La chambre haute a très largement adopté – 299 voix contre 42 la proposition de loi du Sénat transpartisane, soutenue par le gouvernement. Le texte examiné en urgence vise à reporter le renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie afin de permettre la poursuite de la discussion sur l’accord du 12 juillet 2025 et sa mise en œuvre. Il est désormais transmis à l’Assemblée nationale qui l’examinera dès le mercredi 22 octobre.
Car urgence s’impose : celle de reporter les élections provinciales. Dans le calendrier actuel, les élections doivent se tenir avant le 30 novembre, mais l’accord signé le 12 juillet 2025 à Bougival, entre l’État et les délégations indépendantistes et non-indépendantistes calédoniennes, qui a permis de dégager un compromis politique sur l’organisation de ce territoire ultramarin, prévoit la création d’un Etat de Nouvelle-Calédonie inscrit dans la Constitution avec un corps électoral élargi. Le texte du Sénat fixe la nouvelle échéance électorale au plus tard le 28 juin 2026, un délai qui doit permettre à l’exécutif de donner une transcription juridique à l’accord. Sa mise en œuvre passera par l’adoption prochaine d’un projet de loi constitutionnelle, déposé mardi en Conseil des ministres.
« Reporter les élections, ce n’est pas différer la démocratie », pour le gouvernement
Car l’accord de Bougival prévoit d’élargir le corps électoral spécifique à ces élections locales. Actuellement, seuls certains habitants peuvent voter, notamment ceux établis sur le territoire avant 1998 et leurs descendants, ce qui ulcère le camp loyaliste. Le retard pris laisse craindre une tenue des élections avant le 30 novembre, tel que prévu initialement, et avec un corps électoral gelé. C’est d’ailleurs ce que réclament les indépendantistes du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), qui ont rejeté l’accord de Bougival.
« Si reporter un scrutin est une décision lourde de conséquences sur le plan démocratique, la commission a en effet estimé que ce nouveau report était justifié par un but d’intérêt général. Elle a également souligné qu’un tel report permettra de poursuivre les négociations avec l’ensemble des parties prenantes de manière à aboutir au plus large compromis possible », fait valoir dans un communiqué la commission des lois du Sénat.
« Reporter les élections, ce n’est pas différer la démocratie, c’est lui redonner des fondations solides, c’est choisir la lucidité plutôt que la précipitation », a insisté, mercredi la nouvelle ministre des Outre-mer, Naïma Moutchou, qui faisait ses premiers pas devant le Sénat mercredi soir.
« Ce report est basé sur un accord qui n’existe pas ! », dénoncent les opposants au texte
Les opposants au texte estiment au contraire que le gouvernement veut passer en force pour faire appliquer l’accord de Bougival, alors que ce dernier a été rejeté depuis sa signature par le Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), principale coalition indépendantiste.
« Ce report est basé sur un accord qui n’existe pas ! » a regretté l’écologiste Mélanie Vogel. « Il est dangereux que l’archipel « devienne l’otage de calculs politiques ou de décisions hâtives dictées par le calendrier parisien », a pesté le sénateur indépendantiste calédonien Robert Wienie Xowie.
Les groupes communiste et écologiste se sont opposés au texte, ainsi qu’une poignée d’élus ultramarins et Rassemblement national.