Loi Climat : le Sénat ne souhaite pas taxer davantage les SUV

Loi Climat : le Sénat ne souhaite pas taxer davantage les SUV

L’examen en séance du titre III du projet de loi climat concernant les transports a été l’occasion pour les sénateurs d’adopter des dispositions en faveur du changement de véhicules. La tentative des sénateurs de gauche et écologistes d’étendre la taxe sur les voitures lourdes à davantage de véhicules, quant à elle, n’a pas fonctionné.
Mathilde Nutarelli

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Après de vifs débats jeudi soir sur l’implantation des éoliennes et le conditionnement de la fermeture des centrales nucléaires, le Sénat a démarré ce vendredi après-midi l’examen en séance du titre III du projet de loi climat, relatif aux transports. Ce fut l’occasion pour la Chambre Haute de discuter de l’élargissement du malus pour les véhicules lourds, ainsi que d’adopter des dispositions pour faciliter le passage de la voiture à d’autres modes de transports.

Les sénateurs sur une ligne de crête

Le renforcement de la zone à faibles émissions (ZFE) dans la métropole du Grand Paris a pris effet le 14 juin dernier, empêchant les véhicules Crit’Air 4 (voitures diesels immatriculées avant le 1er janvier 2006 et les deux-roues motorisés datant d’avant juillet 2004), de circuler sur le territoire métropolitain entre 8 heures et 20 heures du lundi au vendredi. L’étendue de cette mesure est prévue dans le projet de loi climat. Cette disposition a fâché l’association 40 millions d’automobilistes, qui a envoyé une lettre ouverte aux sénateurs pour la dénoncer. En cause, la pénalisation de ceux qui n’ont pas les moyens de vivre en centre-ville et qui ne peuvent changer de véhicule, c’est-à-dire les plus modestes. Pour la sénatrice LR des Hauts-de-Seine Christine Lavarde, les classes moyennes sont également pénalisées. En effet, selon elle « les classes moyennes se sentent mises à l’écart de cette transition, parce que les dispositifs ne sont pas suffisants ». Sur le dossier des ZFE, difficile d’allier ambition climatique et lutte contre les inégalités.

Pourtant, c’est ce que le Sénat s’est attaché à faire cet après-midi. En effet, si les sénateurs ne se sont pas prononcés contre la mise en place des ZFE, ils ont adopté plusieurs mesures visant à faciliter le report modal, c’est-à-dire le passage d’un mode de transport à un autre, et l’achat de véhicules plus propres.
Ils ont ainsi voté, contre l’avis du gouvernement, la création d’un prêt à taux zéro pour l’achat d’un véhicule propre et augmenté le soutien de l’Etat aux collectivités pour le développement de pistes cyclables. Les sénateurs ont également adopté l’article introduit à l’Assemblée nationale qui prévoit d’aider en priorité les habitants des ZFE à changer de mode de transport.

ZFE : "Les classes moyennes se sentent mises à l’écart de cette transition "
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Une tentative échouée pour le malus poids

Trois amendements, portés par les sénateurs Gérard Lahellec du groupe communiste, Jacques Fernique du groupe écologiste et Olivier Jacquin du groupe socialiste, reprenant une proposition de la Convention citoyenne pour le climat, ont proposé d’étendre la taxe sur les voitures lourdes à davantage de véhicules. En substance, les trois parlementaires souhaitaient que la taxe qui s’applique aux véhicules lourds concerne les véhicules de 1 300 kilos et plus, le seuil étant aujourd’hui fixé à 1800 kilos.
La mise en place d’un barème progressif ainsi que l’élargissement de cette taxe aux véhicules hybrides et électriques, avec un barème spécifique, étaient également prévus dans ces amendements.
Ils visent explicitement les SUV, véhicules lourds et plus polluants que les autres, en plein essor ces dernières années. Aujourd’hui, ils sont inégalement taxés, puisque seuls ceux qui dépassent les 1 800 kilos sont concernés. Pour Ronan Dantec, sénateur écologiste de Loire-Atlantique, défenseur de ces mesures, « il est temps de passer des messages clairs sur le fait qu’il faut être économe et réduire cette empreinte-là ».

Pourtant, la commission et le gouvernement ont porté un avis défavorable sur ces amendements, qui ont tous les trois été rejetés. Ils craignaient en effet qu’ils ne pénalisent les familles, qui utilisent des véhicules lourds moins polluants que des SUV. Par ailleurs, le ministre chargé des Transports, Jean-Baptiste Djebbari a mis en garde sur le fait que ce type de mesure pourrait nuire au secteur automobile français. Il a expliqué que l’amendement risquait de porter un coup fatal à cette industrie, qui consent déjà des efforts d’investissements dans des véhicules plus légers et plus propres, alors qu’elle est déjà en difficulté.
Cet argument a été repris par la sénatrice LR des Yvelines Sophie Primas. En effet, pour la présidente de la commission des affaires économiques, « l’industrie automobile française n’est pas dans une santé éblouissante », et « la meilleure façon de ne pas voir des constructeurs disruptifs venir sur le marché, c’est d’avoir une industrie automobile solide et rentable ».
S’il est sensible à ces arguments, le sénateur écologiste Joël Labbé déplore tout de même la culture, entretenue par la publicité, qui fait que « pour des gens, c’est psychologiquement important de rouler dans un SUV au détriment d’autre chose ». Dans la droite ligne de cette remarque, le Sénat a adopté, en début de semaine, l’interdiction de la publicité faisant la promotion des voitures les plus polluantes dès 2028.

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