Les Républicains relancent l’idée du chèque carburant, contre la hausse des taxes

Les Républicains relancent l’idée du chèque carburant, contre la hausse des taxes

Le vice-président des Républicains, Guillaume Peltier, et le député Damien Abad, proposent un équivalent du titre-restaurant à utiliser dans les stations-service. Ils ciblent la France rurale à l’écart des réseaux de transports en commun. Dubitatifs, les sénateurs reconnaissent qu’il faudrait tout simplement revenir sur la récente hausse des taxes frappant les carburants.
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Par Guillaume Jacquot (sujet vidéo : Fabien Recker)

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« C’est tout sauf une récupération : c’est une réponse politique face à un gouvernement qui reste sourd à la colère des Français », déclarait le député Guillaume Peltier, dimanche au Parisien. Le numéro 3 des Républicains, qui entend se greffer à la colère qui monte face à la hausse des carburants, a une solution. Avec son collègue Damien Abad, il lance un « appel des territoires » et propose de créer un chèque carburant, sur le même modèle des titres-restaurants délivrés par l’employeur, pour atténuer le renchérissement de la facture à la pompe. La proposition intervient quelques jours avant une journée de mobilisation d’automobilistes le 17 novembre.

Selon Guillaume Peltier, le montant s’élèverait à 100 euros net mensuels, soit le budget consacré chaque mois par les salariés pour se rendre sur leur lieu de travail, selon lui. Treize millions de Français, « qui n’ont pas accès aux transports en commun » seraient concernés par cette mesure. Pour les tickets-restaurants, qui font l’objet de la référence, l’employeur participe à hauteur de 50 à 60% de la valeur du chèque, et il est exonéré des cotisations sociales (dans la limite de 5,43 euros par titre).

Les sociétés d’autoroutes mises à contribution

Comment financer la mesure ? Comme au mois de mars, lorsqu’il cherchait une source de financement pour la rénovatii ion des routes secondaires en mauvais état, Guillaume Peltier a dans son viseur la manne des sociétés d’autoroute. D’après le rapport annuel de l’Arafer, l’autorité de régulation des transports, le secteur affiche en effet de bons résultats. En 2016, le résultat net du secteur avoisinait les trois milliards d’euros.

Proposition spontanée de deux parlementaires LR, l’idée n’est cependant pas défendue officiellement par le parti. « Nous allons voir les modalités, elles sont à définir mais nous soutenons évidemment cette proposition de chèque carburant », a expliqué Laurence Saillet, lors du point presse hebdomadaire. La porte-parole du parti a rappelé que Laurent Wauquiez soutenait cette « depuis 2011 ». Pour elle, l’arrêt de la hausse des taxes sur les carburants reste néanmoins une « priorité », que le gouvernement doit entendre.

Diesel : Laurence Saillet soutient l'idée d'un chèque-carburant
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« Un palliatif difficile à mettre en place », pour un sénateur LR

La proposition de chèque carburant, alimentée par une nouvelle taxe exceptionnelle, risque en tout cas de faire débat au sein des Républicains, traversé par de multiples sensibilités. « On ne peut pas demander à l’État de pallier ses propres turpitudes », réagit le sénateur du Val-d’Oise, Sébastien Meurant, dubitatif sur cette mesure. Il estime que ce « cautère sur une jambe de bois sera « difficile à mettre en place ». « Comment voulez-vous faire ce genre de chose ? C’est compliqué […] Je pense que l’on doit se battre contre l’augmentation des taxes. Le principal sujet, c’est ça », insiste-t-il.

Le sénateur s’interroge aussi sur le public visé par la mesure, et sur la définition de cette population éloignée des transports en commun. « En région parisienne ou dans les banlieues des grandes villes, les gens sont proches d’un réseau mais sont à 1h30 de bus de leur lieu de travail ».

« Il faut se calmer », ajoute un autre sénateur

Jean-Raymond Hugonet, sénateur LR de l’Essonne, rappelle ses collègues à la raison. « Je ne voudrais pas être critique avec les collègues » Chacun est dans la liberté de proposer des choses. Je le suis aussi en disant qu’il faut un petit peu, à un moment, se calmer. Les chiffres se totalisent en milliards. Qui paye in fine ? Il n’y a pas de jeu de bonneteau. »

Idée d'une chèque-carburant : « Il faut se calmer », réagit Hugonet (LR)
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Propos recueillis par Tâm Tran Huy

Élisabeth Lamure, vice-présidente de la commission des Affaires économiques au Sénat, voit surtout dans cette idée un aspect symbolique. « Je le prends surtout comme un appel du pied des parlementaires au gouvernement », explique-t-elle. « C’est un pis-aller. Il vaudrait mieux que le gouvernement, qui est allé trop vite et trop loin, revienne sur ces taxes », considère l’élue du Rhône qui conduit la délégation aux entreprises du Sénat.

Estimant qu’il faudrait « connaître un peu mieux la situation » des sociétés d’autoroute dans cette optique, la sénatrice juge que la proposition des deux députés comporte un petit défaut : celui de ne s’adresser qu’aux salariés, « alors que la question concerne tous les utilisateurs du diesel ».

Une proposition de loi déjà déposée durant l’été 2017

Ce n’est pas la première fois que les Républicains soumettent cette idée. Le 30 août 2017, à une date où le litre d’essence était 20% moins onéreux qu’aujourd’hui, Guillaume Peltier avait déjà déposé une proposition de loi « visant à augmenter le pouvoir d’achat », grâce à la création d’un « ticket essence ». Cosigné par 27 des collègues de son groupe, le texte avait été retiré et renvoyé à la commission des affaires sociales.

À l’époque déjà, la philosophie du texte était de faciliter la participation des entreprises aux frais de transport de leurs salariés qui n’utilisent pas un système de transport en commun, et qui ne bénéficient donc pas d’un remboursement de 50% sur un abonnement. La proposition de loi aurait exonéré d’impôt l’avantage versé aux salariés et les cotisations sociales sur la part employeur.

L’idée de Guillaume Peltier et de Damien Abad a été accueillie froidement par le gouvernement, comme le ministre de l’Économie Bruno Le Maire qui a dénoncé une mesure « démagogique ». « Subventionner la pollution ? On marche sur la tête », a ajouté le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux. Le député LREM de Paris, Pierre Person, a repris ces éléments de langage ce matin sur notre antenne.

Pourtant, au sommet de l’exécutif, l’idée d’une « aide » en lien avec les entreprises n’est pas exclue. Dans son interview ce lundi à plus titres de la presse quotidienne régionale, le chef de l’État, qui « assume » les hausses des taxes, a indiqué avoir demandé au gouvernement de « trouver des solutions pour qu'avec les employeurs, les salariés qui doivent utiliser au quotidien leur voiture puissent être aidés davantage ». La réponse pourrait être intégrée dans la future loi Mobilité.

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