Les Sages saisis de la « gravité » des déboires fiscaux de Thomas Thévenoud
Omettre de déclarer ses impôts, est-ce commettre un délit si "grave" qu'il nécessite un cumul de sanctions fiscales et pénales ?...

Les Sages saisis de la « gravité » des déboires fiscaux de Thomas Thévenoud

Omettre de déclarer ses impôts, est-ce commettre un délit si "grave" qu'il nécessite un cumul de sanctions fiscales et pénales ?...
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Par Juliette MONTESSE

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Omettre de déclarer ses impôts, est-ce commettre un délit si "grave" qu'il nécessite un cumul de sanctions fiscales et pénales ? Condamné pour fraude fiscale, l'ancien secrétaire d'Etat Thomas Thévenoud estime que non et a obtenu mercredi la saisine du Conseil constitutionnel.

La Cour de cassation a accepté de transmettre aux Sages une Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposée par Me Patrice Spinosi, son avocat, a indiqué ce dernier à l'AFP.

Ce recours vise deux articles du code général des impôts, qui autorisent le cumul de sanctions pénales et fiscales s'agissant de l'omission volontaire "de faire sa déclaration dans les délais prescrits".

Le Conseil constitutionnel a trois mois pour se prononcer.

Les motivations de la Cour de cassation, qui a examiné cette QPC mercredi matin, n'étaient pas disponibles dans l'immédiat.

Ephémère secrétaire d’État au Commerce extérieur, Thomas Thévenoud, déchu de son poste au gouvernement en 2014 en raison de sa désormais célèbre "phobie administrative", avait fait l'objet de deux types de sanctions, comme son épouse Sandra.

Pour ne pas avoir déclaré ses revenus en 2012 et avoir, de 2009 à 2013, rempli sa déclaration en retard malgré plusieurs relances et mises en demeure de l'administration fiscale, pour un montant total de 70.500 euros, le couple avait été condamné en janvier à un an de prison avec sursis et trois ans d'inéligibilité.

Ils avaient auparavant régularisé leur situation en 2014 et s'étaient acquittés de 20.000 euros de pénalités de retard.

Leurs avocats n'avaient eu de cesse de soulever que ce cumul de sanctions pénales et fiscales est anticonstitutionnel.

- Marque déposée -

"Ce que Thomas Thévenoud dit depuis le début de la procédure, c'est qu'on ne peut pas poursuivre quelqu'un deux fois" pour le même motif, a souligné Patrice Spinosi, qui défend l'ancien secrétaire d'Etat avec Martin Reynaud.

En juin 2016, le Conseil constitutionnel avait autorisé le cumul de poursuites pénales et de sanctions fiscales, "dans les cas de fraude les plus graves", déboutant l'ancien ministre du Budget Jérôme Cahuzac - depuis condamné à deux ans ferme en appel - et les marchands d'art Wildenstein, depuis relaxés.

Les Sages avaient estimé qu'en fonction du "montant de la fraude, de la nature des agissements de la personne ou des circonstances de leur intervention", il était justifié de poursuivre les fraudeurs devant les tribunaux tout en leur infligeant de lourds redressements.

Le Conseil constitutionnel devra désormais se prononcer sur le délit d'omission, considéré par la défense de l'ancien secrétaire d'État comme bien moins grave que des comptes cachés ou des montages fiscaux impénétrables.

"Si le Conseil constitutionnel nous suit, cela aboutira à faire tomber les poursuites pénales", a observé Me Spinosi.

Cette QPC est adossée à un pourvoi des époux Thévenoud contre leur condamnation, qui sera examiné par la Cour de cassation une fois que le Conseil constitutionnel se sera prononcé.

Thomas Thévenoud avait démissionné le 4 septembre 2014, neuf jours seulement après sa nomination, en raison de "problèmes de conformité avec les impôts".

L'affaire Thévenoud avait atteint une nouvelle fois la "République exemplaire" prônée par le président François Hollande, après le scandale des comptes cachés à l'étranger de Jérôme Cahuzac.

Cette excuse de "phobie administrative" est une "bêtise" qui a "fait rire la France entière", "mais ça existe", avait déclaré Thomas Thévenoud devant le tribunal correctionnel en 2017, racontant avoir reçu des dizaines de témoignages de gens pour qui les démarches administratives sont difficiles.

Selon un document de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) révélé en février, l’éphémère secrétaire d'Etat avait même déposé la marque "phobie administrative" le 12 septembre 2014, quelques jours après avoir dû quitter le gouvernement.

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