Municipales : pourquoi « Agnès Buzyn braconne l’électorat de droite » à Paris, face à Rachida Dati
Agnès Buzyn et Rachida Dati misent toutes les deux sur la sécurité et la propreté pour les municipales à Paris. « C’est ce que demandent les Parisiens » répond le camp de la candidate LREM. Mais il s’agit bien de capter un électorat de centre-droit pour être la mieux placée pour le second tour.

Municipales : pourquoi « Agnès Buzyn braconne l’électorat de droite » à Paris, face à Rachida Dati

Agnès Buzyn et Rachida Dati misent toutes les deux sur la sécurité et la propreté pour les municipales à Paris. « C’est ce que demandent les Parisiens » répond le camp de la candidate LREM. Mais il s’agit bien de capter un électorat de centre-droit pour être la mieux placée pour le second tour.
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A moins de trois semaines du premier tour des municipales, de nouveaux repères se dessinent dans la campagne parisienne, après l’explosion en vol de Benjamin Griveaux. Sa remplaçante Agnès Buzyn se retrouve à disputer le même couloir que Rachida Dati, candidate LR. Les deux femmes mettent en avant les mêmes thématiques. Le jeu des sept erreurs n’est pas loin.

Sécurité, propreté, impôts : Buzyn et Dati sont sur la même ligne

« J’ai deux priorités : la sécurité et la propreté » explique Agnès Buzyn au JDD ce week-end. Elle veut plus d’agents de la ville « sur les trottoirs » et confier « au secteur privé le ramassage des déchets ». Rachida Dati, qui a présenté ce lundi 24 février son programme, veut de son côté l’axer « sur les sujets qui préoccupent les Parisiens », et précise aussitôt : « Je parle de sécurité ». Rachida Dati insiste aussi fortement sur la « propreté ». « C'est de plus en plus sale » dénonce-t-elle dans Le Parisien, proposant que les maires d’arrondissement aient « en charge une partie de la propreté ».

Autre point commun, les deux candidates se prononcent pour une police municipale équipée d’armes létales. Côté finances, les deux ne veulent pas d’augmentation d’impôts. Ou encore, dans le domaine du logement social, les deux ex-ministres veulent réserver une part du parc à ceux qui travaillent pour les Parisiens, notamment les « infirmiers » (Buzyn) et « le personnel soignant » (Dati). Finalement, Buzyn et Dati, c’est Paris en commun, le slogan de campagne d’Anne Hidalgo.

Il y a évidemment des différences. Par exemple, Agnès Buzyn s’adresse aux retraités (et leurs enfants), public qui par ailleurs vote davantage, et propose de « créer un service public du maintien à domicile ». Rachida Dati dénonce de son côté « l’abandon des familles » ou veut aussi « créer un poste d’adjoint en charge des victimes ». Quant aux travaux, elle dit dans le Parisien : « Sur la voirie, je refais tout »… Encore des chantiers, que les opposants dénoncent pourtant ? Oui, mais la candidate LR compte mieux les « planifier pour qu’ils ne soient pas effectués en même temps ».

Ces similitudes programmatiques sont du petit-lait pour la concurrence. « Je vois un programme axé sur la sécurité et la propreté, un programme qui de toutes évidence parle à la droite » constate sur C-News Cédric Villani, au sujet d’Agnès Buzyn. « Toutes les deux sont sur le même créneau. Il y en a une, c'est propre et sûr. Et l'autre, c'est sûr et propre », a raillé, lors du Grand Jury RTL/Le Figaro/LCI, Marine Le Pen.

David Assouline (PS) : « Agnès Buzyn prend tous les thèmes de la droite »

« Agnès Buzyn copie beaucoup des propos de Rachida Dati » constate aussi le sénateur PS David Assouline sur Public Sénat. Le sénateur de Paris ajoute : « Beaucoup de Parisiens sont déçus de l’entrée en campagne d’Agnès Buzyn. Ils se disaient, peut-être qu’on aura une modérée, mais elle prend tous les thèmes de la droite à Paris ». Regardez :

David Assouline (PS) : « Agnès Buzyn prend tous les thèmes de la droite »
01:14

Rachida Dati dénonce de son côté un copier-coller. « Si Agnès Buzyn veut copier le programme, qu'elle le copie ! » lance la candidate LR dans Le Parisien. « Elle apprend vite, notamment à copier le programme des autres » ironise-t-elle encore sur France Info, « mais Paris mérite beaucoup mieux qu’une pâle copie ».

