« Nous vivons encore dans l’Europe des Nations » : pour Bernard Guetta, il faut poursuivre l’œuvre de Jacques Delors

Ce 27 décembre 2023, l’Europe perdait l’un de ses plus emblématiques architectes. Président de la Commission européenne de 1985 à 1995 et figure emblématique du Parti socialiste en France, Jacques Delors a participé aux plus grands chantiers européens : l’espace Schengen, la monnaie unique, ou encore le programme Erasmus, font partie de ses nombreuses contributions. Invités par Caroline de Camaret et Alexandre Poussart à débattre sur le plateau d’Ici l’Europe, Bernard Guetta député européen français Renew Europe et Assita Kanko députée européenne belge CRE affichent leurs divergences quant à l’héritage de Jacques Delors.
Axel Dubois

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Alors que dans la plupart des pays de l’Union s’observe une montée des nationalismes et de l’euroscepticisme, les prochaines élections européennes de juin 2024 reposent la question du cap politique de l’Europe : Europe fédérale ou Europe des Nations ?
Une question qui animait déjà les débats à l’époque de Jacques Delors, favorable à une Europe solidaire, une Europe communautaire, plus qu’une Europe des nations. Mais cette ambition fédéraliste, revendiquée et assumée, semble aujourd’hui trouver bien peu d’héritiers…

 

Un héritage partagé ?

Jacques Delors serait-il fier de l’Europe d’aujourd’hui ? Pour Bernard Guetta, oui. Lui qui se dit « très proche de Jacques Delors », et favorable à une Europe plus communautaire et solidaire, considère qu’au regard de la géopolitique mondiale, l’Europe s’est renforcée : « Depuis 2016, et la première élection de Donald Trump, l’Europe s’est politisée, l’Europe s’est affirmée sur la scène politique internationale. ». Alors que les grands équilibres géostratégiques se sont modifiés, pour l’eurodéputé du camp présidentiel français, l’Europe a fait tomber de nombreux tabous contre lesquels l’ancien Président de la Commission européenne luttait : « le tabou sur l’idée même de défense européenne est tombé, le tabou sur les emprunts communs avec la pandémie est tombé, par exemple ».
Pour Assita Kanko, eurodéputée belge de la droite de la droite, il faut aussi poursuivre « l’héritage de Jacques Delors. Le marché commun et les valeurs européennes » notamment. Mais pour « poursuivre et réaliser ce rêve », pour l’eurodéputée il faut lutter contre ce qu’elle considère comme « le plus gros danger pour le marché commun : l’échec de la politique migratoire. ».

 

Des visions opposées

Pour Bernard Guetta, si le problème migratoire est réel, c’est avant tout un problème de frontières extérieures, pour l’élu renaissance, la faute incombe « Aux partis qui s’obstinent à dire qu’il ne faut pas de politique commune, que la question de l’immigration doit dépendre de chacun des états membres. Et qui bloque ? Ce sont vos forces politiques ! » affirme Bernard Guetta, renvoyant Assita Kanko aux positions de son parti.
Cette réticence à une Union plus communautaire, Bernard Guetta la regrette aussi en matière sociale ; tout comme Jacques Delors, qui « le déplorait » : « malheureusement, il y a beaucoup trop de forces politiques en Europe qui se réclament de Margaret Thatcher ou de ces idéologies libérales, hostiles à tout développement des politiques sociales. ».
Une ligne rouge pour Assita Kanko : « il faut faire une distinction très claire entre ce pourquoi l’Europe est compétente, et ce pourquoi les états membres sont compétents. L’Europe ne doit pas légiférer en matière sociale ou budgétaire ». Une position à rebours de Bernard Guetta, mais aussi Jacques Delors qui appelait de ses vœux une harmonisation fiscale des états membres.

 

Retrouvez l’intégralité du débat ici.

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