NUPES : entre Mélenchon et Macron, des sénateurs socialistes veulent croire à une troisième voie
Alors que le Conseil national du PS a validé l’accord entre les socialistes et LFI, certains sénateurs socialistes veulent croire que le PS peut encore porter une offre politique sans s’allier, ni à Jean-Luc Mélenchon, ni à Emmanuel Macron.

NUPES : entre Mélenchon et Macron, des sénateurs socialistes veulent croire à une troisième voie

Alors que le Conseil national du PS a validé l’accord entre les socialistes et LFI, certains sénateurs socialistes veulent croire que le PS peut encore porter une offre politique sans s’allier, ni à Jean-Luc Mélenchon, ni à Emmanuel Macron.
Louis Mollier-Sabet

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Tous les socialistes ne partagent pas le même avis sur l’accord qui vient d’être validé par le Conseil national du parti, loin s’en faut. En revanche tous sont d’accord sur une chose : il y aura un avant et un après. D’un côté, la direction actuelle d’Olivier Faure et les négociateurs de l’accord veulent y voir un retour à l’esprit du programme commun des années 1970, qui avait permis la victoire de 1981 et de « changer la vie. » « À force de dire que nous sommes un parti de gouvernement, nous avons pu oublier nos propres racines. Mais Mitterrand, c’était la radicalité, et pourtant nous l’avons fait », s’est ainsi exclamé Olivier Faure au Conseil national ce jeudi soir. De l’autre, Bernard Cazeneuve et son successeur à la mairie de Cherbourg, le sénateur Jean-Michel Houllegatte, quittent le parti socialiste, actant une rupture dans la ligne politique du PS, qui a notamment accepté dans l’accord d’abroger des lois du quinquennat de François Hollande, comme la loi Travail.

« Le socialisme à la française existe »

Sans aller jusqu’à quitter le parti, certains responsables socialistes n’en démordent pas : cet accord est une erreur, et il va falloir que le PS redresse la barre. Si certains se rêvent en héritier de Mitterrand, les socialistes « frondeurs 2.0 » opposés à cet accord se rêvent en « troisième voie », si l’on s’autorise à filer la métaphore de Guerre froide. « On n’a pas besoin de Jean-Luc Mélenchon pour prouver qu’on est de gauche », lâche par exemple la sénatrice des Bouches-du-Rhône, Marie-Arlette Carlotti. « C’est désagréable de nous dire ‘ou vous êtes avec Mélenchon, ou vous êtes avec Macron’, aucun de nous [qui ne soutenons pas l’accord] n’a envie de rejoindre Emmanuel Macron. La social-démocratie est une piste, le socialisme à la française existe, parce que nous ne sommes pas exactement comme les Allemands ou les Portugais. On doit aussi faire rêver, construire un projet, et ce n’est pas en nous mettant à la remorque de Jean-Luc Mélenchon que nous y arriverons. »

De même, Rachid Temal estime « le PS aurait dû avoir sa propre stratégie » et faire une proposition « au Pôle écologiste, aux Radicaux, au PCF », pour au moins « entrer dans la négociation » et regrette que « certains se soient directement tournés vers Jean-Luc Mélenchon. » D’après le sénateur du Val d’Oise, « les adeptes du socialisme doivent rester [dans le parti] pour que l’on construise quelque chose ensemble au sein de la famille socialiste au sens large et philosophique du terme. » Cela devra-t-il se régler dans un congrès, comme le Parti socialiste en a le secret ? « De congrès en congrès, c’est la dégringolade totale », réfute Rachid Temal. « Le cycle d’Epinay est mort, il faut accepter de changer d’outil, comme la SFIO a pu changer. Mais si on commence par le nom et le chef, on aura tort. Je veux m’atteler à travailler sur le socialisme de demain. » Jean-Pierre Sueur, sénateur socialiste du Loiret, semble, lui aussi, vouloir réfléchir à une alternative au sein du Parti socialiste : « Pour le moment, je ne tire pas comme conséquence de quitter le Parti socialiste, je veux y rester pour contribuer à sa reconstruction, sa rénovation et son renouvellement, qui sont nécessaires. »

