C’est un thème que les associations souhaitent imposer dans le débat de la présidentielle. Dimanche, à Paris, plusieurs centaines de manifestants ont ainsi battu le pavé à l’appel de la DAL (l’association Droit au Logement), afin de remettre la question du logement sur le devant de la scène. Ce mardi au Sénat, le groupe les Républicains a pris le relais. Les élus ont souhaité mettre l’accent sur les raisons de la « crise du logement que connaît notre pays », ainsi que sur le « manque d’ambition de la politique de la ville » du gouvernement.
Un manque inquiétant de nouveaux logements
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Selon l’Institut Montaigne, think tank considéré comme libéral, le nombre de nouveaux logements n’a cessé de fléchir depuis le début du quinquennat, passant de 500 000 permis de construire en 2017 à 381 000 en 2020. Le niveau de construction neuve est proche de ses plus bas depuis 20 ans. Dans le même temps, l’Insee comptabilise 3 millions de logements vacants.
La crise n’est pas nouvelle. Mais elle s’est accentuée sous le quinquennat selon les oppositions. Alors que le candidat Emmanuel Macron promettait en 2017 un « choc de l’offre » pour faire face à la demande, la sénatrice LR Dominique Estrosi Sassone dresse un constat amer. « Force est de constater que le choc de l’offre a laissé la place à l’aggravation de la crise. L’espoir pour les plus modestes a laissé la place à un horizon bouché. L’effacement des ghettos a laissé la place à la persistance des barrières à l’intégration. » La pénurie concerne tous les types de logement. Alors que l’on compte environ deux millions de demandeurs de logements sociaux, l’offre ne suit pas. « Il était pourtant possible de donner de l’oxygène aux bailleurs sociaux, par exemple en rétablissement le taux de TVA à 5,5 % pour toutes les constructions, ou pour les opérations de rénovation » ajoute la sénatrice des Alpes-Maritimes.
Un constat partagé par le gouvernement, qui refuse néanmoins de porter le chapeau et met en avant son bilan dans un contexte de crise sanitaire. « Nous sommes face à un paradoxe. Alors que la demande est toujours forte dans les grandes villes, la construction de nouveaux logements ne suit pas. […] Cette situation a été accentuée par la crise sanitaire que nous traversons » note la ministre de la Ville.
Alors que seulement 90 000 logements sociaux ont été construits en 2020, Nadia Hai a martelé le nouvel objectif fixé par le gouvernement au mois de février : la construction de 250 000 logements dans les deux années qui viennent. La ministre a aussi rappelé la mobilisation d’un milliard d’euros dans le cadre du plan de relance à destination des quartiers populaires.
Des prix en constante augmentation
De la poudre de perlimpinpin pour la sénatrice écologiste Sophie Taillé-Polian, qui accuse le gouvernement de ne pas être à la hauteur de l’enjeu et d’utiliser le milliard d’euros promis aux quartiers pour financer d’autres projets. « Depuis cinq ans, les associations sont en grande souffrance du fait de la fin des contrats aidés. Aujourd’hui, la politique du gouvernement dans les quartiers populaires est une intensification de la pauvreté », accuse l’élue du Val-de-Marne.
Dans un rapport publié en juin, l’OCDE s’est alarmée du poids toujours plus lourd du logement dans le budget des ménages. En France, les prix ont ainsi bondi en moyenne de 88 % ces vingt dernières années, soit bien plus rapidement que les revenus. Le gouvernement assure néanmoins que les promesses fixées par le candidat Macron ont été remplies en matière de politique de la ville. « Est-ce que 131 millions d’euros supplémentaires dans les budgets de la politique de la ville sont un désengagement de l’Etat, après dix années de baisse de ce budget ? […] Je ne le crois pas. Le visage de nos quartiers est en train de changer » veut croire Nadia Hai. Pas assez vite, ont ce mercredi répondu en chœur les groupes d’opposition du Sénat.