Le Conseil constitutionnel a finalement donné raison aux sénateurs du groupe socialiste, qui l'avaient saisi le 28 juillet sur la loi de sûreté antiterroriste. Le groupe présidé par Patrick Kanner avait voté contre le texte, finalement adopté par le Sénat, quatre jours avant son adoption par les députés, le 27 juillet.
« Les articles 1er, 2 et 4 de la loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine sont contraires à la Constitution », ont jugé les Sages, dans une décision publiée ce vendredi 7 août. Une décision par ailleurs saluée par la présidente du Conseil national des barreaux, Christiane Féral-Schuhl.
Pointage et bracelet électronique
Le texte de loi prévoit des mesures de sûreté qui pourront être imposées à des personnes ayant définitivement purgé leur peine, même si aucune infraction n'a été commise, au motif qu'il y a un risque qu’ils en commettent une.
L'arsenal législatif pourrait permettre un suivi par le service pénitentiaire d’insertion et de probation, ou le pointage trois fois par semaine au commissariat, mais encore le port d’un bracelet électronique.
Une « peine dans la peine »
Les sénateurs socialistes ont estimé qu'il s'agit là d'une sorte de « peine dans la peine », soit la possibilité de rajouter une peine à une personne l'ayant déjà purgée. Ils visaient en particulier l'article 1 de cette loi.
« La décision du Conseil constitutionnel donne entièrement raison aux arguments défendus par le groupe socialiste au Sénat, et défendu dans le recours déposé devant le Conseil », réagit le sénateur PS Jean-Pierre Sueur.
« Le Conseil considère que si la lutte contre le terrorisme est un objectif de valeur constitutionnelle, les mesures de sûreté figurant dans l'article 1 sont contraires à la Constitution. En effet, l'ensemble de ces mesures s'apparentent à des peines après la peine. Ce qui est différent des dispositifs qui peuvent être décidées par le juge lors du prononcé de la peine. »
Il faut faire appel à d'autres dispositifs pour lutter contre le terrorisme et la radicalisation
Jean-Pierre Sueur
Pour le groupe socialiste, « il faut faire appel à d'autres dispositifs pour lutter contre le terrorisme et la radicalisation », poursuit le sénateur du Loiret. « Le groupe socialiste a donc eu raison d'être vigilant en s'opposant à ce texte. »
Jean-Pierre Sueur, qui avait demandé et obtenu l'audition du nouveau ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti par la commission des lois du Sénat dont il est le vice-président, conclut : « M. Dupond-Moretti a été bien mal inspiré de renoncer à ce qu'il défendait auparavant pour les besoins de sa nouvelle cause ministérielle. »