Lutte contre le communautarisme : le Sénat adopte la proposition de loi
Quatre jours après l’assassinat du professeur Samuel Paty, aux abords de son collège par un islamiste radical, le Sénat a adopté une proposition de loi déposée par la droite et le centre qui vise à inscrire dans la Constitution « la prééminence des règles de la République ».
Ce lundi, le Sénat a adopté la proposition de loi constitutionnelle visant à inscrire dans le texte fondateur de la Ve République « la prééminence des règles de la République ». Les sénateurs ont adopté le texte par 229 voix contre 0. Comme nous l'expliquions, les sénateurs des groupes de gauche (PS, PCF et écologistes) ont décidé de ne pas prendre part au vote.
Le texte ne compte que deux articles. Le premier vise à inscrire au sein de l’article 1er de la Constitution que « nul individu ou nul groupe ne peut se prévaloir de son origine ou de sa religion pour s’exonérer du respect de la règle commune », selon le texte de cette proposition de loi, cosignée par le président du groupe LR, Bruno Retailleau, celui du groupe centriste, Hervé Marseille (les deux groupes forment majorité sénatoriale) et par le sénateur LR de la Manche, Philippe Bas. Le texte entend ainsi lutter contre le communautarisme et réaffirmer le principe de laïcité. Revivez les débats en séance, avec la discussions générale :
18h35. « La loi de 1905 ne peut pas tout » affirme Bruno Retailleau
« Ce meurtre horrible de Samuel Paty percute notre agenda législatif mais il le justifie aussi (...) Nous avons bien fait d’inscrire en priorité ce combat pour la loi républicaine » s’est félicité le président du groupe LR du Sénat, Bruno Retailleau, co-auteur du texte qui a tenu à répondre au garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti qui, quelques minutes plus tôt, avait évoqué les imprécisions et l’approximation du texte.
« Le Sénat ce n’est pas le café du commerce. Le droit ce sont des précisions et évoquer les Ultramarins, les Alsaciens pour penser qu’ils pourraient constituer une menace, qui peut le croire ici ? Ce sont des arguties juridiques » a-t-il dénoncé.
Bruno Retailleau a salué « la clarification » que son texte entraînerait selon lui car « la loi de 1905 ne peut pas tout ». « Sinon, il n’y aurait pas eu en 2004, la loi sur les signes ostentatoires » a-t-il évoqué.
Son texte qui impose la prééminence de la règle commune « visera les règlements intérieurs des entreprises, des associations, des clubs sportifs qui sont souvent le foyer d’une radicalisation » a-t-il fait prévaloir. « Le moment est venu d’éradiquer l’islamisme sans aucune concession » a-t-il conclu.
18h25. Thani Mohamed Soilihi, sénateur LREM, pointe les faiblesses juridiques du texte
Thani Mohamed Soilihi, sénateur LREM, intervient sur le texte pour lutter contre le communautarisme
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Pour Thani Mohamed Soilihi, sénateur du groupe RDPI (LREM), « tout l’enjeu consiste à savoir comment animer ce réveil républicain. Par quel moyen et quel niveau d’intervention ? »
Or « à ce titre, ce texte appelle des réserves importantes. A commencer par son intitulé » selon le sénateur de Mayotte, qui s’est placé sur le plan du droit. Ainsi, « l’article 1er semble déclaratoire et satisfait par le droit constitutionnel en vigueur ». Quant à l’article 2, qui vise les partis communautaristes, « il ne semble pas non plus de nature à réaliser l’objet qu’il vise » en raison de « difficultés d’appréciation du champ de l’application de l’article ».
18h12. Claude Malhuret : « Le but des auteurs du texte est de nous proposer un sursaut »
Face à l’islamisme radical, le président du groupe Indépendants du Sénat, Claude Malhuret a fustigé « les lâchetés puissamment aidées par le cœur des pleureuses du camp du bien, des victimocrates et des indignés professionnels, prêts à bondir sur toutes les mesures de fermeté en criant à la discrimination et à la stigmatisation ».
Le président du groupe Indépendants du Sénat, Claude Malhuret a indiqué qu’il voterait la proposition de loi constitutionnelle. Toutefois, il a reconnu que ce texte répondait à un objectif « lointain » car pour être adopté, il devrait passer par une révision de la Constitution par la voie d’un référendum. « Alors que depuis vendredi, les Français attendent des actes plus que des lois. Mais l’objectif de ses auteurs (du texte) n’est sans doute pas seulement là. Il est de nous proposer un sursaut, de réveiller face au danger un pays qui s’assoupit dans ce domaine comme dans d’autres ».
