Face à la limitation de vitesse à 80 km/h sur les routes secondaires, les sénateurs multiplient les contre-attaques. Alors qu’un premier rapport rendu en avril recommande d’appliquer cette mesure au cas par cas - en décentralisant la décision au niveau des départements - la sénatrice de l’Ain, Sylvie Goy-Chavent (UDI), a elle déposé une proposition de loi visant à aménager le permis à points dans la perspective de la limitation de vitesse à 80 km/h.
Il s’agit donc de ramener le délai de récupération de points en cas d’infraction routière de six à trois mois. Une proposition de loi « démagogique et indigne d’une élue de la République », pour la présidente de la Ligue contre la violence routière, Chantal Perrichon qui souligne que les axes concernés sont particulièrement « accidentogènes ». Des mots forts qui montrent à quel point ce débat est sensible.
La limitation de vitesse à 80 km/h est vécue « comme une forme de racket »
Pour une écrasante majorité des élus locaux cette mesure est jugée « aussi inefficace qu’injuste ». « Il y a des limites », s’agace Sylvie Goy-Chavent qui assure que les habitants de son département sont particulièrement remontés et le lui font savoir. La décision, qui entrera en vigueur le 1er juillet prochain, « contribuera à renforcer le sentiment de déclassement des habitants des zones rurales qui n’ont d’autres choix que d’emprunter ces routes chaque jour », reproche l’élue dans son communiqué. Contactée par Public Sénat, elle ajoute que « pour la plupart des gens » cette mesure est vécue « comme une forme de racket ». Sylvie Goy-Chavent redoute que les amendes pour les excès de vitesse inférieurs à 10 km/h augmentent significativement et dit comprendre que « les concitoyens verbalisés pour un dépassement de deux ou trois kilomètres heure se sentent piégés ».
La proposition de loi de la sénatrice permettrait donc aux automobilistes de récupérer leurs points plus facilement. Aujourd’hui, si un automobiliste commet une infraction entraînant une perte de points, il a la possibilité de les récupérer dans un délai de 6 mois, à la condition de ne pas récidiver pendant entre-temps (article L223-6 du Code la route). Le texte de Sylvie Goy-Chavent suggère de ramener ce délai à 3 mois. La loi LOPPSI II du 14 mars 2011 avait déjà ramené ce même délai de 1 an à 6 mois. Un texte contre lequel Chantal Perrichon avait ardemment milité en affirmant déjà à cette époque que « la casse du permis à points [était] la première cause de la hausse de la mortalité routière ».
Chantal Perrichon estime que les parlementaires qui cherchent à édulcorer ce texte se font de la « publicité » sur le dos d’une mesure qui aura des effets concrets sur la baisse de la mortalité routière. La limitation de vitesse à 80 km/h sur les 400 000 kilomètres de routes secondaires à double sens et sans séparateur central aura pour effet de « sauver des vies, 300 à 400 selon les études », selon le porte-parole du gouvernement (lire notre article). Un postulat vivement remis cause par les rédacteurs du rapport « sécurité routière et limitation à 80 km/h » remis en avril dernier. Mais devant la fronde des sénateurs et l’impopularité de cette mesure, le Premier ministre « assume » et martèle un même argument depuis janvier : « Réduire le nombre de morts et de blessés sur les routes françaises » quitte à être « impopulaire ».
Sécurité routière : faut-il un aménagement du permis à points ?
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