Loi immigration : le Sénat adopte le texte durci par la droite

Ce mardi, en séance publique, le Sénat a adopté solennellement le projet de loi immigration par 210 contre 115 voix.  Le texte a été durci par la majorité sénatoriale de la droite et du centre. Le ministre de l’Intérieur s’est, lui, félicité de voir le projet de loi adopté avec une mesure de régularisation par le travail.
Simon Barbarit

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Sans surprise, après une semaine d’examen, le Sénat a adopté, ce mardi, le projet de loi immigration par 210 voix contre 115. Le texte avait été profondément remanié par la majorité sénatoriale de la droite et du centre, passant de 27 articles à près de 90. Suppression de l’aide médicale d’Etat, limitation du regroupement familial, durcissement des conditions de régularisation dans les métiers en tension, facilitation des expulsions… « Dans ce texte, nous avons fait passer les marqueurs de la droite. Jamais la droite n’a voté tout ce que nous avons voté au Sénat. Ce n’est clairement plus le texte de Gérald Darmanin, c’est bien le texte de la majorité sénatoriale », s’est félicité ce matin, le président du groupe LR, Bruno Retailleau.

A gauche, les trois groupes, socialiste, écologiste et communiste ont voté contre. Le groupe PS avait dénoncé « les horreurs » votées par la droite sénatoriale. A noté que le groupe RDSE a également voté contre ainsi que les trois sénateurs RN.

« Votre texte reprend consciencieusement les propositions du Front national »

A la tribune, la sénatrice socialiste, Marie-Pierre de la Gontrie a chargé la majorité sénatoriale. « Votre texte reprend consciencieusement les propositions du Front national et de Marine Le Pen […] Votre aile la plus dure a emporté le groupe LR avec le soutien du groupe centriste sur un texte pourtant peu conforme à ses idéaux et avec la complaisance du gouvernement et des sénateurs macronistes […] C’est un naufrage pour la droite, une rupture avec notre modèle républicain, avec l’héritage du gaullisme et l’ambition de cohésion de Jacques Chirac […] Ne vous laissez pas dériver vers une droite extrême qui ne satisfera jamais de vos propositions ».

Dans un communiqué, le groupe écologiste a pointé « un texte dangereux ». « La droite sénatoriale, par calcul politique, a supprimé de nombreux droits et fait voter de graves régressions en voulant occuper le terrain de l’extrême droite. Et le gouvernement, avis de sagesse après avis favorables, ne l’a pas combattue », ont-ils déploré.

En réponse, le président LR de la commission des lois, François-Noël Buffet a invité la gauche « à laisser de côté les injures et les caricatures et regarder la réalité […] le contexte, c’est une pression migratoire sans précédent ». « Si je devais traduire ce qu’a voulu la majorité sénatoriale, c’est que d’abord que l’immigration régulière soit choisie […] celle d’une immigration économique qualitative […] Et sur l’immigration irrégulière, eh bien oui, c’est tolérance zéro », a-t-il assumé.

« Pas grand monde n’aurait parié sur le fait que le texte soit adopté »

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin s’est félicité de voir le projet de loi adopté avec une mesure de régularisation par le travail. Reprenant, l’expression de François-Noël Buffet, il s’est lui aussi adressé aux bancs de la gauche. « Ce n’est pas parce que vous êtes contre le texte qu’il faut le caricaturer ». « Il y a un an, 6 mois, 15 jours, pas grand monde n’aurait parié sur le fait que le texte soit adopté y compris avec une mesure de régularisation. Je m’en félicite ». Le ministre a mis en avant l’adoption d’amendements de tous bords politique comme celui du sénateur communiste, Ian Brossat qui accorde des titres de séjour aux sans-papiers victimes de marchands de sommeil. « Je rappelle que le gouvernement a proposé, sur un amendement de Ian Brossat, des cours de français gratuits (pour l’obtention d’un titre de séjour pluriannuel), pas une seule fois, le groupe socialiste ne l’a proposé quand il était en responsabilité », a-t-il tancé.

Suppression de l’AME : « Une faute morale et une erreur grave en matière de santé publique »

Mais cette « jambe gauche » du texte pourrait ne pas suffire pour obtenir un vote à l’Assemblée nationale où le gouvernement ne dispose que d’une majorité relative, comme l’a rappelé à la tribune, le sénateur Renaissance, Olivier Bitz. « Certaines évolutions du texte nous ont profondément heurtés en particulier la suppression de l’AME. Nous espérons que l’Assemblée nationale reviendra sur ce qui représente à nos yeux une faute morale et une erreur grave en matière de santé publique ». Si le groupe RDPI a voté majoritairement ce texte c’est « en sachant que l’Assemblée nationale reviendra sur certaines dispositions que nous rejetons », a-t-il précisé.

Le plus dur commence donc pour le gouvernement à l’approche de l’examen du projet de loi à l’Assemblée nationale prévu le 11 décembre. « Nous attendons désormais que l’Assemblée nationale reprenne les dispositions du Sénat, seules capables d’une reprise en main de notre politique migratoire. Le Sénat sera très vigilant et refusera de voter un texte final qui ferait semblant », a d’ores et déjà prévenu sur X, Bruno Retailleau.

 

Dans la même thématique

New Caledonia Unrest
10min

Politique

Nouvelle-Calédonie : « Les présidents du Sénat et de l’Assemblée sont tout trouvés pour renouer le dialogue », soutient Bruno Retailleau

Pour sortir de la crise en Nouvelle-Calédonie, où l’Etat d’urgence a été décrété, le président du groupe LR propose la création d’un « comité de médiateurs », avec Gérard Larcher, qui « est respecté par toutes les parties et parle à tout le monde », et Yaël Braun-Pivet. Patrick Kanner, à la tête des sénateurs socialistes, est « favorable » à l’idée d’une médiation, réclamée aussi par le PS. Il estime que « le gouvernement s’est mis dans le mur en klaxonnant, en voulant jouer l’autorité ».

Le

DOUAI : JOURNEE MORTE PRISON
5min

Politique

Attaque d’un fourgon pénitentiaire : comment fonctionnent les extractions judiciaires de détenus ?

L’attaque d’un fourgon pénitentiaire qui a coûté la vie à deux agents et blessé trois autres a mis en lumière les dangers qui entourent les extractions judiciaires de détenus. Une mission exercée auparavant par les forces de sécurité intérieures avant d’être progressivement transférée à l’administration pénitentiaire et donc au ministère de la justice non sans difficultés. Explications.

Le