18h08. Stéphane Ravier (RN) dénonce « le caractère massif de l’immigration »
Selon le sénateur RN des Bouches-du-Rhône, Stéphane Ravier, « l’islamisme a encore de beaux jours devant lui », en raison du « caractère massif de l’immigration ». Dénonçant « le montre islamiste », il appelle à agir. « Aux armes sénateurs, aux armes Monsieur le ministre, aux armes de la loi » a lancé le seul sénateur membre du Rassemblement national.
18h00. Patrick Kanner : « Votre proposition de loi constitutionnelle, ne vous en déplaise, correspond à votre agenda »
Patrick Kanner, président du groupe socialiste au Sénat n’est pas favorable à la proposition de loi constitutionnelle visant à garantir la prééminence des Lois de la République. « Je sais que les revendications communautaires sont une réalité, mais je ne partage pas l'idée que nous ne serions pas armés pour y faire face »
Il assure que « ce qui manque » ce ne sont pas de nouvelles règles, « elles existent déjà » mais « c’est parfois le courage politique de les faire appliquer. » Ajoutant que le « but affiché » de cette loi « n’est pas l’efficacité mais l’affichage. » Pour le sénateur PS du Nord, cette proposition de loi aurait « nécessité l’établissement d’un diagnostic sur les textes en vigueur » assurant que la majorité sénatoriale devrait être préoccupée par la rédaction « d’un texte normatif, clair dans ses principes et juridiquement solide » pour le juge.
Patrick Kanner a déclaré : « Puisque la déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen existe, puisque que la Constitution existe puisque que ces lois existent, il n’est pas nécessaire de les rendre bavardes, notre seul impératif est de les appliquer. Ces textes sont la force de notre démocratie, la force de notre Etat de droit et il constitut l’antidote aux totalitarismes les plus divers. Mes chers collègues de la majorité sénatoriale, votre proposition de loi constitutionnelle, ne vous en déplaise, correspond à votre agenda, dans un temps donné. Mais le temps a changé. »
Le groupe socialiste a décidé de ne pas prendre pas part au vote de la proposition de loi constitutionnelle.
17h50. Nathalie Goulet : « Les Français sont très en colère »
Nathalie Goulet: « Les Français sont très en colère »
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Nathalie Goulet, sénatrice UDI de l’Orne et spécialiste des questions de radicalisation a commencé par un rappel de tous les rapports rédigés par le Sénat sur le sujet : « Nous avons commis 12 commissions d’enquête et missions d’information sur le sujet (…) donc le constat est fait. Je tiens à votre dispositions 40 pages de préconisations que nous avons fait les uns et les autres. Comment expliquer aux français qu’il faille attendre qu’un enseignant soit décapité pour expulser 231 personnes déjà en situation d’expulsion ? Comment expliquer l’incapacité de nos services à expulser les indésirables, délinquants fauteurs de trouble ? (…) Comment laisser les prêcheurs étrangers venir chaque année renforcer le nombre d’imams ? (…) »
Selon la sénatrice de l’Orne, « la main droite envoie nos soldats protéger l’Afrique de l’ouest des terroristes alors que la main gauche accepte sur notre territoire un certain nombre de prêcheurs de haine ». Nathalie Goulet a également interpellé le Garde des Sceaux sur la question des Frères musulmans : « l’interdiction des Frères musulmans est un sujet qu’il faudra aussi traiter ».
Enfin la sénatrice de l’Orne a rappelé l’état d’esprit au sein de la population : « les Français sont absolument bouleversés mais ils sont aussi très en colère et outre les discours et les promesses il faut que dans les semaines qui viennent des dispositions fortes soient prises et directement appliquées parce que ce qui est arrivé il y a quelques jours est un drame mais c’est aussi une disposition qui peut mettre la France
17h45. Eliane Assassi (PCF) : « La mouvance islamo-radicale est une plaie pour la liberté, la démocratique, la laïcité, la République »
Texte de lutte contre le communautarisme : "Une mesure de sauvegarde républicaine" selon Ph.Bas
00:51
A l’image du reste de la gauche, le groupe communiste a demandé « que ce débat soit reporté » afin de débattre du sujet de manière plus apaisée (lire notre article sur le sujet). Car l’émotion est grande après l’assassinat de Samuel Paty. « Hier, j’étais présente au rassemblement parisien (en hommage) » a expliqué Eliane Assassi, qui « regrette que certains aient brillé par leur absence ».
« L’Islam radical, car il faut effectivement savoir nommer les choses, doit être combattu pour ce qu’il est, en évitant les amalgames racistes et antimusulmans que certains se plaisent à distiller » souligne Eliane Assassi, ajoutant que « la mouvance islamo-radicale est une plaie pour la liberté, la démocratique, la laïcité, la République » et au final « une idéologie fascisante ».
