Chaque semaine son ralliement socialiste à Macron. Le leader d’« En marche ! » continue à profiter des ralliements de socialistes tendance sociale-démocrate ou sociale-libérale. Pas à l’aise avec la campagne de Benoît Hamon, trop à gauche à leurs yeux, ils ne cachent plus leur tentation de voter ou de rejoindre Emmanuel Macron.
Bertrand Delanoë est la dernière prise d’Emmanuel Macron. L’ancien maire PS de Paris, retiré de la vie politique, a annoncé ce matin sur France Inter son intention de voter Macron, « le candidat qui se rapproche le plus de mes convictions de socialiste, réformiste, Européen, réaliste ».
« L’ancien maire de Paris soutient Emmanuel Macron, mais l’actuelle maire de Paris, Anne Hidalgo, soutient Benoît Hamon »
Interrogé par Public Sénat/LCP-AN après son discours devant l’Assemblée des départements de France, Benoît Hamon a fait une réponse courte, mais plutôt cinglante. « L’ancien maire de Paris soutient Emmanuel Macron, mais l’actuelle maire de Paris, Anne Hidalgo, soutient Benoît Hamon ». Regardez :
Benoît Hamon réagit au soutien de Delanoë à Emmanuel Macron
Toujours sur notre antenne, Emmanuel Macron s’est lui évidemment « félicité ». « C’est un homme politique pour lequel j’ai un profond respect », a affirmé le candidat, « c’est un soutien d’une nature très exceptionnelle, très rare et j’y accorde beaucoup de valeur ». Electorale ?
Macron sur le soutien de Delanoë: " j’y accorde beaucoup de valeur"
Les « camarades » du PS continuent donc de mettre des bâtons dans les roues de la caravane Hamon. La veille, c’est le président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone, qui prenait ses distances. « Dans l'état actuel des choses, j'ai du mal à (me) reconnaître » dans la campagne de Benoît Hamon a-t-il confié au Monde. Jean-Marie Le Guen avait déjà ouvert le bal la semaine précédente, après le député PS Christophe Caresche, qui avait lui carrément annoncé son soutien clair et net à Macron.
« Hug » et « preuves d’amour »
Un autre membre du gouvernement, estampillé hollandais et qui reste dans le doute, affirmait la semaine dernière à publicsenat.fr que le candidat devrait « se recentrer un peu, faire des gestes ». « On a besoin de preuves d'amour ! », a lancé dans le JDD le ministre de la Ville Patrick Kanner. « Hamon n’a pas le temps de le recevoir pour lui faire un hug… » ironise le député PS Alexis Bachelay, co-animateur de la permanence présidentielle de Benoît Hamon, interrogé par publicsenat.fr.
Le patron du PS, Jean-Christophe Cambadélis, a tenté de calmer l’ambiance hier, tout en sanctionnant une dizaine d’élus pour leur ralliement… « Je dis à tout le monde : gardez votre sang-froid. Il faut prendre le temps que la campagne s'installe », a-t-il affirmé, invité de l'Epreuve de vérité sur Public Sénat (avec Les Echos/Radio classique/AFP). Le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, lui-même dans le doute, a mollement affirmé que « le gouvernement devait rester un lieu de débat et de cohésion ». Mais on parle déjà d’une nouvelle recrue de poids chez Macron. Le prochain sur la liste pourrait bien être le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian.
Cambadélis sanctionne les élus PS qui parrainent Macron
« Ce qui intéresse Macron, c’est de créer un feuilleton »
On voit bien que les ralliements qui se succèdent pourraient polluer la campagne de Benoît Hamon jusqu’au premier tour. « C’est peut-être fait pour ça » affirme Alexis Bachelay. Le député ajoute : « Les parlementaires inconnus sont déjà partis vers Macron et ça ne crée pas deux lignes dans le journal. Ce qui intéresse Macron, c’est de créer un feuilleton. Et peut-être que Bertrand Delanoë, c’est le début du feuilleton ».
Selon Alexis Bachelay, le candidat d’« En Marche ! » est à la manœuvre pour attirer à lui les âmes en déshérence. « J’ai des collègues députés qui ont été appelés personnellement par Emmanuel Macron sur le thème "j’ai besoin de toi". Macron est dans une course assidue en direction de tout ce qui peut ressembler de près ou de loin à un responsable du PS. La vérité, c’est qu’il approche tout le monde » ajoute Alexis Bachelay, qui voit cependant de quoi se rassurer : « On sait qu’il y a pas mal de parlementaires entre deux eaux. Donc certains attendront de voir ce qui se passe à l’élection présidentielle. Ce qui est bon signe. Cela montre qu’ils ne sont pas sûrs de leur coup, pas sûrs que Macron va gagner ». Un parlementaire sait bien que les législatives seront le juge de paix : « Si Macron n’est pas au deuxième tour, ils resteront bien au chaud au bercail, au PS, avec leur investiture… »
27 sénateurs PS ont parrainé Hamon, 11 Macron
Au groupe socialiste du Sénat, qui comptait une majorité de soutiens à Manuel Valls pendant la primaire, ce n’est pas encore les grands départs vers Macron. Selon notre décompte – encore provisoire – des parrainages reçus par le Conseil constitutionnel, 11 des 108 sénateurs PS ont pour le moment envoyé leur formulaire pour Emmanuel Macron, quand 27 l’ont fait pour Benoit Hamon. 3 sénateurs du groupe écologiste ont par ailleurs donné leur parrainage au candidat PS. Le candidat d’« En marche ! » a lui reçu également 6 parrainages du groupe RDSE (5 PRG et 1 guériniste de la Force du 13) et 2 Modem.
Reste que la situation est compliquée pour Benoît Hamon. Le parti est toujours sous tension. La réunion des vallsistes, la semaine dernière à l’Assemblée, à peine deux heures après la réunion des parlementaires PS avec Hamon, a été mal perçue dans l’équipe de campagne. « C’est complètement déplacé. On n’imagine pas Martine Aubry avoir fait ça pendant la campagne de 2012. Réunir ses amis dans une salle, c’est 3615 code j’existe » tacle Alexis Bachelay, qui parle de « manque d’élégance et même de loyauté. Beaucoup de ces gens-là sont candidats aux législatives pour le PS ».
« Séquence programme »
Pour reprendre la main et faire oublier les ralliements à Macron, Benoît Hamon entend ouvrir une « séquence programme ». Elle commencera jeudi, avec les 2h30 de L’Emission politique de France 2 et cumulera avec un grand meeting à Bercy, le dimanche 19 mars. Entre deux, le programme finalisé pourrait être présenté la semaine prochaine, selon une forme qui reste à déterminer. Comme il l’a fait sur le revenu universel, Benoît Hamon pourra affiner certaines propositions – peut-être sur l’Europe et le traité budgétaire européen – voire en annoncer d’autres…