La série d’annonces faite par Emmanuel Macron pour tenter d’éteindre la crise des gilets jaunes va coûter cher, plus de 10 milliards d’euros. Conséquence : alors que la prévision de déficit public pour 2019 était de 2,8%, il pourrait atteindre 3,4% soit dépasser le seuil des 3%. Or selon les règles européennes, issues du Traité de Maastricht, un Etat membre ne doit pas dépasser ce niveau.
Au sein même de la majorité, certaines voix expriment leur interrogation sur cette sortie de trajectoire budgétaire. « Ça me gêne. C’est grave » confie à publicsenat.fr François Patriat, président du groupe LREM du Sénat, qui précise aussitôt : « Je soutiens le gouvernement. Le Président a raison de le faire. Mais on ne peut pas donner de signaux contradictoires ».
« En 2020, il faut à tout prix montrer qu’on est sous les 3% »
La crainte du Sénateur de Côte-d’Or : « Je ne veux pas d’un syndrome à la grecque. Les marchés financiers regardent la France. Il faut faire attention au spread », c'est-à-dire l’écart de taux entre la France et l’Allemagne. Il a d’ailleurs légèrement augmenté après les annonces d’Emmanuel Macron. Pour François Patriat, cette sortie des critères européens ne doit être que passagère : « En 2020, il faut à tout prix montrer qu’on est sous les 3% ».
La hausse du déficit s’explique aussi par le basculement du CICE en baisse de charges. Il coûte 20 milliards d’euros et pèse cette année pour 0,9 point sur le déficit. L’effet se limite à l’année 2019 et aidera l’exécutif à afficher un déficit plus faible en 2020. En septembre, le gouvernement visait ainsi un déficit de 1,4% en 2020.
Bruno Le Maire veut freiner au maximum les dépenses
Mais pour limiter les dépenses et le déficit dès l’année prochaine, l’exécutif réfléchit à de nouvelles économies. Manière de montrer sa bonne volonté face aux exigences de Bruxelles. « Ce dépassement doit être temporaire, limité » a prévenu ce jeudi matin devant le Sénat le commissaire européen, Pierre Moscovici.
Au sein de la forteresse de Bercy, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, pousse pour freiner au maximum les dépenses. « Nous ferons tout ce qui est nécessaire pour rester le plus près possible des 3% de déficit public en 2019 » a-t-il affirmé mercredi soir devant les sénateurs. « Nous ne ferons pas des impôts supplémentaires pour financer ces dépenses. Ce sont par des économies que nous le financerons » a assuré de son côté le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, après le Conseil des ministres, mercredi.
Où trouver de nouvelles économies ?
Pour trouver de nouvelles économies, plusieurs idées sont sur la table, comme de nouvelles économies dans les ministères. Mais où appliquer ce coup de rabot ? Benjamin Griveaux semble penser au ministère de l’Economie justement. Le service chargé de mettre en place le prélèvement à la source « n’a pas vocation à perdurer » a affirmé lors de son point presse le ministre, tout comme celui en charge de « la taxe d’habitation », qui va progressivement disparaître. « Le recours au numérique dans les territoires » sera aussi une source d’économies.
Mais ce ne sera pas suffisant. L’impôt sur les sociétés pourrait aussi être visé. Autre piste : la « niche Copé ». Elle permet aux entreprises de profiter d’une exonération partielle d'impôt sur les plus-values de cession au sein d’un même groupe. Lors de l’examen du budget, les députés ont adopté, en le limitant, un assouplissement de la niche Copé en faveur des entreprises, voulu par le gouvernement. Modifier cette niche fiscale aurait politiquement l’avantage de faire payer les grandes entreprises.