Marine Le Pen condamnée : « À droite et à l’extrême droite, il y a une tendance à instrumentaliser les décisions de justice à des fins politiques », dénonce Laurence Rossignol

Pour la sénatrice socialiste, la condamnation de la cheffe de file du RN à une peine d’inéligibilité avec exécution provisoire est justifiée par un risque de récidive. Alors que des voix s’élèvent à droite pour demander une évaluation, voire une modification, de la loi Sapin II, Laurence Rossignol dénonce un débat « toxique ».
Rose-Amélie Bécel

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Après la condamnation de Marine Le Pen à quatre ans de prison et cinq ans d’inéligibilité, les réactions internationales s’enchaînent. Dernière en date, celle de Donald Trump, qui a appelé sur son réseau Truth Social à la « libération » de la cheffe de file du Rassemblement national, en dénonçant une « chasse aux sorcières ».

« Je ne sais pas si du point de vue de Marine Le Pen ces soutiens sont vraiment efficaces, le jour où Donald Trump annonce qu’il va imposer à l’Europe des barrières douanières de 20 %. Le fait qu’une responsable politique française soit liée à celui qui agresse la France, pose des tas de questions sur le patriotisme du RN », remarque la sénatrice socialiste Laurence Rossignol, sur le plateau de Parlement Hebdo.

Procès de Marine Le Pen en appel, dès l’été 2026 : « C’est à ses risques et périls »

Avant le président des Etats-Unis, Viktor Orbán et le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov ont été parmi les premiers à apporter leur soutien à Marine Le Pen. « Quand on regarde le profil des soutiens, c’est ce qui doit nous inquiéter. Cet emballement international doit nous interpeller sur ce que l’on veut pour notre pays en termes de démocratie », s’inquiète le député Paul Christophe, président du groupe Horizons à l’Assemblée nationale.

En France, la condamnation de Marine Le Pen ouvre un débat sur la question de l’exécution provisoire. En attente de son procès en appel, la députée RN se voit en effet déclarée immédiatement inéligible, ce qui pourrait compromettre sa candidature à l’élection présidentielle de 2027. Dans un communiqué, la cour d’appel de Paris a déjà annoncé qu’elle envisageait « une décision à l’été 2026 », ce qui permettrait à Marine Le Pen d’être candidate en 2027, si l’exécution provisoire de sa peine est suspendue.

« C’est ce que souhaite Marine Le Pen, mais c’est à ses risques et périls », souligne Laurence Rossignol. « Si ça peut nous épargner une campagne constante du RN, pendant deux ans, avec les mêmes mensonges qu’aujourd’hui, pourquoi pas une décision plus rapide », ajoute-t-elle. « Ce n’est pas forcément lui faire un cadeau, mais c’est important que cette question soit purgée le plus rapidement possible », remarque également Paul Christophe.

« On a là exactement des gens qui sont prêts à la récidive »

En soutien à Marine Le Pen, le député Éric Ciotti a annoncé qu’il déposerait une proposition de loi pour faire supprimer l’exécution provisoire en cas de condamnation à une peine d’inéligibilité. « On est dans une réaction assez primaire, à chaque fois qu’on a légiféré sous le coup d’une actualité, je ne suis pas sûr qu’on ait rempli notre mission », remarque Paul Christophe. « À droite et à l’extrême droite, il y a une tendance à instrumentaliser les décisions de justice à des fins politiques », dénonce de son côté Laurence Rossignol, évoquant l’affaire Fillon et les procès de Nicolas Sarkozy.

Pour la sénatrice socialiste, l’exécution provisoire reste par ailleurs pleinement justifiée, en raison du risque de récidive du RN : « Quand je regarde la défense du RN, je me dis qu’on a là exactement des gens qui sont prêts à la récidive, puisqu’ils n’ont aucune conscience de ce qu’ils ont fait. Ils n’ont pas un mot d’excuse pour les Européens à qui ils ont volé de l’argent ! »

À droite, d’autres voix s’élèvent, plus modérées, pour demander une évaluation de la loi Sapin II. « Il faut évaluer la loi et ses conséquences, voir si cette loi doit être revue et adaptée », a souligné Gérard Larcher, ce 3 avril au micro de Public Sénat. « C’est le Parlement qui décidera si, oui ou non, il faut toucher à l’écriture de la loi », a de son côté avancé François Bayrou, après s’être dit « troublé » par la condamnation de Marine Le Pen.

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