« Panique existentielle et courte-vue » de la direction du PS

Avant de rentrer dans ce travail de long cours, une question concrète va se poser : les cadres du PS qui refusent l’accord avec LFI vont-ils souvenir des candidatures dissidentes ? La situation de Lamia El-Aaraje est un peu particulière, et le Conseil national du parti a demandé la réévaluation de son cas à l’unanimité hier, mais déjà, des candidatures socialistes dissidentes fleurissent. C’est par exemple le cas de Xavier Perrin, qui était investi dans la circonscription de Saint-Nazaire, et qui se maintient malgré l’accord avec LFI. Il sera d’ailleurs soutenu par le sénateur PS de Loire-Atlantique, Yannick Vaugrenard, qui « regrette » la décision du Conseil national et le comportement « de panique existentielle et de courte-vue » de la direction du PS.

Les prochains jours permettront d’y voir plus clair sur d’éventuelles candidatures socialistes qui se maintiendraient malgré l’accord signé avec les autres partis de gauche, et pourraient fragiliser la position du PS au sein de cette coalition. En outre, la question de l’exclusion des candidats dissidents et de leurs soutiens, pourrait se poser. « On verra bien si l’on m’exclut », répond Patrick Kanner, le président du groupe socialiste au Sénat quand il explique qu’il soutiendra la candidature de Lamia El-Aaraje à Paris. Chiche ?

Partager cet article

Dans la même thématique

Mirecourt: French president Emmanuel Macron
6min

Politique

Macron veut interdire les portables au lycée : mesure qui « va dans le bon sens » ou « peine perdue » ?

Le chef de l’Etat a annoncé que les téléphones portables allaient « sans doute » être interdits dès la rentrée prochaine dans les lycées. C’est « faisable », soutient le sénateur Renaissance Martin Lévrier. « Il est incorrigible. C’est une annonce par jour pour exister », raille le sénateur LR Max Brisson, opposé à l’interdiction au lycée. « Une annonce un peu surréaliste » qui élude les vrais problèmes, dénonce la sénatrice PS Colombe Brossel.

Le

France Marseille vs Newcastle: Pre-Match Security Highlights
3min

Politique

« Violences policières » : la gauche du Sénat demande une commission d’enquête sur de « potentiels dysfonctionnements » au sein de l’IGPN et l’IGGN

Suite aux récentes révélations mettant en cause les forces de l’ordre dans des affaires de violences au sein des personnes dépositaires de l’autorité publique, la gauche du Sénat demande à la commission des lois de se doter des prérogatives d’une commission d’enquête visant à examiner les conditions dans lesquelles l’IGPN et l’IGGN exercent leurs prérogatives.

Le

Paris : Debate session on the draft budget law for 2026
4min

Politique

Budget de la Sécu : la règle de l’entonnoir peut-elle faciliter un compromis ?

Mercredi, députés et sénateurs ne sont pas parvenus à trouver une un accord en commission mixte paritaire sur le projet de loi de la Sécurité sociale. Le texte repart donc pour une nouvelle lecture en séance publique à partir de mardi, à l’Assemblée nationale. Les députés vont plancher sur le texte sorti du Sénat et conformément à la règle dite de l’entonnoir, leur droit d’amendement est limité. Ce qui va accélérer les débats mais sera-t-il suffisant pour arriver à un compromis ? Explications.

Le

Paris : session of questions to the government at the Senate
4min

Politique

Décentralisation : un rapport du Sénat remis au Premier ministre

Afin d’accompagner Sébastien Lecornu vers son engagement d’un grand acte de décentralisation, Gérard Larcher avait fait parvenir le 31 octobre la contribution du Sénat. Le document que Public Sénat a pu consulter appelle à consacrer un principe de différentiation et d’autonomie fiscale des collectivités.

Le