LREM se met en mode campagne pour tenter de relever la tête

LREM se met en mode campagne pour tenter de relever la tête

La République en marche dévoile une nouvelle équipe beaucoup plus politique. Objectif : la « reconquête » de l’opinion, les prochains scrutins en ligne de mire. Pour les européennes, le numéro 1 du parti, Stanislas Guérini, fait de Marine Le Pen et du RN, « parti du mensonge », son seul adversaire.
Public Sénat

Temps de lecture :

7 min

Publié le

Mis à jour le

Pour rebondir face à la crise des gilets jaunes, le pouvoir ne compte pas seulement sur le grand débat et les différentes mesures déjà annoncées. La République en marche, dirigée par Stanislas Guérini depuis le 1er décembre, compte jouer un rôle structurant (voir le sujet de Jonathan Dupriez). Et le parti présidentiel va faire ce pour quoi il a été créé : mener campagne pour les élections. Et si possible les remporter.

Poids lourds

« On est clairement en campagne (…) pour réussir le grand débat et les élections européennes » explique au micro de Public Sénat le délégué général de LREM, à l’issue d’une conférence de presse où le député a présenté le nouvel organigramme. Le lieu choisi, La Bellevilloise, dans le nord-est de la capitale, accueille habituellement les partis de gauche, notamment le PS. Regardez Stanislas Guérini :

Stanislas Guérini : « On est clairement en campagne »
01:27

La nouvelle équipe se veut beaucoup plus politique. « On a pris des poids lourds » décrypte un des dirigeants du parti. La secrétaire d’Etat Marlène Schiappa et le député Aurélien Taché sont chargés du débat d’idées. Guillaume Chiche et Laurent Saint-Martin, de la prospective. « Il faudra continuer à mieux converser avec les associations, les corps intermédiaires, qu’on a trop souvent délaissés, notamment au pouvoir » souligne Pierre Person, numéro 2 du parti (voir la vidéo ci-dessous). C’est la mission du député Sacha Houlié et de Philippe Granjeon – qui vient également d’être officiellement nommé conseiller spécial d’Emmanuel Macron. Ils sont chargés de renouer le dialogue avec les formations syndicales.

Pierre Person, numéro 2 de LREM : « Il faut que le parti se renforce politiquement »
00:37

Pour mieux communiquer, le parti compte quatre porte-paroles dont la députée Aurore Bergé, chargée aussi de la riposte face aux fake news.

L’action de Christophe Castaner critiquée en creux

« Le parti sera le maillon fort de l’écho système dans les prochains mois » assure Pierre Person. La page Castaner est clairement tournée. En creux, on sent la critique contre l’ancien délégué général. « On va vraiment remettre le mouvement en marche » lâche Aurore Bergé, « il faut être dans une phase de reconquête ».

« Je n’ai pas vu un mouvement amorphe quand j’ai pris ces responsabilités » tempère Stanislas Guérini, mais « parfois, nous avons manqué à nos adhérents. Nous ne leur avons pas donné suffisamment les bons outils pour aller sur le terrain, réussir nos enjeux d’implantation territoriale. Je continue le travail fait par Christophe Castaner, mais c’est vrai, il faut l’accélérer ». Les « marcheurs », nom donné aux militants chez LREM, seront ainsi remis à l’honneur. Le parti revendique plus de 400.000 adhérents. Un chiffre qui serait même en hausse, assure le nouveau numéro 1. « Il faut retrouver l’ADN d’En Marche » résume Aurore Bergé. Le « bottum-up » de la présidentielle, oublié depuis la victoire de 2017, sera remis au goût du jour.

Sous couvert d’anonymat, un autre haut responsable du parti est moins diplomatique sur l’action de Christophe Castaner :

« En deux mois, on a produit plus de choses qu’en un an et demi. Ça repart et on rattrape un retard accusé au démarrage, au premier trimestre 2018 ».

La tête de liste pour les européennes, « un mouton à cinq pattes qui n’existe pas »

Le premier test grandeur nature sera les élections européennes de mai prochain. Mais le parti n’a toujours pas trouvé sa tête de liste. Il faudra attendre fin février ou mars. Un responsable préfère encore en rire : « On va finir par mettre une annonce… » Le profil idéal ? « C’est un mouton à cinq pattes qui n’existe pas. C’est dur ». L’hypothèse de la présence sur la liste du journaliste Bernard Guetta, que publicsenat.fr évoquait début novembre, reste toujours d’actualité. « C’est une hypothèse à taux de probabilité raisonnable… » selon le même responsable.

A défaut de leader pour les européennes, LREM a déjà trouvé clairement son adversaire : le Rassemblement national (ex-FN). « Le RN est le parti du mensonge », attaque Stanislas Guérini, Marine Le Pen « est capable de mentir de manière éhontée » sur le « Traité d'Aix La Chapelle ». Pas un mot en revanche sur les autres partis... LREM dessine un mano à mano avec l’extrême droite dont il a tout intérêt. Selon les sondages, le parti pourrait finir en tête. Et l’annonce d’une liste gilets jaunes pourrait faire ses affaires, en affaiblissant le RN ou FI (lire notre article sur le sujet). Mais chez LREM, on ne veut pas le reconnaître. Du moins officiellement.

