Abroger la loi « PLM » ! C’est une vieille rengaine, déjà évoquée lors du premier quinquennat d’Emmanuel Macron, souvent reprise par les oppositions locales à l’approche du scrutin municipal. La loi dite « PLM », votée en 1982 et appliquée pour la première fois lors des élections municipales de 1983 déroge au mode classique d’élection du conseil municipal. Dans les villes de plus de 1 000 habitants, les élections municipales se font par scrutin proportionnel, de liste à deux tours avec une prime pour la liste majoritaire. Le vote permet de former le conseil municipal en fonction des résultats de chacune des listes. Les conseillers municipaux élisent ensuite le maire et ses adjoints. A Paris, Lyon et Marseille, le mode de scrutin est un peu moins direct. Par exemple, dans la capitale, chaque secteur (composé d’un ou plusieurs arrondissements) élit un nombre de conseillers de Paris et de conseillers d’arrondissement proportionnel au nombre d’habitants du secteur. Les listes arrivées en tête bénéficient d’une prime majoritaire dans leur secteur. Ainsi, dans la capitale, le XVè arrondissement compte 18 conseillers de Paris contre seulement trois pour le VIè arrondissement. Ensuite, les conseillers de Paris élisent le ou la maire.
Si ce mode de désignation est effectivement particulier, les partisans y voient une manière d’assurer la représentation de la diversité des quartiers dans des villes dont la population municipale dépasse les 500 000 habitants. Les détracteurs dénoncent, eux, un mode de scrutin peu démocratique permettant de faire élire un maire sans que celui-ci ait obtenu la majorité des voix à l’échelle municipale. Un cas de figure qui s’est déjà présenté à Marseille en 1983 et à Paris et Lyon en 2001.
« C’est un système assez indirect, qui n’est pas tout à fait satisfaisant »
« C’est une loi ancienne, qui ne correspond peut-être plus aux réalités d’aujourd’hui. Il y a déjà eu des tentatives pour modifier cette loi. C’est un système assez indirect, qui n’est pas tout à fait satisfaisant », pointe Catherine Dumas, sénatrice LR de Paris et vice-présidente de Changer Paris, groupe d’opposition de droite au Conseil de Paris. Un sujet cher au parti d’Éric Ciotti qui avait déjà déposé une proposition de loi pour revenir sur la loi « PLM », en septembre 2020. Ce scrutin de liste, par secteur, ne permet pas, selon LR, d’accorder une légitimité suffisante dans la mesure où le ou la maire de Paris est élu dans un secteur, puis par le Conseil de Paris, mais jamais par l’ensemble des habitants de la capitale.
Une critique que partage la majorité présidentielle comme l’a annoncé le député de Paris Benjamin Haddad. En déposant une proposition de loi, les élus de la majorité présidentielle souhaitent rendre le mode de scrutin « plus direct et démocratique ». « Rachida Dati a rencontré le président Macron à ce sujet et la majorité présidentielle est favorable à cette évolution », confirme Catherine Dumas. Absent des exécutifs municipaux des villes de plus de 100 000 habitants, Renaissance pourrait tabler sur une refonte du mode de scrutin des municipales pour contester Paris, Lyon et Marseille à la gauche.
« L’initiative en est encore à un stade politique, c’est le début du processus »
« L’initiative en est encore à un stade politique, c’est le début du processus. On consulte sur le principe mais nous n’avons pas encore arrêté les modifications que nous voulons apporter ni les modalités de ces changements », prévient Catherine Dumas. De nombreux points doivent encore être tranchés, notamment la question de savoir si les trois villes seraient concernées ou uniquement Paris. Les Républicains envisageaient, dans leur proposition de loi déposée en 2020, de faire figurer les noms des candidats au poste de conseiller municipal directement sur la liste des candidats au conseil d’arrondissement ou de secteur et de répartir les sièges du conseil municipal à l’échelle de la commune. En ce qui concerne les mairies d’arrondissement, Catherine Dumas explique vouloir renforcer afin d’opérer un « rééquilibrage des pouvoirs ».
Malgré un contenu qui reste à définir, la vice-présidente de Changer Paris est optimiste et affirme que « la majorité va s’en saisir prochainement ». L’objectif est clair, adopter le texte suffisamment tôt pour pouvoir préparer la bataille des municipales, en 2026.
La gauche dénonce un « tripatouillage électoral »
A gauche, l’initiative ne séduit pas vraiment. En effet, les exécutifs locaux des trois villes sont dirigés par des coalitions de gauche avec Anne Hidalgo à Paris, Grégoire Doucet à Lyon et Benoît Payan à Marseille. Alors qu’aucune proposition de loi n’a encore été déposée auprès de l’une des deux assemblées, le sénateur de Paris et président du groupe Paris en Commun au Conseil de Paris, Rémi Féraud, fustige une démarche électoraliste qui ne permettrait toujours pas d’élire le maire au scrutin universel direct. D’autres élus du Conseil de Paris, comme la sénatrice socialiste Colombe Brossel, critiquent une proposition qui ressemble à un « tripatouillage électoral ».
Rappelons-le, la maire socialiste de Paris, Anne Hidalgo avait largement distancé, en termes de voix et d’arrondissements remportés, sa concurrente Rachida Dati lors de l’élection de 2020. Notons également que la répartition des sièges au conseil municipal n’est pas forcément plus « démocratique » dans les autres villes puisque la liste arrivée en tête bénéficie d’une importante « prime majoritaire ». A Bordeaux, le maire écologiste Pierre Hurmic, en récoltant 46,48 % des suffrages exprimés, a remporté 48 des 69 sièges du conseil municipal avec un peu plus de 1 300 voix de plus que son principal opposant, Nicolas Florian.