Loi immigration : le député RN Thomas Ménagé dénonce « un nouvel appel d’air », malgré le durcissement du texte au Sénat

Le Rassemblement national soutient la plupart des mesures présentes dans le projet de loi sur l’immigration, largement amendé par la majorité sénatoriale. Mais ce durcissement n’est toujours pas suffisant aux yeux du parti d’extrême droite, qui s’oppose à toute mesure de régularisation des travailleurs étrangers.
Hugo Ruaud

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Suppression de l’Aide médicale d’Etat (AME), simplification des expulsions des étrangers dangereux, ou encore la remise en cause du droit du sol : le durcissement du projet de loi immigration après son passage par le Sénat a tout pour séduire le Rassemblement national. Thomas Ménagé, porte-parole du parti de Marine Le Pen, le concède : « Tout ce qui va vers plus de fermeté peut obtenir notre assentiment et notre soutien ». Le député du Loiret explique d’ailleurs que son parti va voter « sûrement pour un certain nombre d’articles, notamment sur le droit du sol ou le fait de traiter des demandes d’asile depuis l’étranger. On va appuyer tout ce qui va dans l’intérêt des Français ». Mais le texte n’obtient toujours pas la bénédiction du parti d’extrême droite, pour lequel la question des régularisations reste une ligne rouge. Ce volet du projet, initialement « jambe gauche » du texte et garant de son équilibre, a été réduit comme une peau de chagrin. L’article 3 du projet de loi qui visait à régulariser les travailleurs étrangers évoluant dans des secteurs en tension a disparu, remplacé par un « article 4 bis », qui prévoit une régularisation strictement encadrée où la décision relève du pouvoir du préfet.

 

 

Un texte jamais assez dur

 

Un sérieux tour de vis qui ne satisfait toujours pas le Rassemblement national : « Quand sept Français sur dix attendent une politique de fermeté en matière d’immigration, on ne peut pas créer une nouvelle manière de venir en France ». Pourtant, le texte voté au Sénat complique considérablement la tâche pour les étrangers qui tenteraient de s’installer en France : tandis que l’article 3 du projet de loi permettrait une régularisation de plein droit des travailleurs sans papiers, l’article 4bis implique seulement des titres de séjour accordés au cas par cas et à titre exceptionnel par les préfets. Les sénateurs ont d’ailleurs imposé trois conditions d’éligibilité dans le texte : Avoir exercé un emploi en tension durant au moins 12 mois au cours des 24 derniers mois, occuper un tel emploi au moment de sa demande, et justifier d’une résidence ininterrompue d’au moins 3 années en France. Des faits que conteste Thomas Ménagé, qui assure que les régularisations prévues par le texte voté au Sénat sont à même d’engendrer une nouvelle filière d’immigration et considère l’article 4bis comme une simple « réécriture » de l’article 3 : « Cela pérennise et ça met dans la loi la circulaire Valls qui permet aux préfets de régulariser des travailleurs sans papiers. Le préfet répondant aux ordres de l’exécutif, quand un gouvernement tel que celui que nous avons aujourd’hui avait dit qu’il voulait le faire de manière automatique, on se doute bien que le préfet va le faire de manière assez large ». Quelle que soit la version finale du projet de loi, Thomas Ménagé dénonce les régularisations comme étant « une prime à la clandestinité : des personnes qui travaillent illégalement vont obtenir des papiers ».

 

Le spectre de la motion de censure

 

Mais ces considérations font de toute façon fi de la possibilité pour le gouvernement d’adopter ce texte à l’aide d’un 49.3 en cas d’incapacité à trouver une majorité à l’Assemblée pour le voter. Car à force de concéder des mesures à la droite sénatoriale et après avoir consenti à la quasi-suppression de l’article 3, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin pourrait avoir du mal à convaincre l’aile gauche de la majorité. Un jeu d’équilibre extrêmement précaire puisque dans le même temps, les députés Les Républicains ne s’alignent pas sur leurs homologues du Sénat et brandissent la menace d’une motion de censure. Si tel était le cas, les députés RN soutiendraient « vraisemblablement » la censure selon Thomas Ménagé. « Ce gouvernement doit être censuré, Madame Borne doit partir », a martelé le député du Loiret sur le plateau de Public Sénat.

 

Partager cet article

Dans la même thématique

Photo Cazeneuve
11min

Politique

Attentats du 13 novembre 2015, le récit de Bernard Cazeneuve : « Très vite, on a conscience que nous sommes confrontés à une attaque de grande ampleur »

ENTRETIEN - Dix ans après les attentats de Paris et de Seine-Saint-Denis, qui ont coûté la vie à 130 personnes, l'ancien ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, revient auprès de Public Sénat sur cette nuit de terreur, et la gestion de crise aux côtés du Président de la République et du Premier ministre.

Le

Loi immigration : le député RN Thomas Ménagé dénonce « un nouvel appel d’air », malgré le durcissement du texte au Sénat
3min

Politique

« Il n’y a aucune délinquance dans les écoles de musique », affirme le chef d’orchestre Jean-Claude Casadesus

Il est sans conteste le maestro français le plus célèbre de sa génération. A 92 ans, Jean-Claude Casadesus continue de remplir les plus belles salles du monde sans jamais renier son attachement à la région du Nord. Lui qui a créé puis dirigé l’orchestre national de Lille, s’est engagé toute sa vie pour rendre la musique classique accessible à tous. Invitée de Rebecca Fitoussi dans Un monde, Un regard, Il revient sur son immense carrière marquée par la passion et le partage.

Le

Paris: Senate pension debat
6min

Politique

Retraites : la gauche du Sénat désunie sur la suspension de la réforme

A partir du 19 novembre, le Sénat examinera en séance publique le projet de loi de financement de la Sécurité sociale et sa mesure phare : la suspension de la réforme des retraites. Une concession du gouvernement faite au PS qui n’a aucune chance d’être adoptée à la haute assemblée à majorité de droite. Les socialistes ne devraient également ne pas être suivis par les communistes et écologistes sur le vote de cette mesure.

Le

Photo horizontale Hollande
11min

Politique

Attentats du 13 novembre 2015 : « Je vois des victimes qui sortent du Bataclan, le regard hagard… », se remémore François Hollande

ENTRETIEN – Dix ans après les attentats du 13 novembre 2015, l'ancien président de la République revient auprès de Public Sénat sur le déroulé des attaques terroristes de Seine-Saint-Denis et de Paris. Il détaille la gestion de la crise et les décisions prises cette nuit-là, mais analyse aussi l'évolution du pays face à cette épreuve.

Le