Matignon ferme la porte à un impôt sur le revenu pour tous

Matignon ferme la porte à un impôt sur le revenu pour tous

A peine évoquée, déjà enterrée. Matignon a fermé la porte dimanche à la proposition de la ministre Jacqueline Gourault de faire...
Public Sénat

Par Gaëlle GEOFFROY

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A peine évoquée, déjà enterrée. Matignon a fermé la porte dimanche à la proposition de la ministre Jacqueline Gourault de faire payer l'impôt sur le revenu à tous les Français, y compris les plus modestes, une idée vivement critiquée par l'ensemble de l'opposition.

En plein grand débat censé répondre à la crise des "gilets jaunes", et "pour recréer le lien entre citoyen et impôt", la ministre de la Cohésion des territoires y voit une piste de sortie, alors que moins d'un ménage sur deux (43%) s'acquitte de cet impôt aujourd'hui.

"Chacun pourrait contribuer à la hauteur de ses moyens, y compris les plus modestes, même de manière très symbolique", ne serait-ce qu'"un euro", a-t-elle expliqué dans Le Journal du Dimanche, tout en se prononçant pour une réflexion sur "la contribution que devraient apporter les très hauts revenus", via par exemple une nouvelle tranche d'impôt.

Mais droite et gauche ont vivement réagi, dénonçant tout à la fois un concours Lépine des idées en matière de fiscalité, une ministre qui oublie que les plus modestes s'acquittent déjà de la TVA ou de la CSG, et un manque de volonté gouvernementale de s'attaquer au contraire à l'évasion fiscale.

Depuis le salon de l'Agriculture où il était en visite, François-Xavier Bellamy, tête de liste Les Républicains pour les européennes, a appelé le gouvernement à "arrêter avec cet espèce de jeu d'inventivité fiscale" et à plutôt "baisser" les impôts, au vu de "la crise de pouvoir d'achat" actuelle.

Si la ministre place le sujet sur le terrain de la symbolique, l'impôt sur le revenu pour tous "peut-être intéressant" mais seulement "en miroir" d'un autre impôt symbole, "le rétablissement de l'ISF par exemple", réclamé par les "gilets jaunes", a remarqué Sébastien Chenu, porte-parole du Rassemblement national, sur BFMTV.

A gauche, la tête de liste La France insoumise pour les européennes Manon Aubry a souligné dans un tweet que "faire payer à tous l'impôt sur le revenu sans le rendre plus progressif (en le passant de 5 à 14 tranches comme à sa création) n'aurait aucun sens".

- "Main tremblante" -

La piste évoquée par la ministre, en réalité une arlésienne qui revient depuis des années, a fait réagir jusque dans les rangs de la majorité. "Luttons contre l'évasion fiscale, taxons les rentes et les GAFA. Mais pas de mesure qui accentue" le "sentiment d'injustice fiscale" entre "gros" et "petits", a tweeté le député LREM Aurélien Taché.

De fait, Matignon a rapidement tranché dimanche, dix jours après le retour dans le débat de la taxe carbone qui avait aussi provoqué de vives réactions, conduisant déjà Emmanuel Macron à recadrer le débat.

"La piste d'un impôt sur le revenu universel n'est pas à l'étude", a ainsi indiqué à l'AFP l'entourage du Premier ministre. "Les Français payent déjà l'impôt dès le premier euro avec la CSG. Tous payent la TVA", a-t-on rappelé, et l'exécutif s'est engagé à "baisser" les impôts. L'impôt sur le revenu a rapporté 77 milliards d'euros en 2017, contre 188 milliards à la TVA.

A trois trois semaines de la fin du grand débat, le sujet de la "justice fiscale", un des quatre thèmes du grand débat national, reste toutefois au coeur des revendications de nombreux "gilets jaunes".

L'équation "ne se résoudra pas en quelques semaines, mais l'avantage du grand débat c'est qu'il peut permettre d'ouvrir des chantiers de longue haleine", a noté François Bayrou, président du MoDem, allié de la majorité, dimanche dans l'émission Grand Jury RTL/Le Figaro/LCI.

Il faut selon lui "une remise à plat" de la fiscalité, autour d'une "vision": "un impôt qui soit très large et équitable en bas de l'échelle des revenus et en haut de l'échelle des revenus".

Le commissaire européen aux Affaires économiques Pierre Moscovici a, lui, conseillé de "ne pas trop toucher à la fiscalité ou de le faire avec une main tremblante". En tout cas, "vous ne rétablirez pas le consentement pour les plus pauvres s'il y a le sentiment que les plus riches ne payent pas", a-t-il dit sur Europe 1/CNews/Les Echos.

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