Les sénateurs ont repris l’examen du projet de loi asile et immigration ce lundi, après quatre jours de débat la semaine dernière, marqués notamment par une faible présence des sénateurs LR en soirée.
Cet après-midi, les sénateurs ont adopté la création d’un fichier national biométrique des étrangers reconnus majeurs par les départements. Ces derniers ont la charge des mineurs non accompagnés. Ils réalisent des examens pour déterminer si le jeune étranger est mineur ou pas, et s’ils peuvent ainsi bénéficier de l’aide sociale à l’enfance. Par la mise en place de ce fichier national automatisé, l’objectif de la majorité sénatoriale LR-UDI est d’éviter qu’un étranger reconnu majeur, aille ensuite dans un autre département pour tenter d’y être reconnu mineur (voir le sujet d'Audrey Vuetaz).
« Quand les départements décident de ne pas la reconnaître la minorité, ils nous ont dit que les réseaux envoient les mineurs dans un autre département. Et on recommence la procédure » affirme le rapporteur LR du texte, François-Noël Buffet, qui souligne qu’en 2017, « il y a eu 15.000 nouveaux mineurs non accompagnés confiés aux départements » et « 54.000 évaluations faites. (…) Mais combien sont des doublons ? »
Accord entre l’Etat et les départements sur les mineurs étrangers isolés
Le gouvernement n’est pas hostile au principe de ce fichier. Car dans le cadre « des négociations avec l’Assemblée des départements de France », le gouvernement est arrivé à « un accord entre l’Etat et l’ADF », a souligné la ministre Jacqueline Gourault, qui permet « un traitement automatisé des données afin de contribuer à l’identification des personnes étrangères se disant non accompagnées ». Le gouvernement souhaite mettre en place ce dispositif début 2019. Mais pour la ministre, la rédaction retenue par les sénateurs ne va pas assez loin : « Il convient de prévoir la collecte de donnée de tous les demandeurs et non des seuls majeurs » (Jacqueline Gourault)
Jacqueline Gourault a plutôt apporté son soutien à un amendement LR visant à « améliorer la phase d’évaluation des mineurs non accompagnés, en permettant la prise d’empreintes et de photographies des mineurs ».
« La création d’un tel fichier déshonore notre pays »
Pour les opposants au texte, comme la présidente du groupe communiste, Eliane Assassi, ce fichier rentre dans « la logique de chasse aux migrants », qui « atteint ainsi son apogée ». « C’est un fichier d’enfant, c’est bien de cela qu’il s’agit » pour la sénatrice PCF de Seine-Saint-Denis.
« Tous les jeunes sont en situation de détresse. Sans parler des méthodes contestables de reconnaissance, qui passent souvent par des tests osseux ou des entretiens réalisés dans de très mauvaises conditions » dénonce Eliane Assassi, pour qui « la création d’un tel fichier déshonore notre pays ».
« On les voit arriver avec un Smartphone et Google maps pour trouver l’adresse »
Mais la droite n’en démord pas. « Ces supposés mineurs ont eu un parcours extrêmement difficile, c’est vrai. Mais quand on les voit arriver au fond d’une impasse dans un département inconnu, mais avec un Smartphone et Google maps pour trouver l’adresse, (…) ça veut dire qu’il y a des filières, il faut le dire » a réagi le sénateur LR Bruno Sido, ancien président du conseil général de la Haute-Marne (voir la vidéo). Sébastien Meurant, sénateur du Val-d'Oise, ajoute que « cette solidarité, ce droit à venir en France, se fait au détriment des pauvres du département et des mineurs non accompagnés de ces mêmes départements ». La Haute assemblée devrait conclure l’examen du texte d’ici ce soir, avant un vote solennel ce mardi.
« On voit arriver les mineurs étrangers isolés avec un Smartphone et Google maps pour trouver l’adresse »