« Nicolas Hulot approche les choses avec réalisme », apprécie André Gattolin, sénateur écologiste désormais membre du groupe La République en marche.
Après l’annonce par le ministre de la Transition écologique de son Plan climat, beaucoup avaient critiqué son silence sur la fermeture des centrales nucléaires. Nicolas Hulot s’était en effet borné à « espérer » tenir l’objectif d’une réduction de 75 à 50% de la part du nucléaire dans la production d’électricité.
« C’est la fin du « dogme ‘on ne ferme rien'»
Ce matin, invité de la matinale de RTL, le ministre de la Transition écologique a toutefois précisé les choses : « Avec le Plan climat, on a confirmé que la part du nucléaire dans la production d’électricité sera de 50%. Chacun peut comprendre que pour tenir cet objectif, on va fermer un certain nombre de réacteurs (…) Laissez-moi planifier les choses, ce sera peut-être jusqu’à 17 réacteurs, il faut qu’on regarde. »
Charlotte Migeon, du réseau Sortir du nucléaire, se réjouit d’un « chiffre suffisamment précis pour ne pas avoir été issu d’une certaine réflexion ». Plus encore, c’est la fin du « dogme ‘on ne ferme rien’ » qu’elle salue : « Pour la première fois, un ministre de l’Environnement parle de fermer des réacteurs et un certain nombre, pas juste quelque chose de symbolique comme Fessenheim. »
« 17 réacteurs, ce n’est pas suffisant »
Pour autant, elle regrette qu’il ne s’agisse que d’une « fourchette », Nicolas Hulot ayant précisé qu’il fermerait « jusqu’à 17 réacteurs ». « 17 c’est le haut de la fourchette », remarque-t-elle. Et qui plus est, « ce n’est pas suffisant ». Charlotte Migeon rappelle qu’ « en 2025, 34 réacteurs auront dépassé leur durée de fonctionnement (30 ans) ».
Elle pointe « des équipements qui vieillissent, dont certains qui ne sont pas remplaçables, comme la cuve du réacteur », et propose leur « fermeture effective (…) dès maintenant », ce qui permettra notamment à Nicolas Hulot de dépasser « l’effet d’annonce ».
« Le vieillissement du parc nucléaire »
André Gattolin s’accorde avec elle sur « le vieillissement du parc nucléaire » et les risques que cela représente, ainsi que sur le coût des réparations de certains réacteurs. Mais le sénateur rappelle que, pour l’instant, le nucléaire permet tant l’ « indépendance énergétique » de la France et sa « sécurité civile », qu’une « production constante » d’énergie. Ainsi la réduction de sa part dans le mix énergétique mérite « une interrogation globale », sur les plans écologique et de la sûreté, mais également aux niveaux géopolitique et économique.
« L’Allemagne a voulu sortir rapidement du nucléaire et a donc dû recourir au charbon, le plus polluant », rappelle André Gattolin. Mais aussi au gaz, qu’elle se fournit auprès de la Russie. Or les relations entre Angela Merkel et Vladimir Poutine ne sont pas au beau fixe.
« Les travaux de prolongation vont coûter extrêmement cher »
Autre problématique, économique. « Il y a des réacteurs dont les travaux de prolongation vont coûter extrêmement cher, pour des résultats dérisoires car certains équipements ne peuvent pas être remplacés », remarque Charlotte Migeon. André Gattolin est également conscient du coût de ces réparations, mais estime qu’il est préférable de « fixer un horizon » comme le propose le ministre de la Transition écologique plutôt que de se précipiter comme l’a fait l’Allemagne.
Le sénateur propose entre autres de développer l’énergie hydroélectrique, « la meilleure énergie renouvelable », qui peut assurer une production constante d’énergie comme c’est le cas aujourd’hui du nucléaire ».
« Un ‘non besoin’ d’une vingtaine de réacteurs »
Charlotte Migeon estime quant à elle que la France est déjà en mesure de produire suffisamment d’énergie en fermant une vingtaine de réacteurs. Elle se réfère ainsi aux travaux de la commission d’enquête relative aux coûts passés, présents et futurs de la filière nucléaire (2013), qui s’est elle-même référée aux propos de Laurent Michel, directeur général de l’énergie et du climat : « Dans l’hypothèse d’une part du nucléaire de 50 % en 2025, les besoins seraient de 36 à 43 gigawatts, ce qui correspond, indépendamment des problèmes de sûreté, à un ‘non besoin’ » d’une vingtaine de réacteurs. »
« Le travail que fait Nicolas Hulot peut paraître ingrat aux écolos », admet André Gattolin. Mais selon lui, sa « remise à plat de toute la politique énergétique » est nécessaire avant toute chose.