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Nomination des commissaires européens : « On constate qu’Ursula von der Leyen ne peut pas se passer du soutien de Giorgia Meloni », note un spécialiste des partis européens
Par Henri Clavier
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Après un long bras de fer, les partis européens sont parvenus, hier soir, à un accord sur la nomination de la future Commission européenne. Le feuilleton durait depuis une semaine et la fin des auditions des commissaires par les députés européens entre le 4 et le 12 novembre. Au cœur des tensions, les candidats pour les postes de vice-présidents de la Commission européenne, notamment celle de l’italien Raffaele Fitto et de l’espagnole Teresa Ribera. Alors que le premier est un proche de Giorgia Meloni, affilié au groupe d’extrême droite Conservateurs et réformistes européens (CRE), la seconde était la ministre de l’écologie du gouvernement socialiste de Pedro Sanchez. La nomination du Hongrois Olivér Várhelyi, proche de Viktor Orban était également incertaine
Faute d’accord entre le Parti Populaire européen (PPE, chrétiens-démocrates), le groupe Socialistes et Démocrates et le groupe Renew (libéraux), la confirmation des six vice-présidents de la Commission européenne par les députés européens était en suspens. Grâce à l’accord conclu entre les trois groupes centraux du Parlement européen, le collège des commissaires devrait logiquement être confirmé par un vote des députés européens, le 27 novembre. Une étape déterminante en vue de la prise de fonction de la nouvelle Commission européenne présidée par Ursula von der Leyen.
« C’est la première fois que le groupe CRE obtient un poste aussi visible, pour Meloni c’est une réussite importante »
« Nous allons poser de vraies exigences à Monsieur Fitto », affirmait Valérie Hayer en septembre, formulant ses réserves par rapport à la nomination d’un commissaire d’extrême droite. La cheffe de file des socialistes au Parlement européen jugeait pour sa part que Raffaele Fitto, « ne répond pas aux exigences de notre famille politique ». Malgré l’hostilité affichée des partis pro-européens, libéraux et socialistes n’ont pas réussi à s’opposer à l’obtention d’une vice-présidence pour l’extrême droite. « C’est un coup de force symbolique, c’est la première fois que le groupe CRE obtient un poste aussi visible, pour Meloni c’est une réussite importante. Aujourd’hui, on constate qu’Ursula von der Leyen ne peut pas se passer du soutien de Giorgia Meloni », analyse Francisco Roa Bastos, maître de conférences en science politique à l’université Panthéon-Sorbonne et spécialiste des partis politiques européens.
Par ailleurs, ces nominations confirment la montée en puissance des partis d’extrême-droite au sein du Parlement européen. Depuis l’arrivée de Giorgia Meloni, le PPE et CRE ont pu s’accorder sur des votes communs comme sur le texte sur la restauration de la nature ou mi-novembre sur le texte relatif à l’importation de produits issus de la déforestation. « Ce n’est pas un revirement majeur dans la mesure où CRE a déjà obtenu des vice-présidences au Parlement européen. Cependant, c’est la confirmation que le groupe de Giorgia Meloni n’est pas derrière le cordon sanitaire, contrairement au groupe du Rassemblement national », explique Francisco Roa Bastos.
La candidate espagnole acceptée par le PPE
Suite aux réserves des libéraux et des sociaux-démocrates sur la nomination de Raffaele Fitto, la droite européenne a voulu écarter la candidate espagnole, Teresa Ribera. La droite espagnole, composante centrale du PPE, a notamment exigé de l’ancienne ministre de l’environnement qu’elle réponde aux questions des parlementaires espagnols sur sa responsabilité après les inondations dans la région de Valence. Si l’ancienne ministre a accepté, elle a néanmoins refusé la deuxième condition consistant à démissionner de son poste de commissaire si des poursuites judiciaires étaient engagées. « Ce qui a mis le feu aux poudres c’est la prise en compte dans les débats des enjeux nationaux espagnols, c’est toujours un peu le cas dans les auditions. Il y a régulièrement un télescopage des intérêts européens et nationaux », relève Francisco Roa Bastos.
Le PPE au centre du jeu, les autres partis marginalisés
Malgré la présence d’enjeux nationaux, l’accord conclu entre le PPE, Renew et les sociaux-démocrates doit servir de base de travail pour former des coalitions au cours de la législature. C’est en tout cas ce que suggère le communiqué commun, obtenu par Politico, dressant les neuf priorités politiques de la législature. « Cet accord débloque une situation qui mettait en péril la stabilité de l’Union européenne », pointe la cheffe de file des sociaux-démocrates dans un communiqué de presse tandis que Renew se réjouit d’avoir « uni le centre pour défendre l’Europe ». Néanmoins, certains eurodéputés sociaux-démocrates, comme Pierre Jouvet (PS), ont exprimé leur rejet de l’accord.
En cause, l’absence de garanties offertes par le PPE sur le renouvellement d’une alliance de circonstance avec l’extrême-droite. « Ce que l’on constate, c’est une confirmation que le PPE et Manfred Weber (président du PPE) sont la force dominante pour conclure des accords. Ils ont le groupe le plus important et peuvent nouer des alliances à leur gauche et à leur droite, c’est le groupe pivot qui devrait mener la danse dans la prochaine législature », souligne Francisco Roa Bastos. Avec 188 députés sur les 720 que compte le Parlement européen, le parti de la droite européenne se retrouve en position de force face aux libéraux et aux sociaux-démocrates, tout en gardant la possibilité de négocier avec le groupe CRE. Enfin cet accord conforte la place de la droite allemande dans les institutions européennes et notamment du parti d’Ursula von der Leyen principale composante du PPE. « Ce sera la mandature du PPE et de la droite allemande », assure Francisco Roa Bastos avant même la tenue des élections législatives en Allemagne, en février prochain.
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