« Inapplicable », « attentatoire aux libertés », « pas sérieux ». Les sénateurs engagés pour la réouverture des stations françaises ne mâchent pas leur mot pour dénoncer la nouvelle prise de position d’Emmanuel Macron concernant le ski. Lors d’un point presse avec le premier ministre belge, le chef de l’État a en effet redit son hostilité à l’ouverture des remontées mécaniques françaises. Et promis « des mesures restrictives et dissuasives » pour ceux tentés d’aller skier dans les pays où les stations seront ouvertes, en particulier la Suisse.
Des doutes sur la mise en place
« Je ne vois pas bien comment cela pourrait se mettre en place dans nos territoires frontaliers, surtout après la fin du confinement prévue le 15 décembre » avertit le sénateur de la Haute-Savoie Cyril Pellevat. « C’est une atteinte aux libertés fondamentales, notamment celle de se déplacer » ajoute-t-il, brandissant la menace du Conseil d’État, qui a déjà retoqué certaines mesures du gouvernement comme la jauge de 30 personnes dans les églises.
Une déconnexion du terrain ?
« Tout cela manque de clarté » renchérit son collègue Loïc Hervé, membre du groupe Union centriste et lui aussi élu de Haute-Savoie. « Les élus locaux étaient encore invités hier matin à discuter et cette question des mesures restrictives n’a pas été abordée » dénonce-t-il. Et il ne voit pas bien comment cela pourrait se mettre en place : « On vit avec nos voisins suisses, on vit des relations de familles avec eux, on travaille avec eux. » Loïc Hervé dénonce ainsi des mesures décidées par le chef de l’État « qui ne sont pas cohérentes par rapport au vécu des habitants de ces territoires ».
Stations de ski: "Tout ça manque de clarté" affirme Loic Hervé
« Tout cela n’est pas sérieux » renchérit Sébastien Pla, élu socialiste de l’Aude. « Je suis affolé car on a déjà enfermé les Français pendant six mois chez eux, et maintenant on va les empêcher d’aller à l’étranger » pour les sports d’hiver, dénonce le sénateur, qui préfère en sourire.
Mesures restrictives pour les Français qui iraient skier à l'étranger: "Ce n'est pas sérieux"
Mais c’est surtout l’appel d’Emmanuel Macron à une coordination européenne sur la question qui le fait rire jaune. « Il n’y a pas d’harmonisation européenne » tranche-t-il, évoquant la situation des stations pyrénéennes. « Les Français iront skier en Espagne, et on ne va pas les en empêcher d’aller skier de l’autre côté de la frontière, ça veut dire qu’il n’y a plus d’Europe sinon » ajoute l’élu de l’Aude.
Si Sébastien Pla reconnaît des annonces de soutien intéressantes en cas de maintien de la fermeture côté français, il rappelle que « le monde de la montagne n’attend qu’une chose, c’est de rouvrir les stations », évoquant un protocole sanitaire avec par exemple, la prise de température aux billetteries.
Stations de ski: "Il n'y a pas d'harmonisation européenne" dénonce le sénateur Sébastien Pla
Un mince espoir de réouverture
Cyril Pellevat espère lui aussi toujours que la clause de revoyure prévue le 11 décembre permette d’éviter la fermeture des remontées mécaniques françaises. « Les protocoles sanitaires sont prêts, les taux d’incidence du virus sont redescendus, les hôpitaux disent qu’ils peuvent accueillir les cas Covid et les accidentés des sports de haute montagne » appuie-t-il.
Mais si la fermeture est confirmée, Cyril Pellevat confesse que certains acteurs de la montagne défendraient ces mesures restrictives pour se rendre à l’étranger. « Car ils craignent que des vacanciers ou frontaliers reviennent avec le virus, faisant repartir les contaminations à la hausse. Et cela pourrait encore repousser la date de réouverture des remontées mécaniques françaises ». Ce serait alors une double peine pour les professionnels de la montagne. Privés d’ouverture pendant les fêtes de fin d’année et quasiment condamnés pour le reste de la saison.