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Le texte proposant d’allonger la durée maximale de rétention administrative pour les étrangers jugés dangereux à 210 jours devrait être adopté sans modification par la majorité sénatoriale.
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Par Public Sénat
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La copie du gouvernement sur la réforme institutionnelle est à revoir. C’est ce qu’a fait savoir le président du Sénat dans un courrier adressé à la présidence de la République le mardi 17 avril, et dont Public Sénat a pu obtenir une copie.
Dans ce document de trois pages, que nous reproduisons en fin d’article, Gérard Larcher se dit « préoccupé par la ligne que semble proposer le texte présenté par le Gouvernement » pour la loi constitutionnelle. Le texte « ne me paraît pas correspondre aux orientations que vous aviez bien voulu faire vôtres lors de nos derniers échanges », souligne le sénateur des Yvelines au chef de l’État en référence à leur entretien du 30 mars. Selon lui, l’état actuel de l’avant-projet de loi est aussi « en contradiction » avec le discours présidentiel tenu lors du Congrès de Versailles du 3 juillet 2017.
Depuis le début de la Ve République, aucune révision constitutionnelle n’est allée dans le sens d’une régression des droits du Parlement, insiste Gérard Larcher. Si les objectifs de « rationalisation du fonctionnement de l’ensemble des pouvoirs publics » peuvent être « partagés », selon lui, ces derniers ne « pourront pas être atteints par une démocratie parlementaire affaiblie ».
Dans le détail, le président de la Haute assemblée voit dans les dispositions de l’article 3 de l’avant-projet de loi une « atteinte excessive au droit d’amendement » des parlementaires. Rendre irrecevables les amendements sans lien direct avec un texte pénaliserait aussi le gouvernement, précise-t-il. Sans possibilité de procéder à des ajustements grâce aux textes en discussion, ce serait prendre le risque de voir se multiplier des « textes fourre-tout », avertit Gérard Larcher.
Avec la réforme de la procédure suivant les commissions mixtes paritaires (en cas d’échec entre les deux chambres à s’entendre sur une version commune d’un texte), c’est le bicamérisme qui se retrouverait « déséquilibré ». Le Sénat « serait réduit à un rôle quasi consultatif », alerte Gérard Larcher, notant que les députés n’auraient plus à se prononcer sur les corrections du Sénat « à aucun moment de la procédure législative ». Quant aux amendements des députés soumis à l’accord du gouvernement, le président du Sénat y voit une « forme de mise sous tutelle » du pouvoir législatif.
Quant à l’article 8, qui autoriserait le gouvernement à inscrire prioritairement à l’ordre du jour ses réformes jugées les plus urgentes, Gérard Larcher y voit la fin du principe institué en 2008 sur un partage de l’ordre du jour partagé entre gouvernement et Parlement. Le nouvel avantage qui pourrait être offert à l’exécutif entrerait en collision avec les semaines d’initiative parlementaire et donc « porterait atteinte aux droits des groupes minoritaires et d’opposition », redoute le président du Sénat.
En tant que président d’une assemblée représentant les collectivités territoriales, Gérard Larcher « s’interroge » également sur les articles 15 à 17 de l’avant-projet de loi. Ces derniers pourraient permettre aux collectivités de pérenniser des expérimentations, sans qu’elles soient généralisées aux autres, ou encore de déroger, pour une durée limitée, à des textes législatifs ou réglementaires qui régissent l'exercice de leurs compétences. Ces mesures seraient « susceptibles de porter une atteinte excessive au principe d’unité et d’indivisibilité de la République », affirme le président du Sénat.
S’il « demeure » encore « favorable à l’aboutissement de cette révision » constitutionnelle, Gérard Larcher « s’interroge » néanmoins sur la « possibilité réelle de converger » entre les assemblées et l’exécutif.