Visage bien connu de la gauche parisienne, moins du grand public, le sénateur socialiste de Paris, Rémi Féraud, a finalement été adoubé par Anne Hidalgo. Dans un entretien au journal Le Monde, la maire de Paris annonce ne pas vouloir briguer de troisième mandat et adoube l’un des piliers de sa majorité. « Je le connais bien, je l’apprécie depuis très longtemps ; il est celui qui va pouvoir porter notre histoire et réinventer un avenir pour Paris. Il a la solidité, le sérieux et la capacité de rassemblement nécessaires », salue l’édile.
Des louanges que l’intéressé pourrait aussi traîner comme un boulet dans la course à la mairie, tant l’ex-candidate à la présidentielle a fini par cliver, moins sur son bilan que sur ses méthodes, jusqu’au sein de sa propre famille politique avec une gauche parisienne qui apparaît relativement divisée à quinze mois des municipales. « Paris n’est ni un héritage, ni une rente de situation », avertissait il y a quelques jours le néodéputé PS Emmanuel Grégoire, autre candidat, longtemps présenté comme le dauphin d’Anne Hidalgo avant de quitter brusquement son poste de premier adjoint.
En intronisant Rémi Féraud, la maire de Paris récompense aussi la fidélité : déjà engagé aux côtés de Bertrand Delanoë, Rémi Féraud est l’un des plus solides soutiens d’Anne Hidalgo, à la tête depuis 2014 du groupe « Paris en commun » au Conseil municipal.
Débuts politiques
Silhouette longiligne, phrasé pondéré, Rémi Féraud, 53 ans, est notamment passé par l’Ecole supérieure de commerce de Paris et Sciences Po. Ce Versaillais d’origine, fils d’un ingénieur chez Total et d’une professeure d’histoire-géographie, adhère en 1993 au Mouvement des jeunes socialistes, encouragé par la lourde défaite de la gauche aux législatives. Il se présente alors comme rocardien.
Après un passage au cabinet du ministre de la Défense Alain Richard, au début des années 2000, il cultive son implantation locale dans le 10e arrondissement de Paris, où il devient le premier adjoint du maire Tony Dreyfuss. « Il m’a mis le pied à l’étrier, puis m’a délégué de plus en plus de dossiers », raconte-t-il au Point.
Rémi Féraud remporte la mairie d’arrondissement en 2008 avec une très large avance (74,96 % des voix au second tour) grâce au soutien des écologistes, après avoir conduit la liste « Paris, un temps d’avance avec Bertrand Delanoë ». Dans la foulée, il est élu premier secrétaire fédéral du PS dans la capitale, poste qu’il occupe jusqu’en 2015.
Un maire face au terrorisme
En tant que maire du 10e arrondissement, Rémi Féraud défend l’ouverture polémique de la première salle de shoot dans la capitale, à l’hôpital Lariboisière, qu’il défend comme un enjeu de santé publique alors que les abords de la Gare du Nord sont envahis par de nombreux toxicomanes.
Il renforce l’offre de logements sociaux dans l’arrondissement, et soutient l’ouverture et la rénovation de différents établissements culturels bien connus des Parisiens, comme le cinéma Le Louxor, une salle des années 1920 laissée à l’abandon pendant vingt-cinq ans, ou la médiathèque Françoise Sagan installée dans l’ancien hôpital Saint-Lazare.
Surtout, Rémi Féraud se retrouve en première ligne la nuit du 13 novembre 2015, lorsque son arrondissement est durement touché par l’attentat des terrasses avec une quinzaine de morts rue Bichat et Alibert. Il sort de sa mairie lorsque la fusillade éclate. « Les morts étaient allongés sur le trottoir devant le Petit Cambodge et le Carillon. Ce sont des établissements très fréquentés, très populaires, il y a toujours beaucoup de jeunes. C’était le choc et la stupeur, le contraste était extrême entre ce silence de mort et ce qu’est d’habitude ce quartier où je vis, très jeune et vivant », a-t-il raconté dans les colonnes du Monde.
Au Sénat
Elu sénateur de Paris en 2017, Rémi Féraud renonce à la mairie du 10e arrondissement selon la loi sur le non-cumul des mandats, mais conserve sa place au Conseil de Paris. À la Chambre haute, il siège au sein de la commission des Finances, où il est l’un des rapporteurs spéciaux du budget de l’action extérieure de l’Etat. Par ailleurs, Rémi Féraud a fait de la régulation des locations de meublés touristiques l’un de ses principaux chevaux de bataille, avec des amendements régulièrement déposés pour faire sauter la niche fiscale dont ils bénéficient.