Pandora Papers : pour le Sénat, « le compte n’y est pas » dans la lutte contre la fraude fiscale

Pandora Papers : pour le Sénat, « le compte n’y est pas » dans la lutte contre la fraude fiscale

Lors des questions d’actualité au gouvernement, Olivier Dussopt, ministre chargé des Comptes publics a été interrogé de nombreuses fois par des sénateurs de tous les bancs. Il a défendu l’action du gouvernement en la matière face, notamment, à Nathalie Goulet et Éric Bocquet qui pointent des engagements non tenus et une politique timide à l’échelle européenne.
Louis Mollier-Sabet

Temps de lecture :

2 min

Publié le

Mis à jour le

« La fraude fiscale sape le pacte républicain », attaque directement Nathalie Goulet en posant sa question à Olivier Dussopt. Des mots que l’on n’entend pas toutes les semaines sur les bancs de la majorité sénatoriale, mais l’ampleur des révélations du consortium international de journalistes nommées « Pandora Papers » a retenu l’attention des sénateurs. La sénatrice centriste poursuit son sévère diagnostic : « Notre dette flambe, pendant que certains cachent des millions dans les paradis fiscaux nos étudiants font la queue devant les banques alimentaires et nos agriculteurs se débattent dans des difficultés infernales. »

200 millions d’euros récupérés grâce aux Panama Papers

Nathalie Goulet met aussi en cause la réponse française et européenne à ces révélations : « 48h après ces révélations, l’Union européenne supprime trois territoires de la liste des territoires non coopératifs, vous avouerez que c’est un mauvais timing. » Même son de cloche chez son collègue communiste Éric Bocquet [que nous avions interviewé sur le sujet], qui demande au gouvernement d’utiliser la présidence européenne de la France pour « mettre à jour » la liste européenne des paradis fiscaux en y « incluant notamment le Luxembourg et Chypre. »

Sur ce point-là, le ministre chargé des Comptes publics n’a pas répondu aux sénateurs. Il a simplement assuré que le gouvernement analysait avec « la détermination la plus totale » les informations révélées par la presse pour « diligenter les contrôles fiscaux les plus sévères » possibles. Olivier Dussopt a aussi vanté l’action menée sous le quinquennat d’Emmanuel Macron et… de François Hollande, majorité dont l’ancien député socialiste faisait partie. « Rendons à César ce qui appartient à César », précise le ministre chargé des Comptes publics, rien que ça. Ainsi, la loi de 2018 de lutte contre la fraude fiscale mettant en place un échange d’information à l’échelle de l’Union européenne aurait permis de dégager 107 milliards d’euros pour les pays membres. Au niveau français, le gouvernement aurait réussi à récupérer 200 millions d’euros grâce à 657 dossiers de redressements après les révélations des « Panama Papers. »

« Votre bilan n’est pas exactement celui que vous dîtes »

Pour Nathalie Goulet, le bilan du gouvernement « n’est pas exactement celui que vous dites. » La sénatrice centriste dresse une action plus mitigée de l’exécutif en la matière : « Vous avez réduit les moyens humains pour le contrôle fiscal et douanier, vous avez démantelé la délégation nationale à la lutte contre la fraude. Il reste 577 enquêtes préliminaires, pour trois enquêteurs en cours pour fraude fiscale et blanchiment et vous vous êtes opposés à la position légitime du Sénat qui voulait prolonger le délai d’enquête. » La sénatrice de l’Orne conclut : « Le compte n’y est pas. »

Sur les bancs communistes, Éric Bocquet ne se montre – sans surprise pour un sénateur en pointe sur le sujet – pas beaucoup plus tendre en proposant au ministre « la deuxième lame » : « Monsieur le ministre Bruno Le Maire s’est déclaré choqué, quand nos concitoyens sont ulcérés. L’objectif est d’échapper à l’impôt et au juge grâce à cette industrie de l’opacité. Le problème est systémique. » Éric Bocquet va même jusqu’à proposer des pistes de réflexion « constructives » au gouvernement : « Il faut recréer des postes de contrôleurs, il y a eu 38 000 emplois supprimés dans les finances publiques. Vous pouvez créer l’observatoire contre la fraude fiscale annoncé en 2018, nous sommes toujours candidats à titre bénévole. »

Dans la même thématique

Pandora Papers : pour le Sénat, « le compte n’y est pas » dans la lutte contre la fraude fiscale
3min