Pour la communiste, il faut reconquérir « les territoires abandonnés de la République », « non pas par un Etat autoritaire, mais par un Etat fort de ses services publics ». Mais face à ce texte, « nous ne prendrons pas part au débat, ni au vote sur cette proposition de loi, qui nous semble aujourd’hui inapproprié et qui aurait pu être reportée » ajoute encore la sénatrice de Seine-Saint-Denis.
17H32. Une proposition de loi « imprécise » et « trop approximative » pour Éric Dupond-Moretti
Après avoir lui aussi rendu hommage à la mémoire de Samuel Paty, sans surprise, le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, s’est montré très critique sur la proposition de loi. « Si je partage la nécessité et l’urgence du combat que vous menez pour assurer la prééminence des lois de la République, je ne suis pas convaincu par la justesse, la rigueur juridique et l’utilité de la proposition qui nous ait soumise » a-t-il expliqué évoquant « l’ambiguïté » d’un texte qui pourrait entraîner bon nombre de « polémiques ».
Une proposition de loi « trop imprécise dans ses termes » et « trop approximative dans ses objectifs au risque de porter une atteinte à la liberté de conscience » a-t-il estimé. « En interdisant toute exonération à la règle commune, voulez-vous mettre fin au régime concordataire d’Alsace-Moselle ? (…) Voulez-vous prohiber les dérogations alimentaires aujourd’hui permises par notre droit au bénéfice de personnes de confession juive ou musulmane ? Voulez-vous supprimer les clauses de consciences médecins, souvent inspirées de conviction religieuse, notamment en matière d’avortement ? » a-t-il interrogé.
En ce qui concerne le respect du principe de « laïcité » que les auteurs de la proposition de loi veulent imposer aux partis politiques, le ministre a cité « le parti démocrate chrétien qui a tant apporté à, la République ». « Si votre objectif est le renforcement de la laïcité, la lutte contre les dérives séparatistes, ce texte ne le permettra pas » a-t-il conclu.
17h20. Christophe-André Frassa : « Cet assassinat nous oblige »
Le rapporteur LR du texte, Christophe-André Frassa rappelle les enjeux de la proposition de loi constitutionnelle visant à inscrire « la prééminence des règles de la République » dans la Constitution.
17h10. Philippe Bas : « La République est minée par le poison toxique de l’islamisme radical »
Philippe Bas, co-auteur de la proposition de loi, a ouvert la discussion générale en évoquant directement le contexte particulier dans lequel elle est examinée, après l’assassinat de vendredi dernier. « La République vient d’être frappée à travers un homme, un professeur, Samuel Paty, qui avait voué sa vie d’enseignant à défendre les valeurs que nous avons en partage » a souligné l’ancien président de la commission des lois. « Ce crime barbare est une blessure pour chaque Français » ajoute le sénateur LR de la Manche, « ce qui est attaqué à travers cette abomination, c’est la générosité de l’esprit français hérité des Lumières, c’est l’esprit de liberté et de tolérance ».
Philippe Bas appelle dans ces conditions à « un sursaut républicain ». « La République est minée par le poison toxique de l’islamisme radical » dénonce le sénateur, qui ajoute : « Comme l’a démontré Jacqueline Eustache-Brinio dans le rapport de notre commission d’enquête sur la radicalisation, il s’agit en réalité d’un projet totalitaire. (…) Et il comporte dans sa forme extrême une dimension terroriste ».
« En France vivent paisiblement plusieurs millions de compatriotes musulmans » ajoute Philippe Bas. « Ces Français, rien ne saurait les distinguer des autres citoyens au regard de la loi. Ils ne doivent ni se retrancher d’eux-mêmes de la communauté nationale, ni en être retranchés par ceux qui amalgament religion musulmane et idéologie criminelle des djihadistes » souligne le co-auteur de la proposition de loi.
« Pour résoudre ce défi de la cohésion nationale », Philippe Bas renvoie à « une méthode simple » : « le principe de laïcité ». Mais « trop de décideurs, publics et privés, s’y laissent prendre en acceptant des concessions » estime le sénateur. Il ajoute :
Un coup d’arrêt doit être donné aux pratiques qui se sont répandues insidieusement dans tous les domaines de la vie sociale.
