« On a peut-être commis des erreurs », reconnaît Alexandre Martinez président de la fédération française de rugby

« On a peut-être commis des erreurs », reconnaît Alexandre Martinez président de la fédération française de rugby

Les présidents, intérimaires, des fédérations françaises de rugby (FFR), Alexandre Martinez, et de football (FFF), Philippe Diallo, ont été auditionnés aujourd’hui par les sénateurs de la commission de la Culture à propos de la mise en œuvre de la loi sur la démocratisation du sport. L’occasion de revenir sur la gouvernance de ces deux fédérations, marquées par des scandales.
Henri Clavier

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Ce sont deux présidents par intérim qui se sont donc présentés après les démissions de Bernard Laporte, en janvier 2023 et de Noël Le Graët en février de la même année. Une situation assez rare pour être signalée mais qui semble de plus en plus fréquente. Les deux présidents démissionnaires ont été mis en cause pour leur gestion, tant humaine que financière, le président de la fédération française de Tennis, Gilles Moretton, est également mis en cause pour son management brutal et des abus de biens sociaux. La question de la gouvernance des fédérations sportives est donc brûlante alors que les Jeux Olympiques commenceront dans moins d’un an et demi, et la coupe du monde de rugby, organisée en France, le 8 septembre.

« Avant toute chose, il faut surtout préparer les équipes qui arrivent à la fédération »

Interrogé sur la gestion des fédérations sportives et notamment la place de l’exécutif dans la gouvernance des fédérations, Alexandre Martinez (FFR) a reconnu que les membres du Comité directeur et du Bureau fédéral ne disposaient pas forcément de la formation nécessaire pour assurer une bonne gouvernance de la fédération. « Quand on arrive dans une fédération, les questions de la gouvernance et de l’éthique se posent mais, on ne sait pas forcément y répondre », affirme Alexandre Martinez. « Avant toute chose, il faut surtout préparer les équipes qui arrivent à la fédération. On a peut-être commis des erreurs », poursuit Alexandre Martinez à propos de la personnalisation du pouvoir de Bernard Laporte.

Une situation similaire à celle de la FFF où Noël Le Graët exerçait une importante domination sur le Comité exécutif (l’instance dirigeante de la FFF). Pour rappel, l’Assemblée fédérale élit une liste au Comité exécutif. La liste majoritaire remporte alors la totalité des douze sièges du comité exécutif (en plus des présidents des ligues de football professionnel et amateur qui sont membres de droit), et la tête de liste devient président de la FFF. Un modèle régulièrement critiqué pour l’absence d’opposition au sein du Comité exécutif. Pourtant, la « première crise de gouvernance dans les temps modernes remonte à la coupe du monde 2010 », et « cette crise sportive a engendré une crise de gouvernance », juge Philippe Diallo. « À cette occasion, il est sorti une nouvelle gouvernance, qui reposait sur plusieurs axes. Un exécutif resserré, la mise en place d’un scrutin de liste qui porte un programme. L’idée était d’avoir une cohérence dans l’action fédérale », justifie Philippe Diallo sans remettre en question la responsabilité de cette organisation dans l’exercice du pouvoir de Noël Le Graët.

 

« Force est de constater que cette gouvernance a eu des résultats probants sur la durée », insiste Philippe Diallo en vantant les résultats sportifs de l’équipe de France durant la période 2010-2022. Une réussite économique également puisque « la FFF a réussi à franchir pour la première fois la barre des 100 millions reversés au foot amateur », continue Philippe Diallo. Le président par intérim de la FFF omet néanmoins de préciser que cette organisation a pu favoriser le management tyrannique de Noël Le Graët, visé par des accusations de harcèlement sexuel, tel que décrit par l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche. Ce dernier avait tout fait pour se maintenir à la tête de la FFF dans ces circonstances, après sa démission, Noël Le Graët a toutefois été nommé directeur du bureau parisien de la FIFA, la fédération internationale de football.

« On est, aujourd’hui, sur le chantier de la mise en œuvre de la loi sur le sport »

Dans ce contexte, l’intégration des dispositions de la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France aux statuts des fédérations sportives interroge. La loi cherche à démocratiser les instances dirigeantes du sport et prévoit notamment la limitation à trois mandats pour les présidents de fédérations sportives et impose la mise en place d’une parité progressive. « On est, aujourd’hui, sur le chantier de la mise en œuvre de la loi sur le sport. On a introduit une nouvelle forme de gouvernance, 100 % des clubs contribuent à l’élection des dirigeants de la fédération, donc on a introduit une démocratie totale », rassure Alexandre Martinez, président par intérim de la FFR. Philippe Diallo a, également, voulu défendre une démocratisation des institutions, en déclarant s’orienter vers une « baisse du pourcentage des clubs pro au sein de l’assemblée fédérale ».

Enfin, sur la parité, certaines difficultés relatives au passage du comité exécutif à 28 membres dont sept seront des représentants des divers secteurs professionnels de la fédération nommés par des tiers. « S’agissant de la parité, ce qui nous semblerait une garantie serait que la parité soit liée à la présentation de la liste elle-même en excluant les personnes qualifiées qui sont désignées par des tiers », précise Philippe Diallo tout en rappelant que « notre Comité exécutif est composé à 25 % de femmes dont la Secrétaire générale et la trésorière ».

« Je suis très demandeur d’un pouvoir de régulation »

Au-delà de la gouvernance nationale du sport, la gouvernance européenne et mondiale du sport suscite d’importants questionnements à l’heure où certains clubs de football professionnel souhaiteraient se passer des fédérations nationales et européennes pour organiser des compétitions privées. Un véritable serpent de mer qui a connu un retour sur le devant de la scène « à l’occasion de la tentative de création d’une super ligue privée en Europe ». « Est-ce qu’on veut une américanisation du sport européen, avec des ligues fermées ? Ou alors nous souhaitons préserver un modèle sportif européen ? », s’interroge Philippe Diallo.

Pour garantir l’existence de ce modèle européen du sport, « encore faut-il qu’il y ait une capacité de régulation, et cela dépend des ententes entre gouvernements, notamment au niveau européen », précise Philippe Diallo. « Je suis très demandeur d’un pouvoir de régulation », continue ce dernier. Un sujet absolument majeur pour le futur du sport et du football européen, notamment pour en éviter une financiarisation excessive.

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