Départementales, municipales : tout ou presque reste à faire sur le plan local

Les prochains scrutins locaux sont déjà en ligne de mire dans « une approche projet », lance Stanislas Guérini, dans un verbiage très start up nation. Le tandem formé du secrétaire d’Etat Sebastien Lecornu et du président du conseil départemental du Puy-de-Dôme, Jean-Yves Gouttebel, est chargé de préparer les élections départementales de 2021. Un autre (les députés Florent Boudié et Olga Givernet) planche sur les régionales de 2021. Et bien sûr les municipales de 2020. Le sénateur du Val-d’Oise, Alain Richard, est chargé de cette mission avec la députée Marie Guévenoux. A noter que les sénatoriales, qui avaient été difficiles en 2017 en raison du mode d’élection, ne sont pas évoquées.

Tout, ou presque, reste à faire sur le plan local. Pour les municipales, le parti ne peut pas se permettre d’être trop exigeant en imposant partout ses candidats encartés LREM. La doctrine fixée lorsque Christophe Castaner était à la tête du parti, reste d’actualité.

L’idée est d’avoir un « renforcement du mouvement dans certains cas, avec une liste centrée autour de nous, avec un ou une leader En Marche, là où nous avons la légitimité et l’opportunité de le faire. Et dans d’autres endroits, en constatant que des gens font un travail suffisamment en ligne avec nos idées, il ne faudra pas créer un clivage inutilement, mais chercher le rassemblement » explique Alain Richard (voir la vidéo ci-dessous). Autrement dit, LREM vise des maires de centre-droit, comme Benoist Apparu, Christophe Bechu ou Christian Estrosi. « Pas seulement de centre-droit… » ajoute l’ancien socialiste Alain Richard.

Le sénateur LREM Alain Richard explique l’objectif du parti pour les municipales
00:52

Antennes tournées vers le terrain

Pour mieux organiser le parti localement, et notamment dans les zones rurales, l’ancien ministre de l’Agriculture, Stéphane Travert, va piloter « La République ensemble », structure rassemblant les « 8.000 élus locaux » revendiqués. « Mais pas que », précise-t-il. Il s’agit d’élargir aussi aux élus proches de LREM. La structure « a vocation à créer un réseau d’élus sur lequel nous pouvons nous appuyer » pour relayer les politiques de l’exécutif ou « faire remonter leurs propositions et difficultés », explique Stéphane Travert (voir la vidéo ci-dessous).

Stéphane Travert : il faut « créer un réseau d’élus » pour LREM
00:57

« C’est la raison pour laquelle j’ai quitté le gouvernement », assure l’ancien ministre, toujours en « lien direct avec le Président ». Une manière pour Emmanuel Macron d’avoir des antennes tournées vers le terrain. Elles ont cruellement manqué à l’Elysée ces derniers mois, avant la crise des gilets jaunes. Jean-Marie Girier, ancien directeur de campagne d’Emmanuel Macron, participera aussi à la « structuration territoriale du mouvement », précise Stanislas Guérini. En campagne, qu’on vous dit.

Dans la même thématique

Rally For Palestinian Prisoners SWITZERLAND.
4min

Politique

Hungry for Palestine : le collectif en grève de la faim depuis 23 jours reçu au Sénat

Vingt-trois jours de jeûne, seize villes françaises traversées : le collectif Hungry for Palestine était au Sénat le 22 avril 2025. Tous les membres du mouvement, présents au palais du Luxembourg, sont en grève de la faim depuis le 31 mars pour dénoncer l'inaction des pouvoirs publics et le non-respect du droit international dans la bande de Gaza. Le mouvement est né de l'impulsion de soignants, tous de retour de mission à Gaza.

Le

Tondelier 2
8min

Politique

Malgré des critiques, Marine Tondelier en passe d’être réélue à la tête des Ecologistes

Les militants du parti Les Ecologistes élisent leur secrétaire national. Bien que critiquée, la sortante Marine Tondelier fait figure de favorite dans ce scrutin où les règles ont été changées. La direction s’est vue accusée par certains de vouloir verrouiller le congrès. Si les écolos ne veulent pas couper avec LFI, le sujet fait débat en vue de la présidentielle.

Le

SIPA_01208671_000002
5min

Politique

Prisons attaquées : vers une nouvelle loi pour permettre l’accès aux messageries cryptées par les services de renseignement

Après la série d’attaques visant plusieurs établissements pénitentiaires, coordonnées au sein un groupe de discussion sur Telegram, le préfet de police de Paris, Laurent Nunez regrette que la disposition de la loi sur le narcotrafic, permettant aux services de renseignement d’avoir accès aux messageries cryptées, ait été rejetée les députés. La mesure pourrait réapparaître dans une nouvelle proposition de loi du Sénat.

Le

Municipales 2026 : pourquoi le prochain mandat des maires pourrait durer sept ans, au lieu de six
4min

Politique

Municipales 2026 : pourquoi le prochain mandat des maires pourrait durer sept ans, au lieu de six

La question d’un report des élections municipales de 2032 est à l’étude au ministère de l’Intérieur, en raison de la proximité d’un trop grand nombre de scrutins, notamment la présidentielle. Si le calendrier devait être révisé, et avec lui la durée du mandat des maires élus l’an prochain, cela nécessiterait une loi. Ce serait loin d’être une première sous la Ve République.

Le