Maintien de l’ordre : pourquoi Gérald Darmanin souhaite « regarder » les subventions de la Ligue des droits de l’Homme ?
Lors de son audition devant la commission des lois du Sénat sur les débordements des dernières manifestations, Gérald Darmanin a laissé entendre qu’une remise en cause des subventions de la Ligue des Droits de l’Homme pouvait être envisagée. Il s’est appuyé notamment sur un arrêté de la préfète des Deux-Sèvres contestée en justice par l’association.
Menace ou réaction improvisée à une question d’un sénateur ? Devant la commission des lois, Gérald Darmanin s’en est pris à Ligue des droits de l’Homme.
Le ministre revenait sur les violents affrontements entre « l’ultragauche » et les forces de l’ordre, lors des manifestations contre la réforme des retraites et contre la construction d’une mega-bassine à Sainte-Soline dans les Deux-Sèvres. Sur ce dernier évènement, le ministre a glissé une première critique à la Ligue des droits de l’Homme (LDH).
Il a d’abord rappelé que la préfète des Deux-Sèvres avait pris des arrêtés d’interdiction de manifester mais aussi des arrêtés d’interdiction de transport d’armes. « Sachez que cet arrêté d’interdiction de transport d’armes, qui semble frappé du coin du bon sens, a été attaqué au tribunal par la Ligue des droits de l’Homme. Le tribunal administratif a validé fort heureusement le travail de la préfète des Deux-Sèvres. C’est pour vous dire dans quel état d’esprit un certain nombre de personnes étaient, en vue de cette manifestation », indique-t-il.
De quel arrêté est-il question ?
Précisons ici, qu’il s’agit de deux arrêtés contestés en justice par la LDH mais aussi par l’UDCGT79, Solidaires 79 et la Confédération paysanne. Un arrêté portait sur l’interdiction de la circulation des engins agricoles. L’autre visait à interdire « le port et le transport d’armes, toutes catégories confondues, de munitions et d’objets pouvant constituer une arme au sens de l’article 132-75 du code pénal, du lundi 20 mars au lundi 27 mars ». Dans les motifs de l’arrêté, la préfète rappelle « qu’il y a lieu de réglementer le port et le transport d’armes et d’objets pouvant constituer une arme par destination ». Car « lors d’actions antérieures, les manifestants étaient armés d’outils, utilisés notamment pour démonter du matériel d’irrigation, et de projectiles qui ont été lancés sur les forces de l’ordre ».
« Il faut cesser de financer des associations qui mettent en cause gravement l’Etat », demande un sénateur LR
Qu’à cela ne tienne, cette première déclaration du ministre a fait réagir le sénateur LR, François Bonhomme qui s’est attaqué alors à ce qu’il nomme « les observateurs autoproclamés des pratiques policières issus de la Ligue des droits de l’Homme et du Défenseur des droits ». « Ça pose des questions, le Défenseur des droits est financé par fonds publics et à un statut indépendant et s’autosaisit comme bon lui semble. La Ligue des droits de l’Homme est financée sur fonds publics. Il faut cesser de financer des associations qui mettent en cause gravement l’Etat […] Ces associations n’ont rien à voir avec l’Etat de droit quoiqu’elles en disent », a-t-il martelé.
Pris quelque peu au dépourvu par la diatribe du sénateur du Tarn-et-Garonne, Gérald Darmanin reconnaît « ne pas connaître les subventions de l’Etat à la Ligue des droits de l’Homme ».
« Effectivement, ça mérite d’être regardé. Mais, je rappelle que beaucoup de collectivités locales les financent », souligne-t-il.
Rappelons également qu’après les affrontements de Sainte-Soline, Patrick Baudouin, le président de la LDH, avait affirmé, enregistrement à l’appui, que l’arrivée des secours avait été entravée par les forces de l’ordre. Une « fake news » pour Gérald Darmanin qui a regretté « 5 jours d’insultes et d’atteintes à l’honneur des gendarmes ».
Sur Twitter, la réponse de la Ligue des droits de l’homme aux propos de Gérald Darmanin ne s’est pas fait attendre. « Monsieur Darmanin, nos infos financières sont en ligne », rappelle la LDH, qui renvoie également le ministre au formulaire internet qui permet d’effectuer un don à l’association. « Les actions qui ont pu être menées par la LDH depuis plus de 120 ans sont la défense des droits et libertés de toutes et tous, ne vous en déplaise, en particulier la défense de la liberté de manifester mise à mal par votre politique de maintien de l’ordre », ajoute l’organisme.
Dans un communiqué publié en fin de journée, la LDH indique avoir « formé un recours de principe en référé-liberté contre les arrêtés pris par la préfète des Deux-Sèvres et le préfet de la Vienne prévoyant l’interdiction d’armes par destination ». « La LDH contestait la définition choisie, qui méconnaissait la jurisprudence du Conseil constitutionnel refusant l’extension a priori de la notion d’arme à tout objet pouvant être utilisé comme projectile. Dans le cadre limité qui est le sien, le juge des référés n’a pas donné droit à cette demande de la LDH, mais celle-ci saisit le tribunal administratif au fond », précise l’association.
« Quel message veut envoyer Gérald Darmanin, que la Ligue des droits de l’Homme est une organisation terroriste ? »
« La droite sénatoriale a le droit, dans une logique de polémique, de chercher ce qui peut fâcher. Mais que le ministre de l’Intérieur puisse envisager, même de très loin, de menacer les financements d’une association qui a été créée en 1898, pendant l’affaire Dreyfus… Permettez-moi de penser que l’on est en train de dépasser les bornes ! », s’est agacé Patrick Kanner, le président du groupe socialiste au Sénat, sur Public Sénat quelques heures après l’audition du minsitre.
Le président du groupe écologiste du Sénat, Guillaume Gontard a quant à lui dénoncé « la pression du ministre de l’Intérieur sur une association qui n’est pas n’importe laquelle. Quel message veut envoyer Gérald Darmanin, que la Ligue des droits de l’Homme est une organisation terroriste ? », s’est-il interrogé.
En mobilisant ses troupes ce week-end, le candidat à la présidentielle rappelle qu’il est déjà tourné vers 2027, tout en marquant sa différence, quitte à sérieusement prendre ses distances avec François Bayrou. Un tour de chauffe à destination aussi des militants.
A quelques jours du verdict dans l’affaire des assistants parlementaires du RN, le Conseil constitutionnel se prononce sur une question prioritaire de constitutionnalité en lien avec les peines d’inéligibilité. Si la décision pourrait influencer les magistrats, le lien avec l’affaire concernant Marine Le Pen n’est pas évident.
Invitée de la matinale de Public Sénat, la secrétaire nationale des écologistes, Marine Tondelier revient sur les moyens de financer une augmentation du budget de la défense. Cette dernière plaide pour un recours à l’impôt plutôt qu’à une réduction des dépenses sociales.
Alors que la droite et Renaissance n’ont pas officiellement désigné de prétendant à la mairie de Paris, le sénateur LR de Paris Francis Szpiner a déclaré sa candidature ce jeudi. Incertains sur le cas Rachida Dati, sur les relations avec le camp présidentiel et même sur le mode de scrutin, la droite parisienne temporise à un an du scrutin.