Le sujet est remonté jusqu’au plus haut niveau de l’Etat. Emmanuel Macron a dénoncé mercredi, lors du Conseil des ministres, des propos « inqualifiables et parfaitement intolérables », rapportés lors d’une mobilisation pro-palestinienne, la veille, à Sciences Po Paris. Le chef de l’Etat « a rappelé avec clarté et fermeté sa position : oui, les établissements universitaires sont autonomes, mais cette autonomie ne justifie en aucun cas le moindre début de séparatisme », a expliqué, à l’issue du Conseil des ministres, la porte-parole du gouvernement, Prisca Thevenot.
Mardi matin, une centaine d’étudiants ont occupé l’amphithéâtre principal de Sciences Po, dans le cadre d’une « journée de mobilisation universitaire européenne pour la Palestine ». Une étudiante de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) a alors « été empêchée d’accéder à l’amphithéâtre » et « des propos accusatoires ont été prononcés à l’encontre » de l’association étudiante, a dénoncé Sciences Po sur X (ex-Twitter). La direction de l’école a annoncé auprès de l’AFP saisir « la section disciplinaire en vue de sanctionner ces agissements intolérables », considérant « que plusieurs lignes rouges ont été franchies ».
Selon une étudiante présente dans l’amphithéâtre interrogée par l’AFP, la jeune femme membre de l’UEJF a été empêchée d’entrer « pour des raisons de sécurité, parce qu’elle avait auparavant intimidé des étudiants pro-Palestiniens ». « Elle est la seule à n’avoir pu entrer. D’autres membres de l’UEJF ont assisté aux débats », a-t-elle affirmé, sous couvert d’anonymat.
L’école de la rue Saint-Guillaume se retrouve à nouveau dans la tourmente car son directeur, Mathias Vicherat, a par ailleurs annoncé ce mercredi sa démission, après avoir appris son renvoi en correctionnelle, dans le cadre d’une affaire où il est soupçonné depuis décembre, comme son ex-compagne, de violences conjugales.
« Ce qu’il s’est passé à un nom : l’antisémitisme » dénonce Aurore Bergé
Après les événements survenus mardi dans l’amphithéâtre de Science Po Paris, plusieurs responsables politiques et parlementaires ont dénoncé sur les réseaux la situation. « Ce qu’il s’est passé à un nom : l’antisémitisme. Demander le nom des gens, les filtrer à l’entrée, assimiler leurs noms (!!!) à la politique du gouvernement israélien… C’est insupportable et illégal. Rien ne le justifiera jamais », a dénoncé la ministre Aurore Bergé.
« Un incident antisémite s’est déroulé à Sciences Po aujourd’hui. L’antisémitisme. A Sciences Po. En 2024. Et rien dans le communiqué pour nommer ce qui s’est véritablement passé. Est-ce parce que, comme dans les universités américaines, cela « dépend du contexte » ? Colère et honte », a réagi de son côté la députée européenne Horizons, Nathalie Loiseau.
« Des propos inadmissibles et révélateurs d’une dérive inquiétante »
Le président du groupe LR, Bruno Retailleau, se dit « triste qu’une grande école comme Sciences Po soit devenue le temple de la défaite de la pensée. Il n’y aura pas de redressement de la France sans le retour de l’exigence intellectuelle et morale dans les établissements qui forment les futures élites de notre pays », affirme le sénateur.
« Jusqu’où ira la dérive, le naufrage de Sciences Po ? La jeunesse française et la France, non seulement, ne méritent pas ça, mais ne doivent pas tolérer que l’argent public tolère l’intolérable », a écrit aussi sur X la sénatrice LR Valérie Boyer.
« « Ne la laissez pas rentrer, c’est une sioniste » : des propos inadmissibles et révélateurs d’une dérive inquiétante. Sciences Po est en pleine tourmente ! » lance pour sa part le sénateur LR Stéphane Piednoir.
« La direction de Sciences Po est aussi lâche qu’irresponsable », dénonce le député RN Jean-Philippe Tanguy
Dénonçant « la très forte montrée de l’antisémitisme » au sein de cette institution, le sénateur Union centriste du Tarn-et-Garonne, Pierre-Antoine Levi, estime que « dans ce contexte, l’annonce récente de la démission de Mathias Vicherat, […] liée à une affaire distincte, doit être saisie comme une occasion de mettre fin à ces dérives, après des années d’aveuglement ou de complicité tacite ».
Le député RN Jean-Philippe Tanguy a aussi réagi pour dénoncer la teneur du communiqué de l’école. « Incapable de dénoncer le caractère antisémite de ce qui s’est produit dans cette école, la direction de Sciences Po est aussi lâche qu’irresponsable, à l’image de tous ces mandarins universitaires qui laissent prospérer l’islamo-gauchisme, l’obscurantisme et la bêtise », a écrit le député d’extrême droite.
Adrien Quatennens se « félicite que les étudiants se mobilisent pour soutenir Gaza. En revanche, évidemment, tout propos antisémite est à proscrire »
A gauche, le député LFI Adrien Quatennens se « félicite que les étudiants se mobilisent pour soutenir Gaza. En revanche, évidemment, tout propos, tout acte discriminant, antisémite, est à proscrire. Je rappelle que l’antisémitisme n’est pas une opinion, puisque c’est un délit », « c’est inacceptable ». Il s’étonne en revanche d’« un double standard français, qui n’est pas acceptable. Les mêmes qui revendiquent, à juste raison, le droit international pour les Ukrainiens, sont très timides s’agissant du droit international pour les Palestiniens. Les mêmes qui revendiquent des sanctions, à juste raison, contre Vladimir Poutine, sont très timides quand il s‘agit d’en demander contre Benjamin Netanyahu ».
« Bravo aux étudiants de Sciences Po qui se mobilisent contre le génocide en cours à Gaza », a simplement écrit pour sa part Aymeric Caron, député de Paris et membre du groupe LFI.