Mélenchon prend le risque politique d’assumer ses colères
La virulente sortie de Jean-Luc Mélenchon contre France 2 et sa volonté d'instaurer un "tribunal" des médias illustre sa conviction que des...

Mélenchon prend le risque politique d’assumer ses colères

La virulente sortie de Jean-Luc Mélenchon contre France 2 et sa volonté d'instaurer un "tribunal" des médias illustre sa conviction que des...
Public Sénat

Par Lucile MALANDAIN

Temps de lecture :

2 min

Publié le

La virulente sortie de Jean-Luc Mélenchon contre France 2 et sa volonté d'instaurer un "tribunal" des médias illustre sa conviction que des colères ciblées servent sa cause politique, au risque de compromettre ses chances d'élargir son électorat.

La "hargne caractérielle" de Nathalie Saint-Cricq, les "liens familiaux et communautaires politiques" d'une Léa Salamé qui "glapit en pleine hystérie", "l'équipe d'arsouilles de France 2": dans sa longue note de blog lundi, le patron des députés de La France insoumise n'épargne aucun des intervenants de "l'Emission politique" à laquelle il a participé le 30 novembre.

Entre deux mots qui claquent pour éreinter ce qu'il appelle "une manœuvre politicienne sous déguisement journalistique", il plaide pour la création d'un "tribunal professionnel" distribuant des "sanctions symboliques" aux journalistes "menteurs".

Avalanche de critiques sur les réseaux sociaux - y compris auprès de personnes se réclamant Insoumis - mais avalanche aussi de soutiens: la stratégie du "rendre coup pour coup" a, selon ses proches, servi la cause.

Le lendemain, dans la pétition lancée pour défendre cette idée, le terme "tribunal" est néanmoins transformé en un "conseil de déontologie", moins brutal. "Le mot +tribunal+, (Mélenchon) l'a dit lui même, n'était pas le plus approprié", a reconnu le député de Seine-Saint-Denis Eric Coquerel mardi à l'Assemblée, approuvant par ailleurs la proposition sur le fond.

Jean-Luc Mélenchon s'apprêtant à participer à
Jean-Luc Mélenchon s'apprêtant à participer à "l'Émission politique", sur France 2, le 30 novembre 2017
AFP/Archives

De même, l'expression caractérisant Léa Salamé - "ses liens politiques, familiaux et communautaires" - a été édulcorée quelques heures après la première publication. "Jean-Luc Mélenchon a été alerté par un proche que ça pouvait être mal interprété", explique Antoine Léaument, directeur de la communication numérique de LFI.

Dans le mouvement, on serre les rangs. Il voulait parler de "corporatisme" et, dans son esprit le mot "communautaire" doit être pris au sens littéral. Il a pris ces dernières années un sens de revendication d'appartenance religieuse qui oblige à la prudence ? "Pas pour lui", assure-t-on.

"La réponse est à la hauteur de la violence de l'attaque, ça peut être perçu comme de l'agressivité, oui, mais ça ne passe pas inaperçu", juge un très proche du député des Bouches-du-Rhône.

- 'courageux' mais 'agressif' -

"C'est une stratégie assumée de confrontation avec le système médiatique, il y a un certain nombre d'obstacles sur notre chemin, le système médiatique est un obstacle, il faut le faire mettre pied à terre et tout ce qui peut permettre d'y arriver est bienvenu", argumente Manuel Bompard, coordinateur des campagne de LFI.

Mais le choix de formulations outrancières, persifleuses ou franchement méprisantes est-il pertinent ? "Si on pensait que ce n'était pas efficace, on ferait autrement", justifie Antoine Léaument, rappelant que M. Mélenchon use du même vocabulaire à l'égard de ses adversaires politiques.

Reste que plusieurs études récentes ont montré que l'image de l'ancien candidat à la présidentielle (19,6%) s'écornait à mesure qu'il revenait aux préceptes du "bruit et de la fureur".

La fondation Jean-Jaurès, proche du Parti socialiste, relève ainsi que "la figure du "sage protecteur et désintéressé" qu'il avait su imposer pendant la présidentielle s'est muée en une personnalité certes "courageuse" et "faisant rêver" pour ses soutiens, mais aussi "agressive", "sectaire" voire "arrogante" pour ses détracteurs. Cette étude qualitative, réalisée avec l'Ifop, montre un échantillon de Français en majorité critiques à l'égard de Jean-Luc Mélenchon.

Le dernier baromètre BVA présente de son côté un Benoît Hamon devançant son concurrent à la présidentielle avec une cote d'influence de 60% (+7 points), contre 56% (-6 points) au leader de La France insoumise.

Pour autant, les accès de colère dont M. Mélenchon a fait une marque de fabrique et qu'il revendique comme une "vertu" auprès des milieux populaires, consolident sa base selon ses proches.

Car il "dit aussi la manière dont il ressent les choses alors que dans le monde politique, on a l'habitude de voir des personnalités ampoulées, qui cachent leur jeu", analyse Antoine Léaument.

La pétition lancée mardi a recueilli quelque 25.000 signatures en moins de 24 heures.

Partager cet article

Dans la même thématique

Capture
5min

Politique

Accord du Mercosur : aubaine ou menace ?

Le 18 décembre, lors du Conseil européen à Bruxelles, les 27 devraient donner leur feu vert à l’accord commercial avec les pays du Mercosur. Prise en étau entre les droits de douanes américains et la Chine, l’Union européenne cherche de nouveaux débouchés pour son industrie et son agriculture. Mais certains pays, comme la France, craignent un dumping sur les prix et les normes environnementales. Alors l’accord avec le Mercosur est-il un bon deal pour l’UE ? « Ici l’Europe » ouvre le débat, avec les eurodéputés Saskia Bricmont (Les Verts/ALE, Belgique) et Charles Goerens (Renew, Luxembourg).

Le

Mélenchon prend le risque politique d’assumer ses colères
4min

Politique

« Il faut qu’autour des écoles, on n’ait pas de MacDo et de kebabs », déclare la sénatrice des Bouches-du-Rhône Brigitte Devésa

Le surpoids semble être la nouvelle épidémie du XXIè siècle. En France, près de la moitié de la population est concernée, constituant un véritable enjeu de santé publique. De quoi alerter le législateur qui entend renforcer les mesures de prévention et d’accompagnement sur le sujet. Axel De Tarlé reçoit la sénatrice Brigitte Devésa et le nutritionniste créateur du nutri-score Serge Hercberg pour en débattre dans l’émission Et la santé ça va ?.

Le

Mélenchon prend le risque politique d’assumer ses colères
5min

Politique

Budget de l’agriculture : le Sénat adopte des crédits en baisse, la gauche dénonce les coupes dans la transition écologique

Dans la nuit de vendredi à samedi, le Sénat a adopté les crédits de la mission agriculture du budget 2026. En prenant en compte les crédits européens, les dépenses fiscales et sociales, l’enveloppe allouée à l’agriculture s’élève à 25 milliards. Toutefois les crédits sont en baisse par rapport au dernier exercice effectivement exécuté en 2024. A gauche, les sénateurs ont dénoncé les fortes coupes dans la transition écologique.

Le

Mélenchon prend le risque politique d’assumer ses colères
2min

Politique

Dermatose des bovins : « Nous ne laisserons aucun éleveur seul », promet Annie Genevard

Alors que le Sénat examine les crédits de la mission agriculture du budget 2026, la ministre, Annie Genevard a assuré que l’Etat serait aux côtés des éleveurs de bovins touchés par la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) et a réaffirmé la politique d’abattage de toutes les bêtes des foyers affectés et d’une vaccination élargie.

Le