Municipales à Marseille : tractations et ultime bras de fer entre Michèle Rubirola et Samia Ghali

Municipales à Marseille : tractations et ultime bras de fer entre Michèle Rubirola et Samia Ghali

Samia Ghali, élue dans le secteur 8, pose un ultimatum à Michèle Rubirola, à la tête d’une liste d’union de la gauche : « J’ai [lui] demandé d’être sa première adjointe. » Un « chantage » pour la tête de liste du Printemps Marseillais. Sans l’élue des quartiers Nord, Michèle Rubirola pourrait se voir ravir la mairie de Marseille par la droite.
Public Sénat

Par Hugo Lemonier

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« Je ne serai l'otage d'aucun chantage », prévient Michèle Rubirola. La candidate du Printemps Marseillais, arrivée en tête aux municipales ce dimanche, a sèchement répondu à la sénatrice des Bouches-du-Rhône, Samia Ghali : « Je réfute ces pratiques bien éloignées des enjeux et [je l'invite] à faire de même. »

Serait-ce l’épilogue de l’interminable série politique marseillaise ? Samia Ghali, élue maire des 15e et 16e arrondissement de la ville, avait publié, ce vendredi matin, un communiqué posant les conditions de son ralliement à Michèle Rubirola : « J’ai [lui] demandé d’être sa première adjointe. Cette demande me parait légitime. D’abord parce qu’au-delà des valeurs que nous partageons, je suis celle qui peut lui permettre samedi d’être effectivement Maire de Marseille. »

Le ton est donné : cela se fera avec elle, ou cela ne se fera pas. Samia Ghali, érigée par ses partisans en porte-parole des quartiers déshérités de la cité phocéenne, prend ainsi le public à témoin dans son rapport de force avec la tête de liste du Printemps Marseillais, arrivée en tête avec 39,90 % au second tour.

Les deux femmes se sont rencontrées, ce jeudi soir, « pour la première fois depuis l’élection qui s’est tenue dimanche dernier », d’après le récit qu’en fait Samia Ghali. « Je lui ai rappelé mon combat depuis plus de 20 ans dans les quartiers nord de la ville auprès des populations les plus fragiles, abandonnées et délaissées souvent dans l’indifférence la plus totale », raconte la sénatrice des Bouches-du-Rhône. Avant de poser un ultimatum : « J’ai donc clairement redit à Michèle Rubirola que Marseille ne pouvait plus se faire sans les quartiers Nord ».

« Samia Ghali première adjointe, ce n’est pas pensable », tranche la nouvelle maire des 6e et 8e arrondissement de Marseille, Olivia Fortin, élue sur la liste du Printemps Marseillais. Une déclaration qui fait craindre de nouvelles dissidences en cas de ralliement de Samia Ghali. Mais Michèle Rubirola, portée par une alliance du Parti socialiste, de la France Insoumise, des écologistes et de collectifs de citoyens, a-t-elle vraiment le choix ?

Avec huit sièges au conseil municipal, l’ex-trublionne du Parti socialiste s’est faite faiseuse de roi – ou de reine –, au terme d’une semaine digne des meilleures séries politiques.

La droite se déchire

Ce lundi, Marseille se réveille sans maire. L’interminable soirée électorale n’a pas éclairci l’issue d’un scrutin aussi inédit qu’incertain. En tête, la liste d’union de la gauche obtient 42 élus sur 101, trop peu pour gouverner seule…

A droite, les coutures craquent. Le candidat dissident LR Bruno Gilles, que nous avons tenté de contacter, barre la route à la tête de liste Les Républicains, Martine Vassal. Le sénateur des Bouches-du-Rhône obtient 3 sièges, exactement ce qu’il manque à sa rivale, forte 39 élus.

Alors, dans un espoir de ravir la mairie à « l’ultra-gauche », la droite fait un calcul d’une logique implacable. Sans Martine Vassal, Les Républicains ont peut-être une chance de l’emporter. Rattrapée par des soupçons de fausses procurations, la candidate est forcée de jetée l’éponge, ce jeudi. Elle adoube finalement Guy Tessier, député des Bouches-du-Rhône. « J'ai fait le choix de la sagesse, j'ai fait le choix de l'expérience, j'ai fait le choix du consensus », argue alors la candidate déchue.

Mais une autre donnée pourrait avoir joué un rôle déterminant : l’âge. Martine Vassal écartée, Bruno Gilles accepte d'apporter ses trois élus à la droite. Match nul, balle au centre : 42 sièges pour la droite, 42 pour la gauche. Or, en cas d’égalité parfaite lors du troisième tour, au conseil municipal, le candidat le plus âgé l’emporte sur son benjamin. Guy Tessier, 75 ans, supplanterait de fait sa rivale Michèle Rubirola, 63 ans.

Mais c’était sans compter sur Lionel Royer-Perrault, élu maire du 5e secteur de Marseille. « Je ne peux pas soutenir la candidature de Guy Teissier parce que je sais qu’il y a des ententes en cours avec le Front national et je ne peux pas m’inscrire dans une stratégie d’alliance avec le Front national », affirme l’élu dans une vidéo postée sur Facebook.

« Il n'est pas question de faire un accord avec le Rassemblement national »

Une information aussitôt démentie sur BFMTV par le nouvel homme fort de la droite marseillaise. « Il n'est pas question de faire un accord avec le Rassemblement national », déclare Guy Tessier avant de se tourner vers la véritable arbitre de cette élection : « Samia Ghali a été malmenée par le Printemps Marseillais, qui a présenté une liste contre elle en prenant le risque précisément de faire élire la liste du Front National, rappelle-t-il. Ce qui n’a pas été le cas, parce que nous avions retiré notre liste. »

La droite qui vole en éclats. La gauche qui ne sait que faire de la main de la tendue par l’égérie des quartiers Nord… Le scénario décoche un sourire au sénateur Michel Amiel, sénateur Les Indépendants des Bouches-du-Rhône : « Marseille, ce n’est jamais comme ailleurs… C’est une ville tumultueuse, pleine de caprice, c’est aussi ce qui fait son charme », dit-il, avant de se faire grave : « Mais une fois ces bêtises passées, il va falloir passer aux choses sérieuses car on ne peut pas continuer d’accepter que Marseille tire le département vers le bas. »

Fin du suspense ce samedi, lors du « troisième tour » au conseil municipal. Le vote à bulletins secrets pourrait encore réserver quelques surprises, comme seul Marseille en réserve.

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