Vingt-cinq minutes, échec compris. La commission mixte paritaire (CMP) sur la proposition de loi visant à réformer le mode de scrutin pour les municipales à Paris, Lyon et Marseille n’a pas pu aboutir ce mardi 24 juin. « L’issue était prévisible, dans la mesure où les points de vue étaient irréconciliables. Ce texte est inamendable », rapporte un participant auprès de Public Sénat.
Sept sénateurs et sept députés étaient chargés de trouver un compromis sur cette proposition de loi, portée par le député Renaissance Sylvain Maillard et soutenue par l’exécutif, qui a été adoptée à l’Assemblée nationale, mais très largement rejetée par le Sénat.
Lors des débats en séance publique, la gauche et la droite sénatoriale ont fait front commun contre ce texte, qualifié de « tripatouillage électoral », les élus ont notamment accusé le parti présidentiel de chercher à modifier les règles du scrutin à un an des municipales, pour faciliter son implantation au sein des conseils municipaux de Paris, Lyon et Marseille.
Un double scrutin
Avec le système actuel, les électeurs de ces trois villes votent pour une liste de conseillers dans leurs arrondissements respectifs. Les élus inscrits en haut des listes sont ensuite amenés à siéger au sein du Conseil municipal, où ils élisent le maire. Arguant « d’un mode de scrutin complexe et peu compris », qui ne serait pas totalement représentatif du choix des électeurs, la proposition de loi macroniste souhaite lui substituer un mode d’élection à deux tours de scrutin. Le même jour, à Paris, Lyon et Marseille, les électeurs seraient ainsi invités à voter deux fois : une fois pour leurs conseillers d’arrondissement et une autre pour les membres du conseil municipal.
Du côté de la Chambre haute, outre le coût généré par une telle réforme dans un contexte de redressement des finances publiques, les opposants au texte se sont inquiétés d’un risque de dévitalisation des arrondissements. Selon nos informations, le député MoDem Jean-Paul Mattei a tenté de les rassurer en proposant, ce mardi, de rendre obligatoire la présence des maires d’arrondissement dans les conseils municipaux.
« Remporter un vote en CMP, ne signifie pas que l’hémicycle va suivre »
« Les députés qui soutenaient ce texte se sont présentés avec des propositions. Nous les avons examinés. De notre côté, nous n’avions pas de contre-propositions à faire dans la mesure où le Sénat a rejeté la proposition de loi en bloc, et n’avait donc pas de texte à présenter », explique la sénatrice LR Muriel Jourda, présidente de la commission des lois. « Trouver un accord en CMP, c’est bien. Mais encore faut-il s’assurer qu’il puisse avoir une chance d’être adopté en séance. Remporter un vote en CMP, ne signifie pas que l’hémicycle va suivre », pointe-t-elle.
Un peu plus d’un quart d’heure seulement après l’ouverture des discussions, les parlementaires ont donc préféré acter leur désaccord.
Vers un abandon du texte ?
À présent, ce texte, sur lequel le gouvernement a engagé la procédure accélérée pour limiter le nombre de lectures devant le Parlement, doit tout de même repasser devant l’Assemblée nationale. Mais l’échec de la CMP sonne déjà comme un nouveau camouflet pour François Bayrou, quelques heures seulement après l’enlisement du conclave sur les retraites. « La logique et la sagesse voudraient que le gouvernement renonce définitivement à cette réforme qui n’a ni queue ni tête », cingle le sénateur communiste de Paris Ian Brossat, lui-même candidat aux municipales dans la capitale.
« Y aura-t-il vraiment une suite à la procédure ? », interroge Muriel Jourda. « J’ai souvenir que le Premier ministre avait déclaré que si le Sénat ne validait pas le texte, il ne s’obstinerait pas ». Le 19 février, à l’occasion de la séance de questions d’actualité au gouvernement, François Bayrou avait effectivement concédé devant les sénateurs : « Je n’imagine pas qu’un texte puisse être adopté sur ce sujet sans qu’il y ait accord de l’Assemblée nationale et du Sénat. »
Un membre de la majorité commente : « Je conseillerai au Premier ministre de laisser le texte de côté. On n’a pas besoin de ça. Ça peut faire des dégâts. »