Pour l’ancien secrétaire général de l’Elysée de Jacques Chirac, « il s’agit d’une action méthodique de subversion des principes républicains. Il serait illusoire d’imaginer que la voie de la conciliation et du compromis pourrait conduire à neutraliser ce projet. Respect pour les religions, oui ! Complaisance face à la radicalité politique, non ! »
Si le gouvernement prépare un texte, il « n’est véritablement pas à la hauteur de l’enjeu ». C’est pourquoi il souhaite inscrire dans la Constitution le principe selon lequel « nul individu, nul groupe ne peut se prévaloir de ses origines ou de ses croyances pour s’exonérer du respect de la règle commune ». « L’inscription de ce principe dans notre loi fondamentale est une nécessité politique, une mesure de sauvegarde républicaine » selon Philippe Bas. S’il s’agit de modifier la Constitution, le sénateur souligne bien que le texte a une portée très concrète, afin d’aider les maires, proviseurs ou chef d’entreprise à réagir quand « les revendications islamistes s’expriment ».
La proposition de loi avait déjà été discutée en commission en 2015, mais « sans aboutir. Depuis, les esprits ont mûri et le texte dont nous débattons aujourd’hui a été déposé en février dernier » souligne Philippe Bas. « Si l’Assemblée Nationale n’y fait pas obstacle – car elle détient ici le pouvoir d’empêcher – c’est le Peuple français lui-même qui proclamera ce nouveau principe constitutionnel en se prononçant par référendum », que les sénateurs LR appellent de leurs vœux.
17h.Gérard Larcher : « Nous, parlementaires, devons contribuer à une réponse ferme de la République à la hauteur du danger »
En début de l'examen de la proposition de loi qui vise à inscrire dans la Constitution « la prééminence des règles de la République », le président du Sénat, Gérard Larcher est revenu sur l’attentat commis vendredi soir qui a coûté la vie d’un enseignant, Samuel Paty. « La République a été attaquée une nouvelle fois vendredi dernier, à Conflans-Sainte-Honorine. Le terrorisme islamiste s’en est pris à l’un de ses serviteurs, Samuel Paty, un professeur d’histoire-géographie, assassiné dans des conditions barbares pour avoir enseigné la liberté de penser, la liberté d’écrire, la liberté de caricaturer, assassiné pour avoir enseigné que nous sommes une société de liberté qui refuse la haine. Samuel Paty a été pris pour cible pour avoir porté les valeurs de la République » a-t-il déclaré avant d’exprimer « au nom du Sénat sa compassion et son soutien à la famille de Samuel Paty ».
Je tiens également à assurer de notre solidarité et de notre soutien l’ensemble de la communauté enseignante de notre pays, profondément affectée par ce terrible assassinat.
Gérard Larcher a estimé que « la République était en danger, comme elle l’a rarement été ».
J’entends que nous sommes à « un tournant ». Quel est donc ce tournant ? Tuer des enfants à Toulouse n’était-ce pas déjà un tournant ? Assassiner des journalistes n’était-ce pas un tournant, égorger un prêtre dans son église, tuer un policier et sa conjointe à leur domicile, à chaque fois c’était un tournant. Est-ce que nous ne tournons pas sur nous-mêmes ? » s’est-il interrogé.
« Nous, parlementaires, devons contribuer à une réponse ferme de la République à la hauteur du danger. Nous le devons aussi à la mémoire de Samuel Paty, nous ne devrons plus accepter d’accommodement : La laïcité pleine et entière, l’état de droit partout et pour tous » a-t-il conclu avant une minute de recueillement de l’ensemble des sénateurs.
La réunion à l’Elysée n’a pas abouti sur un accord. Mais avec des lignes rouges qui peuvent paraître très éloignées, la sortie de crise semble encore lointaine. Un début de rapprochement émerge cependant sur la méthode, autour du non-recours au 49.3.
Depuis la chute de Bachar Al-Assad, certaines déclarations de responsables politiques conciliant avec le régime dictatorial refont surface. En octobre 2015 par exemple dans l’émission « Preuves par 3 » sur Public Sénat, Jean-Luc Mélenchon estimait que les bombardements russes et syriens faisaient partie d’une guerre nécessaire contre les rebelles.
Reçus par Emmanuel Macron ce mardi, avec d’autres formations politiques à l’exception de LFI et du RN, socialistes et écologistes se sont engagés, s’ils accèdent au pouvoir, à ne pas utiliser le 49.3 à condition que les oppositions renoncent à la motion de censure. « Ça a été repris par Horizons, par le MoDem », a assuré Olivier Faure, le Premier secrétaire du PS.
À la sortie d’une réunion avec les partis, hors LFI ou RN, le patron des députés de la Droite républicaine insiste à nouveau sur la nécessité d’aboutir à un accord de non-censure pour qu’un gouvernement survive. Il maintient sa ligne rouge : la droite ne veut ni ministres issus de la France insoumise, ni application du programme du Nouveau Front populaire.
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Présentation des conclusions des états généraux de l'information
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