Levée de boucliers des sénateurs contre l’amendement Catherine Pégard
Les sénateurs de tous les bancs se sont opposés, dans le cadre de l’examen du texte sur les JO de Paris 2024, à un amendement du macroniste François Patriat, et soutenu par le gouvernement, pour prolonger à la tête du Château de Versailles Catherine Pégard, atteinte par la limite d’âge.

Levée de boucliers des sénateurs contre l’amendement Catherine Pégard

Les sénateurs de tous les bancs se sont opposés, dans le cadre de l’examen du texte sur les JO de Paris 2024, à un amendement du macroniste François Patriat, et soutenu par le gouvernement, pour prolonger à la tête du Château de Versailles Catherine Pégard, atteinte par la limite d’âge.
François Vignal

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Pas de rab. Le Sénat a terminé l’examen du projet de loi sur les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Un texte fourre-tout, qui comporte de nombreuses mesures sécuritaires, à commencer par la vidéosurveillance automatisée par algorithmes.

« Un grand oui, en lettres capitales », soutient la ministre Amélie Oudéa-Castéra

Parmi les nombreuses mesures très variées que compte ce projet de loi, les sénateurs se sont même penchés sur… le Château de Versailles. L’exécutif, par la voie d’un amendement de François Patriat, président du groupe des sénateurs macronistes, espérait en effet profiter de ce texte pour prolonger jusqu’aux JO le mandat de Catherine Pégard, présidente du domaine du Château de Versailles, où seront organisées les épreuves d’équitation et de pentathlon moderne. Or la présidente de l’établissement public a atteint la limite d’âge. « La présidente, en place depuis 2011, déroge au nombre de mandats et à la limite d’âge. La solution réglementaire n’étant pas possible, la voie législative doit être empruntée », a défendu François Patriat.

Lire aussi » JO de Paris 2024 : le Sénat vote un texte sécuritaire

Un amendement soutenu par la ministre des Sport, Amélie Oudéa-Castéra, avec « un grand oui, en lettres capitales », s’est-elle enjouée, soulignant que Catherine Pégard connaissait « les moindres recoins » du Château. « C’est un atout dans notre préparation », a assuré la ministre. L’amendement a reçu un avis de sagesse de la rapporteure, membre du groupe LR, Agnès Canayer, c’est-à-dire qu’elle s’en est remise à l’avis du Sénat.

« C’est le fait du prince »

Pas de chance pour l’ancienne journaliste et le gouvernement, l’idée est très mal passée chez les sénateurs présents en séance. « C’est le fait du prince », a dénoncé la socialiste Sylvie Robert, qui souligne que « cet amendement vient régler une situation que le Président, le gouvernement, ont essayé de régler par un décret, que le Conseil d’Etat a retoqué ».

« C’est incompréhensible qu’il n’y ait pas eu quelqu’un de formé pour préparer la suite », s’est étonné le sénateur LR Michel Savin, qui souligne que « lorsqu’on veut promouvoir la République exemplaire, on ne propose pas des amendements comme celui-là ». « Dans la discussion générale, j’ai manifesté l’hostilité du groupe Union centriste à la méthode employée. Au fondement de la démocratie, il y a le respect de la règle, même quand elle n’arrange pas », a avancé le sénateur Arnaud de Belenet.

« Encore une fois, un cavalier législatif. Ce n’est plus un projet de loi, c’est une épreuve équestre »

« Encore une fois, un cavalier (législatif, c’est-à-dire un sujet sans lien avec le texte). Ce n’est plus un projet de loi, c’est une épreuve équestre », a raillé le communiste Pierre Ouzoulias (en premier dans la vidéo ci-dessus), qui rappelle « qu’il s’agit d’une présidente d’établissement public dont la limite d’âge a été dépassée depuis 2021… Je pense que les candidats ne manquent pas ». Au regard de l’importance que jouent les sénateurs à la préparation des JO, « pour l’Ile-de-France, il faudrait alors que le gouvernement reporte les élections sénatoriales », a ironisé le sénateur de Paris, Philippe Dominati. Ce qui reviendrait à prolonger aussi leur mandat. « La sagesse serait de retirer l’amendement », a proposé Laurent Lafon, président centriste de la commission de la Culture, en guise d’extrême-onction pour cette proposition.

Devant la réprobation des sénateurs, François Patriat, qui aurait sûrement été mis en minorité, a préféré retirer son amendement. « J’ai bien compris qu’il met certains de nos collègues dans l’embarras. Nous avons pourtant connu d’autres cas de ce genre, sous les diverses législatures précédentes », a soutenu le sénateur Renaissance de la Côte-d’Or, selon qui « Versailles est un objet hors du commun : on ne le dirige pas du jour au lendemain ». L’amendement devrait, à n’en pas douter, faire son retour lors du passage du texte à l’Assemblée.

Echange musclé entre Arnaud de Belenet et François Patriat

Un petit incident de séance s’est déroulé dans la foulée, quand Arnaud de Belenet, sénateur du groupe Union centriste, a fait un rappel au règlement. Il reproche à François Patriat d’avoir mimé de le viser avec un pistolet – Arnaud de Belenet reproduit alors le geste. « J’ai lu sur ses lèvres : "On va te buter". Comme je lui demandais une précision, il a bien voulu ajouter, à haute voix : "Dans six mois, tu ne seras plus rien" », explique le centriste. « François Patriat aura remarqué que nous n’avions pas buté son amendement, pour reprendre son élégant vocabulaire. Peut-être même avons-nous ouvert la voie à l’adoption de celui-ci. À défaut d’une marque de gratitude, je lui demande au moins des excuses », lance le sénateur de la Seine-et-Marne (voir la vidéo ci-dessous). « Comme disait Coluche, je me marre », rétorque le président du groupe RDPI (Renaissance), qui explique : « J’ai montré notre collègue du doigt, comme pour dire : "On se reverra". Mais je n’ai rien dit. Quand il est venu vers moi, je lui ai dit, en effet : "Dans six mois, tu ne seras plus rien". Je n’ai pas à m’en excuser ».

Pour comprendre l’altercation, Arnaud de Belenet, aujourd’hui membre du groupe Union centriste, était auparavant au groupe de François Patriat. En 2017, il a été élu en tant que sénateur LREM. Renouvelable en septembre 2023, on peut imaginer qu’il n’aura pas le soutien du parti présidentiel. « Cet incident est clos pour le moment. Vous vous expliquerez en dehors de l’hémicycle », a conclu le président de séance, le communiste Pierre Laurent. Ou en duel équestre au Château de Versailles ? Peut-être une idée de nouvelle épreuve olympique.

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