquêtes auraient été ouvertes par le bureau de la procureure générale d’Ukraine, Iryna Venediktova, sur de possibles crimes de guerre. Reconnu coupable, Vadim Chichimarine a été condamné à la prison à perpétuité. Son avocat a annoncé que son client comptait faire appel de cette décision.
- 29 mai, l’UE boycotte le pétrole russe
A l’issue d’une réunion extraordinaire du Conseil européen, les Etats membres ont adopté le sixième paquet de mesures à l’encontre de la fédération de Russie. L’UE a donc adopté un « quasi-embargo » sur les importations de pétrole. Pour convaincre les pays les plus réticents, notamment la Hongrie, les chefs d’Etat ont proposé plusieurs aménagements. Les importations par oléoduc ne sont pas directement concernées.
» Pour en savoir plus sur les contraintes liées à un embargo sur le pétrole russe : Embargo européen : comment se passer du pétrole russe ?
- 30 mai, le journaliste Frédéric Leclerc-Imhoff est tué
En reportage pour BFMTV dans la région de Louhansk, le journaliste français de 32 ans, Frédéric Leclerc-Imhoff est tué alors qu’il se trouvait à proximité d’un convoi humanitaire dans les rues de Sievierodonetsk. Dans un « thread » publié sur Twitter, Emmanuel Macron réitère le soutien de la France « à celles et ceux qui assurent sur les théâtres d’opérations la difficile mission d’informer. »
Le parquet national antiterroriste a annoncé l’ouverture d’une enquête pour crime de guerre. D’après un décompte effectué par Reporters sans frontières, ce décès porte à huit le nombre de journalistes tués depuis le début du conflit.
Au 100ème jour de guerre, la ville de Sievierodonetsk, dans l’oblast de Louhansk est la nouvelle cible de l’armée russe. La cité fait l’objet d’intenses combats et de bombardements. Face à la résistance ukrainienne, Moscou poursuit ses opérations militaires et tente un encerclement de la ville. Au cours d’une intervention au forum annuel Globosec, le président Volodymyr Zelensky a affirmé que « 20 % du territoire ukrainien était sous contrôle russe. »