C’était attendu. Le « non » à l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie l’a emporté très majoritairement à plus de 96 %. Les indépendantistes avaient demandé le report du scrutin en raison de l’impossibilité, selon eux, de « mener une campagne équitable » à cause de l’épidémie. Comment s’est déroulé le scrutin ?
J’ai ressenti beaucoup de frustration de part et d’autre. Les indépendantistes regrettent le non-respect de la parole donnée par l’ancien Premier ministre, Édouard Philippe qui avait exclu une troisième consultation entre le mois de septembre 2021 et la fin du mois d’août 2022 afin de bien la dissocier de la campagne présidentielle. Du côté des loyalistes, ce troisième « non » ne met pas définitivement un terme au processus d’autodétermination.
Avez-vous perçu des tensions autour des bureaux de vote ?
Je n’ai pas ressenti une ambiance de soirée électorale. Pour la première fois dans l’histoire de la Ve République, nous avons vu des bureaux de vote avec zéro votant. Ce troisième référendum a un goût d’inachevé. Au vu de la faible participation les loyalistes ne peuvent pas brandir le « non » comme une victoire. Et d’un autre côté, il n’y a pas eu de démobilisation dans le camp du « non » à l’indépendance, ce qui aurait pu constituer une victoire pour les indépendantistes.
Comment envisagez-vous la période de transition prévue du 13 décembre 2021 au 30 juin 2023 ?
La marge de manœuvre est réduite pour le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu. Je ne pense pas qu’il se passe grand-chose avant l’élection présidentielle. Il va engager des discussions informelles avec les membres du congrès calédonien pour voir les sujets qui peuvent faire consensus et éviter pour le moment, les sujets qui fâchent.
Quels sont les sujets qui fâchent ?
Ce qui fâche, c’est que l’Etat donne l’impression de jouer tout seul sa partition. Les loyalistes considèrent l’autonomie comme concevable si le territoire reste dans la République française. Les indépendantistes estiment que l’autonomie ne peut passer que par une souveraineté pleine et entière. Or, en droit français, la souveraineté pleine et entière implique un référendum. Mais on l’a vu avec les accords de Nouméa, on a passé 20 ans à organiser les consultations sans véritablement penser au projet. Pour la suite, ça ne pourra pas être simplement une question à laquelle on répond par oui ou par non. Mais un projet contre un projet. Et le projet ne pourra pas être simplement un statut. Il faudra autre chose.
Le statut quo n’est donc pas possible ?
Non, car si la Nouvelle-Calédonie est un territoire d’Outre-mer avec un transfert de compétences extrêmement poussé, un gouvernement (le Haut-commissariat), un Parlement (e congrès), elle reste inscrite sur la liste de l’ONU des territoires à décoloniser. On est déjà allé très loin vers la décentralisation, trois articles sont consacrés à la Nouvelle-Calédonie dans la Constitution. Il va falloir imaginer une vision partagée avec à la fin des fins une proposition institutionnelle stable.
Lire notre article: Référendum en Nouvelle-Calédonie : le non à l’indépendance l’emporte à 96,43 %