Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand, Jacques Chirac, Raymond Barre ou encore Georges Marchais furent ses cibles favorites… Pour, son ami, Bernard Mabille, les chanteurs de l’époque étaient jugés trop lisses, laissant peu d’aspérité pour les imitateurs, une aubaine pour Thierry Le Luron, lui, qui prend également plaisir à se moquer de la classe politique.
Une voix unique et un ton à part
Ainsi lorsqu’il débute sa carrière dans les années 70, c’est avec le président auvergnat qu’il fait ses premières armes. Chaque décision, chaque posture du président Giscard est prétexte à caricature… De son discours de victoire, où il remporte de justesse la course à l’Elysée, aux célèbres causeries au coin du feu, dont il moque le caractère désuet aux côtés de son ami Pierre Desproges, l’humorique imite la voix mais aussi la gestuelle de ceux qu’il brocarde.
Pour son attaché de presse, Dominique Segall, « Thierry Le Luron apportait aux stars et aux politiques une communication supplémentaire, grâce à sa jeunesse il rajeunissait pas mal de monde » mais pouvait aussi s’attirer les foudres du personnel politique… Ainsi quand les socialistes arrivent au pouvoir Le Luron ne cache pas ses opinions et sa déception.
La rose, emblème socialiste de François Mitterrand… cible de Thierry Le Luron
Novembre 1984, lors de l’émission Champs-Elysées diffusée en direct sur Antenne 2, Thierry Le Luron fait un véritable « hold-up ». Sans prévenir Michel Drucker ni personne il entonne le désormais célèbre « L’emmerdant c’est la rose »… Sur l’air d’une chanson de Gilbert Bécaud, il chante et fait reprendre en chœur le public : « La rose nous pique au sang, la France est au goutte à goutte, à ce rythme évidement, c’est bientôt la banqueroute ».
Pour l’humoriste Stéphane Guillon « on sent dans cette séquence qu’il est en jouissance totale, qu’il sait ce qu’il est en train de faire, qu’il sait qu’il est en train de créer un merdier noir et on sent le plaisir dans son œil ».
En effet, complètent ses proches Bernard Mabille et Dominique Segall, « Le Luron était chiraquien et attendait l’élection de Chirac, comme on attend l’arrivée du Messie ».
Une élection à laquelle Thierry Le Luron n’assistera pas. A partir de 1985, il se lance dans un combat contre une grave maladie, dont on tait le nom à l’époque, le Sida… Déjà très malade, il reçoit alors un courrier de François Mitterrand lui promettant de venir le voir sur scène. Un rendez-vous qui n’aura pas lieu, l’artiste décède en novembre 1986 sans remonter sur les planches. Les politiques de droite comme de gauche lui rendent alors un hommage unanime.
Pour Stéphane Guillon, « Le Luron, c’était un bouffon avec une verve, une causticité et une impertinence immense », « l’inventeur de l’imitation moderne » complète Pierre Douglas, « il a influencé énormément de jeunes ».
Alors qu’aurait-il fait s’il avait assisté aux deux quinquennats d’Emmanuel Macron s’interroge pour conclure Michel Drucker ? « Aurait-il osé caricaturer Monsieur Macron et son épouse comme il l’a fait avec Giscard, Mitterrand et les autres ? Oui il oserait poursuit l’homme de télévision… mais pas sûr que cela passerait aussi facilement ».
Retrouvez le documentaire Le Luron en campagne de Jacques Pessis samedi 19 juillet à 21h puis en replay sur notre site internet ici.