« Agnès Buzyn a souhaité prioriser les choses »

Dans le camp LREM, on récuse ces attaques. « C’est très simple, c’est ce que nous demandent les Parisiens. Il y a plus d’un an, on l’avait identifié en interrogeant plus de 25.000 personnes et ce sont les deux sujets qui reviennent tout le temps, la sécurité et la propreté » explique à publicsenat.fr le député LREM Sylvain Maillard, candidat sur la liste du VIIIe arrondissement. Il ajoute :

Ce ne sont pas les sujets de Rachida Dati, ce sont les sujets des Parisiens, c’est la réalité du terrain, donc il faut y répondre.

Ce n’est pourtant pas ce qui ressortait des propositions de Benjamin Griveaux. On répond que ces sujets étaient déjà dans le programme, mais « Agnès Buzyn a souhaité prioriser les choses » précise Sylvain Maillard.

« L’objectif de LR, ce n’est pas du tout de gagner Paris, c’est d’empêcher Macron de remporter une victoire »

Reste que LREM vise bien, en mettant en avant ces thématiques, un électorat plutôt de centre-droit qu'il s’agit de fixer pour être le plus haut au soir du premier tour. « Agnès Buzyn braconne dans l’électorat de droite. Et en réalité, c’est le reflexe du bon sens. Quand vous faites une étude sur l’orientation de l’électorat modéré à Paris, les deux sujets qui reviennent sont la propreté et la sécurité » explique un parlementaire de la droite parisienne. Alors que Rachida Dati occupait déjà ces sujets, la question sera de savoir qui les incarne le mieux. Le même parlementaire ajoute :

Agnès Buzyn fait la politique du coucou et du copiage. Mais j’ai le sentiment que ça va servir plus Buzyn que Dati.

Après avoir dans un premier temps expliqué avoir voté Hidalgo en 2014 et voir en Bertrand Delanoë son « modèle d'apaisement », afin de parler à l’électorat socialiste modéré, elle vise maintenant l’autre côté de l’échiquier pour combler son retard, ce qui semble fonctionner au regard des derniers sondages.

Une orientation qui s’explique aussi en vue du second tour, et même après. Toujours selon cet élu de la droite parisienne, « bien sûr, Agnès Buzyn pense à un rapprochement au troisième tour. Car la seule qui peut battre Hidalgo, c’est Buzyn. Il n’y a qu’elle qui peut remporter les secteurs stratégiques, comme Paris centre, le XIIe et le XIVe, car l’électorat de droite votera Buzyn pour dégager Hidalgo ». Mais il faudra pour cela qu’une partie de la droite soit prête à la soutenir dans certains arrondissements. Ce que ne souhaite évidemment pas la direction du parti. En réalité, selon ce bon connaisseur de la droite parisienne, « l’objectif de LR, ce n’est pas du tout de gagner Paris, c’est d’empêcher Macron de remporter une victoire. Donc le statut quo va à LR au niveau national. Beaucoup de gens n’aiment pas Dati à LR. En la désignant, certains pensent qu’elle se prend une gamelle et on s’en débarrasse une bonne fois pour toutes ». Mais Rachida Dati compte bien faire mentir ces « amis » qui lui veulent du bien. Depuis la chute de Griveaux, elle gagne des points dans les sondages et compte sur sa dynamique.

Sylvain Maillard (LREM) : « Je ne crois pas que Rachida Dati soit réputée pour faire les choses, pour travailler beaucoup »

Mais en politique, tout le monde croit justement en sa dynamique lors d’une campagne électorale. Chez LREM, on mise sur la personnalité d’Agnès Buzyn pour l’emporter. « Elle va maintenant décliner les différentes propositions et les incarner sur le terrain. Elle sera beaucoup au contact dans les arrondissements à fort enjeu » explique Sylvain Maillard. Pour le député LREM, « il faut incarner une façon de faire, une façon d’être, de se comporter. Il faut retrouver de l’apaisement, de l’ordre, tout en étant très punchy ». Ce qui implique de donner des coups. Illustration : « Je ne suis pas sûr que Rachida Dati ait beaucoup travaillé son programme » attaque Sylvain Maillard, « je ne crois pas que Rachida Dati soit réputée pour faire les choses, pour travailler beaucoup. Regardez le temps passé au Conseil de Paris durant son dernier mandat. C’est 52 minutes en 6 ans, moins de 10 minutes par an. Ce ne sont pas des choses qui l’intéressent ». Il reste encore vingt jours avant le premier tour…

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