Jean-Luc Mélenchon, qui espère gagner de nouveaux députés LFI lors des prochaines législatives partielles, se voit en fer de lance d'une opposition "populaire", là où écologistes et communistes ne perçoivent que du "populisme".
Sévère diatribe anti-médias, soutien apparent à Laurent Wauquiez, patron d'une "opposition bourgeoise" honnie mais victime selon lui de la même vindicte de la"CIA médiatique", interviews et blogs truffés de phrases assassines... Le patron de LFI peaufine son "art de la guerre politique" au service d'une ambition: se positionner comme premier opposant à Emmanuel Macron, "l'ami des riches".
Que ce soit en Guyane -où il fait actuellement campagne aux côtés du candidat LFI pour la législative partielle dimanche- ou à Saint-Gaudens (Haute-Garonne), M. Mélenchon espère rafler la mise et ajouter deux élus de plus aux 17 députés que comptent déjà les "Insoumis".
"Personne ne viendra jamais à bout de nous", tonnait le député de Marseille le 21 février à Saint-Gaudens. "L'opposition populaire, c'est le refus, net et sans bavures, des règles du jeu de ce monde pourri. LFI sera présente dans toutes les partielles (...) Plus personne ne peut dormir tranquille", assénait-il devant un millier de personnes.
Pas question de faire alliance avec la gauche et ses partis traditionnels qui "ont fait leur temps", selon le député LFI de Seine-Saint-Denis Eric Coquerel. L'appel de sa collègue Clémentine Autain pour "agréger davantage à gauche" ne fait pas bouger le mouvement.
"La gauche rassemblée est un étouffoir, un brise lame, un tue-la-joie", justifiait Jean-Luc Mélenchon fin janvier sur son blog. "Nous n'avons aucun interlocuteur stable", ajoutait-il mardi dans La Provence.
Les socialistes ? "Ils vont avoir un congrès démoralisant. Les aigreurs de leur effondrement ne passent pas". Les communistes ? "En proie à un débat interne particulièrement vif". Benoît Hamon ? "Il est un peu manoeuvrier", "renoncer à nos idées pour avoir un accord avec lui" aux européennes, "même pas en rêve !"
Mais ses critiques les plus acerbes, le patron de LFI les réserve à la presse, "première ennemie de la liberté d'expression", et estime, sans s'embarrasser de nuances, que "la haine des médias et de ceux qui les anime est juste et saine".
- "L'acide à travers l'armure" -
"Critiquer la presse, c'est une façon de discréditer toute enquête sur les comptes de campagne ou les difficultés du Média!", s'exclame Julien Bayou, porte-parole d'EELV, dans une allusion aux comptes du candidat Mélenchon, validés mais amputés par le Conseil constitutionnel, ou encore à l'éviction d'Aude Rossigneux -la présentatrice du JT quotidien de la téléweb Le Média, créée avec le soutien de LFI- suivie de la démission de Noël Mamère.
EELV regrette sa volonté "d'hégémonie", le PCF sa "stratégie hyper-personnalisée". "Mélenchon veut capter des mouvements d'opinion d'où qu'ils viennent, marqués par la volonté de ras-le-bol et de dégagisme", c'est "du populisme", dénonce Olivier Dartigolles, porte-parole du Parti communiste.
"Mélenchon a une vraie stratégie" avec "une ligne: taper le plus fort possible", affirme Jean-Daniel Lévy (HarrisInteractive), conforté dans son analyse par une note interne à LFI et publiée le 1e mars par Le Monde, qui reproduit une phrase du député de Marseille, prononcée devant des collaborateurs parlementaires: "il faut taper tout le temps et tant pis si on n'est pas des proposants".
M. Lévy reconnaît à Jean-Luc Mélenchon d'avoir jusqu'ici "réussi à se poser en premier opposant. C'est un homme cultivé, qui croit à la noblesse de la politique, mais son style le dessert parce qu'il est trop agressif".
"C'est dur pour moi, car, après tant d'années, l'acide passe toujours à travers l'armure", se justifie le premier des "Insoumis" dans un entretien inattendu au magazine people Gala. "Je dois incarner des colères et des souffrances, ça peut m'enfermer dans un rôle un peu réducteur", convient-il.