Politique

« Il faut sortir du macronisme, parce qu’il a fait beaucoup de mal à la démocratie », affirme Julien Aubert

Michel Barnier comme Premier ministre doit être « un choix d’opposition, de cohabitation » pour Julien Aubert. Sur la situation politique actuelle, Julien Aubert s’affiche en opposition à la politique menée par le camp présidentiel : « Le message des urnes en juin dernier, au premier comme au deuxième tour, c’est ‘on ne veut plus du en même temps, on ne veut plus d’Emmanuel Macron, et on ne veut plus du bloc central’ Qu’est-ce que l’on entend depuis quelques semaines ? Une reconstitution du bloc central ». Pour le vice-président des Républicains, « il faut sortir du macronisme, parce qu’il a fait beaucoup de mal à la démocratie, le ‘en même temps’ a fait beaucoup de mal à la démocratie ». Pour cela, Michel Barnier est « un excellent choix », à condition qu’il soit considéré comme « un choix d’opposition, de cohabitation » précise le vice-président des Républicains. En ce qui concerne les ministres pouvant composer le futur gouvernement, Julien Aubert estime qu’ « il ne sera pas compréhensible pour les électeurs d’avoir un gouvernement de gauche et de macronistes, alors que pendant 7 ans les Républicains ont déclaré qu’ils étaient un parti d’opposition […] et qu’ils avaient un problème de nature avec le macronisme ». Hier matin, Thierry Breton, commissaire européen au Marché intérieur a annoncé sa démission en diffusant sur X/Twitter sa lettre de démission adressée à Ursula von der Leyen. Dans ce courrier, l’ancien commissaire européen dénonce la gouvernance de la présidente de la Commission européenne : « Il y a quelques jours, dans la toute dernière ligne droite des négociations sur la composition du futur Collège, vous avez demandé à la France de retirer mon nom – pour des raisons personnelles qu’en aucun cas vous n’avez discutées directement avec moi – et proposé, en guise de compromis politique, un portefeuille prétendument plus influent pour la France au sein du futur Collège ». Pour Julien Aubert, le fait que « la présidente de la Commission européenne parvienne à forcer le choix d’un Etat fondateur de l’Union en lui faisant un chantage au portefeuille, cela montre bien que l’influence de la France s’est affaiblie ». Dans la foulée de cette démission, Emmanuel Macron a ainsi proposé Stéphane Séjourné pour remplacer Thierry Breton. Un choix que le vice-président des Républicains qualifie de « recasage ».

Le

Paris: Concertation Emmanuel Macron et Nouveau Front Populaire Elysee
10min

Politique

Gouvernement Barnier, destitution, retraites… Les hésitations de la gauche sur la stratégie à adopter

Le Nouveau Front Populaire (NFP) peine à porter une voix commune sur les prochaines échéances parlementaires, malgré la volonté partagée par l’ensemble des groupes de gauche de censurer le futur gouvernement de Michel Barnier. En outre, l’affrontement des derniers jours entre Jean-Luc Mélenchon et François Ruffin interroge sur la place de LFI au sein de l’alliance.

Le

Paris: Designation Bureau Assemblee Nationale
5min

Politique

Destitution : la procédure lancée par LFI va-t-elle pour la première fois passer le filtre du Bureau de l’Assemblée nationale ?

Mardi, la recevabilité de la proposition de résolution, déposée par le groupe LFI visant à « engager la procédure de destitution » à l’encontre du chef l’Etat sera examinée par le Bureau de l’Assemblée nationale. Si jamais, le Bureau décidait pour la première fois de transmettre la procédure de résolution à la commission des lois, de nombreuses autres étapes resteraient à franchir afin que la destitution prévue à l’article 68 de la Constitution soit effective.

Le

Current affairs question session with the government – Politics
8min

Politique

Gouvernement Barnier : vers « une confrontation beaucoup plus frontale qu’avant » au Sénat

Avec le soutien de la droite à Michel Barnier, le groupe LR va se retrouver dans la majorité gouvernementale. De quoi tendre les débats face au « front des groupes de gauche » ? Patrick Kanner, à la tête des sénateurs PS, promet déjà une opposition musclée contre le « couple Barnier /Macron ». Il a demandé à ses troupes de « se préparer à une ambiance différente ». Mais pour le sénateur LR Max Brisson, « le Sénat restera le Sénat. Les clivages politiques ne sont pas du tout comparables à ce qu’ils sont à l’Assemblée ».

Le