Hier a débuté au Sénat, l’examen du projet de loi agriculture et alimentation. Alors que Stéphane Travert, le ministre de l’agriculture et de l’alimentation a évoqué, en ouverture de la discussion générale, un « texte clé », les désaccords entre le gouvernement et les sénateurs sont nombreux.
Fabien Gay, sénateur (communiste) de Seine-Saint-Denis et membre de la commission des affaires économiques, estime que ce projet de loi n’est pas à la hauteur : « C’est la montagne qui accouche d’une souris (…) Les beaux discours de Rungis [discours d’Emmanuel Macron en octobre 2017 aux États généraux de l’alimentation - NDLR] sont déjà évanouis ». Il poursuit : « On a un défi. Il est multiple. D’abord, c’est le revenu paysan (…) Aujourd’hui, les hommes et les femmes qui travaillent la terre, qui nous nourrissent, n’arrivent pas à vivre dignement. Et souvent, ils vendent moins cher que ce que cela leur coûte à produire (…) Ceux qui se goinfrent, c’est la grande distribution. Ce projet de loi dit « On va s’occuper de ça, on va essayer de réguler un peu ». Mais en vérité, c’est comme si on mettait un troupeau de chevaux, dans un enclos de carton-pâte. Cela ne résoudra rien. »
Le bio fait débat au Sénat puisqu’après avoir voulu supprimer le minimum de 20% de produits bio dans la restauration collective, la commission des affaires économiques du Sénat souhaite finalement rétablir cet objectif. Gilles Fumey, géographe et spécialiste de l’alimentation est catégorique : « L’argument qui consiste à dire : « Pour que les cantines puissent avoir du bio, on va être obligé d’acheter à l’extérieur » (…), nous en sommes largement responsables. On a freiné les conversions bio au début de ce quinquennat. »
Et il ajoute : « C’est assez malhonnête de dire que les Français ne pourraient pas produire du bio, alors que la production pourrait aller très vite. »
Les sénateurs sont revenus sur la suppression de l’interdiction de remises et de rabais sur les pesticides et les insecticides. « Ce n’est pas une reculade » assure pourtant Daniel Gremillet, sénateur (LR) des Vosges et vice-président de la commission des affaires économiques. « Au contraire. On est dans un pays où l’on a la chance d’avoir des chercheurs. Il n’appartient pas aux sénateurs ou aux sénatrices de dire : « Ce produit est bon ou il n’est pas bon ». C’est aux scientifiques de nous éclairer (…) Ce n’est pas dans un texte de loi comme celui-ci qu’on décide que telle molécule est bonne ou n’est pas bonne. »
À l’inverse, pour Joël Labbé, sénateur écologiste du Morbihan et membre de la commission des affaires économiques, ce projet de loi assure « complètement insuffisamment » la sécurité sanitaire des consommateurs : « Contrairement à ce que dit Daniel Gremillet, qui dit que ce n’est pas à nous de décider si des molécules sont bonnes ou mauvaises, il y a un moment c’est [de] notre responsabilité. [En] s’appuyant sur la recherche scientifique évidemment (…) On se doit de prendre les mesures qui conviennent. »
Vous pouvez voir et revoir le débat d’OVPL, sur le projet de loi alimentation et agriculture, en intégralité :
Loi alimentation : polémiques et divisions au menu (débat OVPL en intégralité)