« Une loi pour pallier l’inaction de Marlène Schiappa ». C’est en ces termes qu’Aurélien Pradier a qualifié son texte visant « à agir contre les violences au sein de la famille », examiné par le Sénat cet après-midi. Dans l’émission « Bonjour chez vous » sur Public Sénat, le député LR a dénoncé le manque d’implication de la secrétaire d’État. « Elle avait sûrement mieux à faire que de venir nous aider à voter la loi » a-t-il déploré.
Pour l’examen à la Haute assemblée, Marlène Schiappa ne sera d’ailleurs pas présente en séance publique ce mercredi, en raison d’un déplacement à la Réunion pour un Grenelle des violences conjugales. Elle est remplacée par la garde des Sceaux, Nicole Belloubet.
La proposition de loi fait également consensus au Sénat même si le texte a fait l’objet « d’un toilettage technique » comme l’a indiqué la rapporteure LR du texte, Marie Mercier.
Proposition de loi violences conjugales. Marie Mercier: "nous allons faire un toilettage technique"
« Un dispositif d’évaluation » pour le bracelet anti-rapprochement
La mesure phare de la proposition de loi, le bracelet électronique anti-rapprochement, renommé par les sénateurs, dispositif électronique mobile anti-rapprochement, permet de géolocaliser et maintenir à distance les conjoints et ex-conjoints violents par le déclenchement d’un signal, avec un périmètre d’éloignement fixé par le juge. En commission, les sénateurs ont décidé de prévoir « un dispositif d’évaluation » jusqu’au 31 décembre 2022, avant de le pérenniser.
« Le problème c’est que les juges aux affaires familiales n’osaient pas l’appliquer. C’est quand même une entrave grave à la liberté. Donc, nous allons demander que ce soit le juge de la liberté et de la détention qui puisse appliquer cette règle » a expliqué Laure Darcos, sénatrice LR, membre de la délégation aux droits des femmes.
« Il faut donner des moyens aux juges »
Annick Billon, la présidente centriste de la délégation aux droits des femmes du Sénat estime, pour sa part, que le bracelet anti-rapprochement ne pourra pas être « la baguette magique pour lutter contre les violences faites aux femmes ». « J’ai des doutes quant à son application. Il faut donner des moyens aux juges, qui vont prononcer l’utilisation du bracelet, d’avoir un suivi. S’il n’y a personne derrière pour géolocaliser. Ce sera totalement inutile. Donc, il faut des moyens pour la police, pour la justice, pour la gendarmerie. Et tout ça se retrouvera dans le budget » a-t-elle prévenu.
Le bracelet anti-rapprochement ne peut pas être« la baguette magique pour lutter contre les violences faites aux femmes » estime Annick Billon
Mardi, la présidente du groupe PS à l’Assemblée nationale, Valérie Rabault a indiqué que la proposition de loi d’Aurélien Pradié nécessitait de débloquer « 5 millions dans le budget de la Justice ». « À votre avis, est-ce qu’ils y sont ? La réponse est non ».
Parmi les autres amendements du Sénat, on relève la possibilité d’hospitalisation sous X pour les victimes de violences. Les sénateurs souhaitent également ramener à 3 jours (contre 6 dans la proposition de loi) le délai maximal dans lequel le juge des affaires familiales tranche sur l’ensemble des prérogatives dont il dispose, comme le logement ou les modalités d’exercice de l’autorité parentale. Actuellement, le délai maximal est de 42 jours.
La priorité d'attribution de logement existe déjà dans la loi
Enfin, sur le volet logement, le Sénat a supprimé un amendement voté par l'Assemblée, contre l'avis du gouvernement, demandant aux préfets d'attribuer « en urgence » un logement aux femmes victimes de violences sur le contingent de logements réservés de l'État.
Pour la rapporteure, ce dispositif n'est pas du niveau législatif, et une priorité d'attribution existe déjà pour les victimes de violences intrafamiliales, quel que soit le contingent concerné.
Le gouvernement doit annoncer le 25 novembre un train de mesures pour enrayer les violences conjugales, après avoir reçu quelque 60 propositions issues du Grenelle sur les violences conjugales lancées en septembre.
La proposition de loi pour lutter contre les violences conjugales sera examinée cet après-midi à partir de 16H30. Depuis le début de l’année, 127 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint.