Jean-Luc Mélenchon se rêve en chef de gouvernement. Fort des 22 % glanés au premier tour de l’élection présidentielle, le leader de la France insoumise appelle les électeurs à porter une majorité d’opposition sur les bancs de l’Assemblée nationale, lors des législatives de juin, ce qui aboutirait à la mise en place d’une cohabitation, une configuration politique que la France n’a plus connue depuis 2002. « Je demande aux Français de m’élire Premier ministre, […] je leur demande pour cela d’élire une majorité de députés insoumis », a-t-il déclaré mardi sur BFM TV. Une posture qui agace Marc Fesneau, le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement, qui reproche au tribun de vouloir enjamber un second tour à haut risque avec la qualification de la candidate d’extrême droite.
« On ne peut pas à la fois mettre le cap sur les législatives et bypasser le sujet de dimanche », s’est agacé Marc Fesneau vendredi matin, dans « Bonjour chez vous » sur Public Sénat. « Avant de passer au sujet suivant, le sujet, c’est d’essayer d’éviter une aventure folle qui serait celle de l’élection de Marine Le Pen. »
« Il dit l’inverse de ce qu’il a dit le soir du premier tour »
Marc Fesneau estime également que Jean-Luc Mélenchon s’est dédit par rapport à la position qu’il avait adoptée le soir du premier tour. « Il dit : ‘peu importe Marine Le Pen ou Emmanuel Macron’. Je pense que peu n’importe pas », martèle notre invité. « Dans un entre-deux-tours présidentiel, après avoir commencé par dire ‘pas une voix pour madame Le Pen’, et ensuite dire ‘si c’est Madame Le Pen ou Monsieur Macron, peu importe’… Il dit l’inverse de ce qu’il a dit le soir du premier tour. C’est dommage, j’en prends acte. »
« Il ne faut pas donner une seule voix à Madame Le Pen ! Il ne faut pas donner une seule voix à Madame Le Pen ! », a répété plusieurs fois Jean-Luc Mélenchon face à ses militants, le soir du 10 avril, sans citer Emmanuel Macron. Depuis, une consultation organisée en ligne par LFI auprès de ses militants a abouti au résultat suivant : 37,65 % pour un vote blanc ou nul, 33,40 % pour un bulletin Emmanuel Macron et 28,96 % pour l’abstention. Le vote Marine Le Pen ne faisait pas partie des options proposées. Cette consultation, a indiqué Jean-Luc Mélenchon, n’a pas valeur de consigne de vote.
Une majorité qui doit avoir « envie de changer les choses »
« J’avais compris que Jean-Luc Mélenchon sortait du jeu. Manifestement il re-rentre dans le jeu », observe encore Marc Fesneau, qui reproche au député des Bouches-du-Rhône d’être « à chaque fois dans le blocage ». « Je pense que l’on aura un débat intéressant sur les législatives », poursuit ce responsable gouvernemental. « C’est un débat qui ne doit pas seulement être : il faut donner une majorité à Emmanuel Macron. C’est une majorité qui doit porter un certain nombre de priorités, et l’envie de changer les choses. C’est là-dessus qu’il faudra faire le débat, pas simplement sur qui sera Premier ministre, même si Monsieur Mélenchon souhaite l’être. » Selon un sondage BVA publié vendredi, 66 % des Français interrogés ne souhaitent pas qu’Emmanuel Macron, en cas de réélection, puisse bénéficier d’une majorité à l’Assemblée nationale. Ils sont 69 % dans l’hypothèse d’une victoire de Marine Le Pen.
Interrogé sur ses propres ambitions électorales, Marc Fesneau, élu en 2017 député du Loir-et-Cher, n’a pas voulu se prononcer. « Je dirai les choses dans les semaines qui viennent, une fois l’élection présidentielle passée », balaye-t-il. Avant d’ajouter : « Vous pouvez vous imaginer que j’ai une petite idée… »