Sous la pression des critiques et contestée par ses alliés, la Française Nathalie Loiseau a fini par jeter l'éponge: elle renonce à briguer la présidence du groupe centriste du Parlement européen, pour y sauver les ambitions des macronistes.
Malgré une campagne des européennes jugée terne, la cheffe de file de la liste "Renaissance" semblait avoir toutes les chances de prendre la tête de "Renew Europe", qui compte jouer un rôle pivot dans l'hémicycle européen, où il sera le troisième groupe politique.
Les partisans du président français Emmanuel Macron y ont fait une entrée en force avec la principale délégation nationale de ce groupe, forte de 21 députés sur un peu plus d'une centaine.
Mais c'était sans compter avec la méfiance de certains de ses alliés libéraux, face à ces nouveaux venus. Et surtout avec les répliques d'une controverse, provoquée par des propos peu amènes de Nathalie Loiseau lors d'un "off" avec des journalistes à Bruxelles la semaine dernière.
Ses critiques envers le candidat du PPE à la présidence de la Commission, Manfred Weber, qualifié d'"ectoplasme", mais surtout envers des membres de l'ALDE (l'Alliance des libéraux et démocrates pour l'Europe, groupe sur lequel sont bâties les fondations de "Renew Europe"), étaient censées ne pas être publiées, ou en tout cas sans attribution.
Mais elles ont été rapportées dans le quotidien belge Le Soir, puis dans plusieurs autres journaux, suscitant de vives réactions des alliés visés.
- "Tout est à faire" -
Mme Loiseau, qui avait confié penser que "tout est à faire" dans ce groupe habitué à jouer les seconds rôles au Parlement européen, avait ensuite affirmé "ne pas reconnaître" les propos qui lui étaient attribués, dans un courriel adressé à ses collègues.
Mais selon une source au sein de LREM, le parti présidentiel, elle a finalement été convaincue, après avoir résisté, de renoncer à la présidence du groupe à l'issue d'une réunion mercredi soir avec certains de ses alliés européens.
"Ils lui ont fait comprendre que ce n'était pas possible de prendre la présidence du groupe", a expliqué cette source.
L'ex-ministre aux Affaires européennes "a fait un choix en responsabilité pour s'assurer que la délégation Renaissance aura les postes qui permettront d'avoir la plus grande influence", a expliqué à l'AFP un membre de son entourage. Les conséquences du "off" n'expliquent pas à elle seules son renoncement, mais "cela n'a pas facilité les choses", a reconnu cette source.
Face à l'affaiblissement de Mme Loiseau, plusieurs candidats d'autres pays auraient manifesté leur intérêt ces derniers jours pour la présidence de "Renew", qui sera attribuée les 18 ou 19 juin, a affirmé une source européenne.
- Prix à payer -
Dans ce contexte, et face à une multitude de candidats, les macronistes auraient été contraints de payer chèrement le maintien de la candidature de Mme Loiseau.
En renonçant notamment à des postes d'influence comme des présidences de commissions que comptent obtenir les centristes dans le nouveau Parlement européen, dont la session constitutive aura lieu le 2 juillet.
Il s'agit notamment de préserver les chances du numéro deux de la liste Renaissance, l'écologiste Pascal Canfin, de briguer la tête de la commission environnement du Parlement.
Cette semaine, les macronistes avaient enregistré une victoire symbolique en obtenant que le mot "libéral", trop connoté en France, disparaisse dans la nouvelle dénomination du groupe centriste.
"Renew" devrait avoir un rôle charnière au Parlement européen, où il sera le troisième groupe derrière celui des conservateurs du Parti populaire européen (PPE, droite) et des sociaux-démocrates (S&D). Et ce d'autant plus que ces deux derniers groupes ont perdu lors des élections leur capacité historique à former une majorité à eux seuls.